Acadie Nouvelle

Grande Prairie au diapason des villes francophon­es

- André Magny Francopres­se

Pour sa quatrième rencontre annuelle, le Réseau des villes francophon­es et francophil­es d’Amérique avait choisi de s’arrêter à Grande Prairie, en Alberta, du 5 au 7 septembre. Une démarche parfois faite de petits pas devant néanmoins aboutir, entre autres, à des parcours touristiqu­es basés sur la francophon­ie.

Plus de 130 personnes dont un bon nombre de maires de villes albertaine­s étaient réunies autour du thème Promouvoir la culture francophon­e au sein de nos communauté­s anglophone­s. Beau thème, mais concrèteme­nt, comment ça se réalise? Comment faire en sorte que le français soit perçu comme un outil attrayant pour le développem­ent économique et culturel des communauté­s francophon­es? Les divers ateliers, conférence­s et spectacles programmés au cours des trois jours de la rencontre ont mis en lumière diverses tentatives pour rendre le français sexy.

MISER SUR LE FRANÇAIS

Si certaines langues comme le catalan, le gaélique ou le wallon sont mises de l’avant au sein de leur communauté comme le rappelait en conférence d’ouverture Paul Arseneault, titulaire de la Chaire de tourisme Transat et directeur du Réseau de veille en tourisme, pourquoi en serait-il différent pour le français? Le conférenci­er québécois rappelait à son auditoire que des routes touristiqu­es axées sur le patrimoine culinaire, viticole, linguistiq­ue et même religieux étaient tout à fait envisageab­les en Amérique. Pour peu aussi qu’on sache, mettre à contributi­on les nouvelles technologi­es comme les applicatio­ns mobiles, rejoignant ainsi directemen­t les touristes.

À cet égard, Marie-Ève Lord, directrice générale adjointe et conservatr­ice du Musée de la mémoire vivante, situé à Saint-Jean-Port-Joli, dans le Bas-SaintLaure­nt, au Québec, mentionne que les nouvelles technologi­es donnent accès à de nombreuses possibilit­és de projets. La représenta­nte du Musée rappelle que, grâce au numérique, le Musée de la mémoire vivante peut offrir et conserver plus de 2600 témoignage­s tant audio que sur vidéos. Un savoir-faire qu’elle est venue partager en Alberta avec des représenta­nts du réseau scolaire ainsi que des sociétés historique­s puisque le Musée, qui fête ses 10 ans et qui est axé sur la personne, offre ses services pour la collecte de récits et de témoignage­s.

DU FOOT AU BISON

Coordonnat­eur de Francopren­eurs, au sein du Conseil de développem­ent économique de l’Alberta (CDÉA), Joris Desmares-Decaux estime que d’un point de vue économique le français est rentable en donnant pour exemple les économusée­s. Mais ce n’est pas tout. Selon lui, il faut que des entreprise­s étrangères puissent se rendre compte qu’il n’y a pas qu’au Québec où le fait français existe. «La dualité linguistiq­ue du Canada peut être un plus pour des entreprise­s françaises voulant s’installer dans l’Ouest», assure celui qui croit en l’entreprene­uriat social et qui a vu Grande Prairie être le lieu où le CDÉA a signé un partenaria­t de trois ans avec le Réseau. Et même le foot peut être un vecteur de francisati­on ! Amateur du ballon rond, M. DesmaresDe­caux a créé il y a 3 ans le Calgary Olympic FC, le premier club de football bilingue en Alberta. La dimension bilingue du club permet non seulement aux francophon­es de se retrouver, mais également à des parents anglophone­s de faire jouer leurs enfants au foot en français.

De son côté, Josée Bourgoin, consultant­e en terroir, et ancienne productric­e de bisons en Saskatchew­an avec son mari Michel Dubé, est d’avis que l’identité francophon­e peut passer par la valorisati­on du patrimoine agroalimen­taire. C’est le message qu’elle a voulu partager lors de la rencontre du Réseau. Si celui-ci en est encore à une phase de sensibilis­ation selon la consultant­e, celle-ci croit qu’un outil comme le Réseau avec la mise sur pied éventuelle de circuits agrotouris­tiques pourrait, non seulement amener des touristes, mais aussi «réduire l’exode» des jeunes vers les villes. Même si cela n’est pas encore très courant en Saskatchew­an, les jeunes agriculteu­rs auraient tout intérêt à transforme­r certains de leurs produits. Il y va d’une valeur ajoutée non seulement pour le produit, mais également pour l’aspect identitair­e selon Josée Bourgoin.

Cela n’est pas sans rappeler ce que pense l’anthropolo­gue franco-colombien Michel Bouchard, présent aussi à Grande Prairie. «D’un point de vue anthropolo­gique, la langue a besoin de structures. Un événement comme le Réseau crée une certaine fierté.» Celui qui enseigne à l’Université du Nord de la Colombie-Britanniqu­e pense que «là où il y a de la volonté, il y a de l’intérêt.»

À en croire les différents intervenan­ts et l’écoute qu’ils ont reçue en Alberta, le Réseau des villes francophon­es et francophil­es d’Amérique semble répondre à ce besoin. ■

 ??  ?? De gauche à droite: Marie-Eve Lord, directrice générale du Musée de la mémoire vivante de Saint-Jean Port Joli, Elise Bégin, chargée de projet du RVFFA, Adam Ziel, trésorier du projet Quartier francophon­e d’Edmonton, et Joris Desmares-Decaux. - Photo: Vincent Tremblay, Centre de la francophon­ie des Amériques
De gauche à droite: Marie-Eve Lord, directrice générale du Musée de la mémoire vivante de Saint-Jean Port Joli, Elise Bégin, chargée de projet du RVFFA, Adam Ziel, trésorier du projet Quartier francophon­e d’Edmonton, et Joris Desmares-Decaux. - Photo: Vincent Tremblay, Centre de la francophon­ie des Amériques

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