ÉLECTIONS: LES PRINCIPAUX OBSTACLES DES CHEFS
Quel est le principal obstacle que devra surmonter chacun des chefs afin de pouvoir dire «mission accomplie», le soir du 24 septembre. L’Acadie Nouvelle a posé la question aux politologues Roger Ouellette de l’Université de Moncton et Tom Bateman, de l’Université St. Thomas, à l’aube de la campagne électorale.
BRIAN GALLANT, PARTI LIBÉRAL
Roger Ouellette: Est-ce que Brian Gallant pourra maintenir ses acquis chez les anglophones? C’est un très, très grand défi. C’est pour ça que les libéraux ont un profil très bas concernant les demandes des francophones. Les débats linguistiques, ils n’ont pas du tout le goût d’aller là parce qu’ils n’ont rien à gagner et tout à perdre. S’ils ouvrent cette boîte de Pandore, ils savent très bien qu’ils peuvent perdre de précieux votes chez les anglophones.
Tom Bateman: Brian Gallant doit convaincre l’électorat qu’il a accompli quelque chose durant les quatre dernières années. Les grands indicateurs du bien-être de la province n’ont pas beaucoup changé depuis qu’il est au pouvoir. Le déficit a diminué, mais c’est surtout en raison d’une augmentation des taxes et des impôts et ça, pour beaucoup de monde, ça ne compte pas. Peu importe la valeur des grandes politiques publiques (comme la scolarité gratuite et les garderies abordables), je ne suis pas certain qu’elles sont bien connues et qu’elles ont eu un grand impact sur l’idée que se font les Néo-Brunswickois des accomplissements de ce gouvernement.
BLAINE HIGGS, PARTI PROGRESSISTE-CONSERVATEUR
Ouellette: Le défi de Blaine Higgs, c’est de faire en sorte que le Parti progressiste-conservateur puisse aller rallier des francophones. Il devra essayer de ne pas apparaître comme une menace pour les francophones. Il a réussi à aller chercher des candidats chez les francophones. Robert Gauvin dans ShippaganLamèque-Miscou, ç’a été une bonne prise. Le maire de Caraquet, Kevin Haché, comme candidat, je ne l’avais pas vu venir. Je pense que c’est un bon coup. C’était un défi d’aller chercher des candidatures francophones crédibles et je pense qu’il a réussi. Est-ce que ces personnes pourront se faire élire? La question est ouverte. Est-ce que M. Higgs va poser certains gestes pour dire aux francophones: «Je veux votre vote et je suis prêt à faire quelque chose pour vous»?
Bateman: Blaine Higgs est très silencieux depuis un bon bout de temps. On ne l’a pas vu beaucoup en public. Il doit se faire connaître de la population francophone. Il doit prouver qu’il peut parler français et qu’il est à l’aise avec les francophones. Il doit prouver qu’il comprend leurs préoccupations s’il veut aider ses candidats locaux. Blaine Higgs doit aussi prouver qu’il n’est pas seulement le bonnet blanc alors que les libéraux sont le blanc bonnet. Si M. Higgs est élu, est-ce que ce sera encore du pareil au même pour un autre quatre ans? Qu’est-ce qui sera différent s’il est élu et sera-t-il capable de nous en convaincre?
DAVID COON, PARTI VERT
Ouellette: M. Coon doit se faire réélire dans sa circonscription et peut-être, avec un peu de chance, avoir un ou deux autres candidats verts avec lui. Sa réélection n’est pas acquise. La dernière fois, il y avait cinq candidats dans Fredericton-Sud et il s’était glissé làdedans. Au niveau de son équipe, je vois beaucoup de candidats. Je pense qu’ils ont fait un travail de terrain intéressant.
Bateman: David Coon a l’apparence d’un candidat indépendant. Le Parti vert, c’est lui. Il aura fait une bonne performance s’il est réélu et je pense qu’il a de bonnes chances de réussir. Beaucoup de gens ont énormément de respect pour M. Coon, mais ils ne savent pas grand-chose au sujet du Parti vert. Ils respectent M. Coon, mais ils pensent que le parti est un peu cinglé.
JENNIFER MCKENZIE, NPD
Ouellette: Au NPD, le défi est d’essayer de maintenir ses acquis. Auparavant, le 3e parti c’était le NPD et il s’est fait prendre sa place par le Parti vert. Est-ce que Jennifer McKenzie pourra rassembler une équipe de candidats pour remonter la pente et reprendre la place qu’ils ont perdue dans les sondages? Le défi du NPD est de demeurer pertinent. Sinon, il va continuer à végéter. Ça ne s’annonce pas bien pour le NPD.
Bateman: Jennifer McKenzie a besoin de se faire connaître. Je ne crois pas que beaucoup de Néo-Brunswickois connaissent son nom. Son parti a beaucoup souffert de la montée du Parti vert et de M. Coon. Beaucoup de partisans du NPD ont fait défaut au parti pour aller chez les verts. Mme McKenzie doit régler les problèmes de son parti à l’interne et se faire connaître de la population.
KRIS AUSTIN, ALLIANCE DES GENS
Ouellette: Le défi de l’Alliance des gens est de passer de nano parti à tiers parti. Les anglophones se retrouvent beaucoup dans M. Higgs, donc ça m’apparaît difficile pour Kris Austin. De par son passé, Higgs a vraiment été décrit comme un frileux par rapport au bilinguisme et l’on sait très bien que l’Alliance des gens est très frileuse par rapport au bilinguisme. Je ne pense pas que les gens qui sont attirés par l’Alliance voient M. Higgs d’un mauvais oeil.
Bateman: Kris Austin est le leader d’un parti populiste qui tente de surfer sur ce qu’il reste du CoR et sur le phénomène Trump. Il s’est presque fait élire en 2014, mais la progressiste-conservatrice Pam Lynch a fini par l’emporter et elle travaille très, très fort depuis dans la circonscription. M. Austin va devoir essayer de la défaire. Les meilleures chances du parti sont dans les régions rurales, mais même là ce n’est pas fort. M Austin doit convaincre l’électorat qu’il ne s’agit pas seulement d’un parti de timbrés. ■