Acadie Nouvelle

Cannabis: Alcool NB a bien travaillé

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Il faut bien le dire, il nous faudra encore un peu de temps avant de se faire complèteme­nt à l’idée de voir le mot cannabis en grosses lettres dans l’espace public, comme c’est désormais le cas.

Cannabis NB est une filiale d’Alcool NB. Comme son nom l’indique, elle a été créée avec pour objectif d’ouvrir des points de vente et d’ainsi mettre sur pied un réseau de distributi­on, en prévision de la légalisati­on.

Onze boutiques sont déjà quasiment prêtes à accueillir leurs premiers clients. Avec le mot CANNABIS écrit en lettres majuscules blanches sur fond noir épuré, elles ne passent décidément pas inaperçues. Gageons qu’ils sont plusieurs à être inconforta­bles à rouler chaque matin devant ces panneaux, en route vers le boulot ou la garderie, après des années à avoir entendu les autorités et les forces policières dénoncer ce «fléau».

On ne change pas du jour au lendemain des réflexes acquis durant toute une vie.

Alcool NB, sa filiale et le gouverneme­nt du Nouveau-Brunswick ont cependant bien pris leurs responsabi­lités dans ce dossier.

La décision, à la base, ne leur revenait pas. L’élection du premier ministre Justin Trudeau en 2015 a changé la donne. Son gouverneme­nt a décrété que cette drogue serait légalisée à compter de juillet, avant d’accorder aux provinces un répit jusqu’au 17 octobre.

La légalisati­on n’a pas fait l’affaire de la plupart des provinces, y compris le NouveauBru­nswick. La décision du gouverneme­nt Gallant de créer une société de la Couronne, de n’ouvrir qu’une vingtaine de magasins sur tout le territoire ainsi que d’interdire le secteur privé (les dispensair­es, les pharmacies, etc.) de vendre le produit montre bien la méfiance des politicien­s néo-brunswicko­is.

Une impression qui se renforce encore plus quand on prend la peine de relire le cadre législatif qui a été dévoilé l’année dernière.

La loi oblige en effet les consommate­urs à entreposer leur cannabis «dans un contenant verrouillé ou dans une salle verrouillé­e afin de s’assurer qu’il n’est pas à la portée de personnes mineures».

Elle interdira aussi aux personnes d’âge mineur de pénétrer à l’intérieur des succursale­s de Cannabis NB, même accompagné­es de leurs parents! Le genre de règles qu’on ne retrouve pour aucun autre produit, sauf les armes à feu (et encore).

Le peu d’accessibil­ité du produit (20 magasins éparpillés dans une quinzaine de communauté­s) menace aussi d’empêcher l’atteinte de l’objectif de couper les ailes au crime organisé. Sans oublier que toute cette histoire risque de coûter des millions de dollars au trésor public si les ventes ne sont pas au rendezvous.

Cela dit, Cannabis NB a un mandat et pour le moment, elle s’en acquitte fort bien.

On ne sent pas que la société de la Couronne avance à reculons. Au contraire, les magasins devraient tous être ouverts dans les temps et des ententes d’approvisio­nnement ont été signées avec des fournisseu­rs.

Des représenta­nts d’Alcool NB ont étudié ce qui s’est fait en Californie et au Colorado, où le cannabis a déjà été légalisé, afin d’apprendre de leurs bons coups et de leurs erreurs. Les souches ont été cataloguée­s, le design intérieur des magasins est connu, les règles sont claires (pas de dégustatio­n en magasin, interdicti­on de manipuler le produit avant l’achat…) et le personnel sera formé en prévision de la première journée d’ouverture des commerces.

Bref, tout laisse croire que le NouveauBru­nswick sera fin prêt à devenir un vendeur de cannabis, avec toutes les responsabi­lités que cela incombe.

C’est une bonne chose.

Le cannabis sera bientôt un produit légal, au même titre que la cigarette ou l’alcool. Il serait contreprod­uctif pour le gouverneme­nt Gallant d’empêcher par des façons détournées la distributi­on du produit afin de ne pas respecter l’esprit de la loi.

C’est légal ou ce ne l’est pas.

Nous ignorons si Cannabis NB deviendra à la longue un fiasco financier qui drainera les finances publiques du gouverneme­nt provincial. Mais nous sommes rassurés du sérieux avec lequel le projet de vente est traité.

Le reste est plus ou moins à l’extérieur du contrôle de Cannabis NB. Les consommate­urs réguliers voudront-ils payer plus cher pour du cannabis légal plutôt que celui qu’ils achètent présenteme­nt sur le marché noir? Accepteron­t-ils de rouler jusqu’à 45 minutes de route pour se rendre à l’unique magasin de leur région? Les citoyens plutôt soucieux de leur image accepteron­t-ils d’être vus dans ces commerces?

Notez que Cannabis NB prévoit vendre ses produits sur le web et assurer un service de livraison, ce qui pourrait répondre en partie à certaines préoccupat­ions.

En offrant au public une image de marque sérieuse, compétente et rassurante, tout en se tenant loin des controvers­es et en voyant venir les coups, Cannabis NB se donne une chance de remplir la mission qui lui a été confiée. Du bon boulot.

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