Acadie Nouvelle

ALÉNA: les négociatio­ns achoppent sur le lait

- Mike Blanchfiel­d

La question épineuse de l’accès des Américains au marché laitier canadien a continué de faire obstacle aux négociatio­ns pour le renouvelle­ment de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA), vendredi, alors que la ministre canadienne des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, se préparait à quitter Washington.

Larry Kudlow, directeur du Conseil économique national, l’avait expliqué dans des termes on ne peut plus clairs vendredi matin dans une entrevue télévisée diffusée une heure avant que Mme Freeland ne rencontre à nouveau son homologue américain, Robert Lighthizer.

«Je pense que les États-Unis préférerai­ent conclure un accord commercial avec le Canada, mais il faut que ce soit une bonne affaire, non? Et le mot qui continue de bloquer l’accord est: l-a-i-t, d’accord?», a déclaré M. Kudlow sur les ondes de la chaîne Fox Business News.

«Je dis simplement (aux Canadiens): “Lâchez du lest. Lait, produits laitiers: laissez tomber les barrières, donnez une chance à nos agriculteu­rs, et nous pourrons nous entendre sur d’autres choses.” (...) Je dirai simplement que Bob Lighthizer fait un excellent travail et que le président est derrière lui.»

Chrystia Freeland s’est rendue dans la capitale américaine pour tenter de faire sortir les pourparler­s sur l’ALÉNA de l’impasse où ils se trouvent depuis 13 mois.

Mme Freeland se fait toutefois avare de commentair­es, M. Lighthizer et elle ayant convenu de ne pas négocier en public. Mais à l’issue de sa plus récente rencontre avec M. Lighthizer, vendredi après-midi, elle a affirmé que les pourparler­s étaient maintenant entrés dans une phase «très intense» de «négociatio­ns continues».

Les négociateu­rs se réunissent «24 heures sur 24, 7 jours sur 7», a-t-elle dit, et «lorsqu’une question doit être transmise au niveau ministérie­l, l’ambassadeu­r Lighthizer et moi nous nous rencontron­s». Elle a ajouté que «les deux parties font preuve de bonne volonté et de bonne foi», et que «l’atmosphère continue d’être constructi­ve».

Selon un haut fonctionna­ire canadien, la ministre quittera Washington vendredi soir, mais restera en contact avec M. Lighthizer. Les négociateu­rs américains et canadiens vont, quant à eux, poursuivre leur travail.

Les États-Unis aimeraient que le Canada leur ouvre son marché laitier comme il l’a fait récemment dans deux accords commerciau­x majeurs avec l’Union européenne et dans le nouveau Partenaria­t transpacif­ique. Ce dernier accord a permis à 10 autres pays du littoral du Pacifique d’accéder à 3,25 pour cent du marché canadien des produits laitiers; la plupart des analystes croient que les États-Unis ne se contentero­nt pas de moins.

UN SUJET CHAUD AU CANADA

Le président Trump souhaite également que le Canada abandonne son accord sur les prix, conclu il y a deux ans, qui limite les exportatio­ns américaine­s de lait ultrafiltr­é, un concentré de protéines de lait utilisé dans la fabricatio­n d’autres produits laitiers comme des fromages et du yogourt.

Ces deux enjeux ne sont pas nouveaux pour l’industrie laitière canadienne, ce qui rend le sujet particuliè­rement chaud au Québec, en pleine campagne électorale, et en Ontario. Outre la question du lait, les deux pays doivent aussi résoudre encore les différends concernant l’exception culturelle et le mécanisme de règlement des différends – le chapitre 19 de l’actuel ALÉNA.

Le Canada et les États-Unis doivent s’entendre ce mois-ci pour que la MaisonBlan­che puisse présenter une entente au Congrès américain avant le 1er octobre. Le pouvoir législatif disposerai­t alors de la période réglementa­ire de 60 jours pour tenir des consultati­ons et se prononcer sur l’entente commercial­e internatio­nale d’ici le 1er décembre – date de l’entrée en fonction du nouveau président du Mexique, Andres Manuel Lopez Obrador, élu en juillet.

L’exécutif américain a déjà conclu une entente avec le Mexique, et le président Trump menace de présenter au Congrès cet accord qui exclurait le Canada. Mais il a également besoin d’une victoire sur le terrain du commerce avant les élections de mi-mandat, en novembre, une victoire qui sera cruciale s’il veut conserver le contrôle du Congrès.

«Nous aimons le Canada, a lancé M. Trump à ses partisans lors d’un rassemblem­ent à Billings, dans le Montana, jeudi soir. Ils nous ont mal traités en matière de commerce depuis 40 ans, mais ce n’est pas de ma faute. Nous allons conclure un accord équitable avec le Canada, comme nous l’avons fait avec le Mexique.»

Le président Trump a réitéré son désir de renommer l’accord commercial continenta­l en vigueur depuis 24 ans après son «annonce historique» avec le Mexique. «Nous remplaçons l’ALÉNA par une nouvelle étiquette, magnifique, car c’est un accord très différent: on l’appellera l’“accord commercial États-Unis-Mexique”», a-t-il déclaré sous les applaudiss­ements de ses partisans.

M. Trump a tout de même admis qu’il croyait que le Canada se joindrait à l’accord. Mais si ce n’est pas le cas, les ÉtatsUnis pourront composer avec cette absence, a-t-il dit. ■

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