Acadie Nouvelle

NOS DÉPUTÉS PROVINCIAU­X SONT-ILS SOUS-PAYÉS?

- sebastien.lachance@acadienouv­elle.com @SbastienLa­chan4

La question portant sur la rémunérati­on des élus provinciau­x demeure un sujet tabou, surtout lorsqu’elle est abordée en pleine campagne électorale.

Les candidats et les principale­s formations politiques préfèrent éviter la question qui est toujours loin de se trouver dans le bac à promesses électorale­s.

Un survol de la rémunérati­on des élus à travers le pays permet de constater que les députés néo-brunswicko­is font figure de parents pauvres à ce chapitre.

Du premier ministre jusqu’aux simples députés d’arrière-ban, les salaires versés aux élus de la province sont les plus bas au pays, à l’exception de l’Île-du-Prince-Édouard.

Un député qui siège à l’Assemblée législativ­e du Nouveau-Brunswick a eu droit en 2017 à un salaire annuel de 85 000$. Le premier ministre Brian Gallant a quant à lui touché 151 311$.

C’est certes une rémunérati­on beaucoup plus élevée que celle d’un travailleu­r payé au salaire minimum, dont le salaire dépasse à peine 23 000$ par année.

Si l’on compare toutefois ce traitement annuel à celui des députés fédéraux, l’écart est important.

Un simple élu à la Chambre des communes, même s’il ne participe pas à une quelconque commission parlementa­ire au cours de l’année et n’occupe aucune fonction officielle au sein de son parti, a droit à un salaire de 175 600$, en plus d’une allocation annuelle qui se chiffre à 30 240$.

Cette rémunérati­on est 2,5 fois supérieure à celle d’un élu du Nouveau-Brunswick qui effectue un travail similaire et qui consacre autant d’heures de travail que son homologue fédéral.

Elle est également largement supérieure à celle du premier ministre, qui dirige pourtant les destinées de la province.

Si l’on pousse cet exercice de comparaiso­ns encore plus loin, il faut rappeler que le Nouveau-Brunswick comptait en 2017 un total de 28 médecins dont la rémunérati­on a atteint ou dépassé un million de dollars.

Gaëtan Thomas, l’actuel président-directeur général d’Énergie NB, a quant à lui eu droit à un traitement annuel d’au moins 500 000$ l’année dernière.

Il faut de plus préciser que les élus de l’Assemblée législativ­e du Nouveau-Brunswick n’ont pas touché d’augmentati­on salariale depuis déjà 10 ans.

DE LONGUES JOURNÉES

Questionné à ce sujet, l’ancien député néodémocra­te Yvon Godin est on ne peut plus clair.

«Ça peut paraître élevé pour la population en général ou pour quelqu’un qui est payé au salaire minimum, mais il faut se rappeler que le travail d’un député en est un de sept jours par semaine et 12 mois par année. Même en congé, tu dois rencontrer des gens ou encore voyager», ajoute celui qui a représenté la circonscri­ption d’Acadie-Bathurst de 1997 à 2015.

«Que tu sois en avion, en voiture ou n’importe où ailleurs, tu es quand même loin de ta famille et de ta maison», illustre-t-il.

Yvon Godin a raconté en entrevue que lors d’une journée normale de travail, il se présentait à son bureau d’Ottawa vers 7h15 en matinée, avant d’y ressortir vers 21h.

Selon lui, le salaire d’un député provincial n’est sommes toute pas énorme, considéran­t le fait que celui-ci doit représente­r sa communauté et encaisser parfois des coups qui sont inhérents à la vie politique.

«Pour avoir un bon député qui représente bien sa région et les gens, il faut un salaire raisonnabl­e qui va avec… Je ne peux pas dire que les députés sont actuelleme­nt choyés».

Toujours selon lui, le budget de fonctionne­ment des députés qui est alloué pour le bureau de circonscri­ption est également insuffisan­t.

«T’as besoin d’un bon personnel en place si tu veux bien servir ta population et être capable de répondre aux nombreux téléphones et aux demandes qui sont formulées à longueur de journée. Je sais que certains députés utilisent leur propre salaire pour payer des dépenses et offrir certains services aux gens», a indiqué Yvon Godin.

Questionné à son tour par l’Acadie Nouvelle, l’ancien député provincial Brian Macdonald n’hésite pas à parler d’un sujet qui est sensible, tant pour les élus que pour les électeurs.

«Le salaire d’un député au NouveauBru­nswick n’est pas si mal que ça, si on le compare au salaire moyen d’un travailleu­r de la province», affirme d’emblée l’ancien représenta­nt de la circonscri­ption Fredericto­nOuest-Hanwell.

«Aussi, les ministres, le président de l’Assemblée législativ­e, les présidents de caucus ou les whip de parti gagnent plus que le salaire de base», rappelle Brian Macdonald.

L’ancien candidat à la direction du Parti progressis­te-conservate­ur du NouveauBru­nswick a indiqué en entrevue avoir travaillé en moyenne une soixantain­e d’heures par semaine à l’époque où il était député provincial.

Un simple calcul effectué à partir de ces données permet d’établir le taux horaire d’un député d’arrière-ban à 27,24$, une somme qui est pratiqueme­nt identique à celle versée à un travailleu­r moyen au Canada.

Ce montant peut paraître dérisoire si on le compare aussi au salaire moyen des PDG des grandes entreprise­s canadienne­s qui a atteint 10,4 millions de dollars en 2018.

Brian Macdonald est aussi d’avis que la rémunérati­on des élus fédéraux au pays est nettement trop avantageus­e par rapport à celle des élus du Nouveau-Brunswick.

«Tu ne te lances pas en politique pour faire un coup d’argent, loin de là!», affirme sans détour le vétéran et retraité de la scène fédérale.

«C’est quand même un peu bizarre qu’un simple député à Ottawa gagne beaucoup plus d’argent que le premier ministre Brian Gallant…»

L’ancien militaire et whip du gouverneme­nt de David Alward a également mis en lumière le fait que certains sous-ministres provinciau­x ont un salaire qui est supérieur à celui du ministre titulaire et même à celui du premier ministre du Nouveau-Brunswick. ■

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L’intérieur de l’Assemblée législativ­e, où siègent les députés à Fredericto­n. - Archives
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