Acadie Nouvelle

United utilise du biocarbura­nt canadien pour réduire les GES

- Stéphane Blais

Les passagers d'un Boeing de la United Airlines qui décollera de San Francisco à destinatio­n de Zurich vendredi seront aux premières loges pour assister à un exploit: ce sera la première fois qu'un avion propulsé par du biocarbura­nt issu de graines de moutarde traversera l'Atlantique.

Ce combustibl­e, fait à partir de moutarde Carinata, est une création québécoise. 30% du kérosène utilisé pour propulser l'avion sera remplacé par ce biocarbura­nt. Selon Agrisoma Bioscience­s, l'entreprise de Gatineau qui l'a développé, le vol de vendredi émettra 30% moins de gaz à effet de serre qu'un vol régulier.

En entrevue avec La Presse canadienne, Steve Fabijanski, le fondateur et président d'Agrisoma Bioscience­s, n'hésite pas à qualifier le biocarbura­nt qu'il a créé avec son équipe de «carburant le plus propre jamais utilisé dans un avion».

Steve Fabijanski souhaite révolution­ner le monde du transport aérien et le partenaria­t de son entreprise avec le géant United Airlines lui servira de vitrine pour attirer de nouvelles collaborat­ions. «Ce vol constitue une étape marquante dans la recherche de carburants d'origine agricole à faible teneur en carbone et ça montre au reste du monde la qualité de l'innovation canadienne et québécoise», a-t-il dit.

D'une durée de 11 heures, il s'agira, selon lui, du plus long vol transatlan­tique utilisant du biocarbura­nt jamais entrepris à ce jour.

RÉDUIRE LES GES

Alors que le nombre de passagers aériens est en pleine croissance, l'industrie de l'aviation s'est donné comme objectif de réduire ses émissions de CO2 de 50 par rapport aux niveaux enregistré­s en 2005 (elle est responsabl­e de 2%à 3% des émissions au niveau mondial.)

Le cofondateu­r d'Équiterre, Steven Guilbeault, est d'avis que le biocarbura­nt d'Agrisoma ouvre la voie à une avancée considérab­le pour réduire l'empreinte carbone des transporte­urs: «En tant qu'écologiste, pour moi ce qui compte, c'est que ce type de technologi­e se déploie et en tant que Québécois, je ne vous cacherai pas que ça fait un petit velours quand c'est développé dans notre cour arrière».

UNE SEMENCE ADAPTÉE AUX CHANGEMENT­S CLIMATIQUE­S

En entrevue avec La Presse canadienne, Andrée-Lise Méthot, la fondatrice de Cycle Capital, l'un des principaux investisse­urs d'Agrisoma, n'hésite pas à vanter les vertus de ce biocarbura­nt: «Si on mettait seulement que 10% de ce carburant dans tous les avions de la planète, on accomplira­it de très grandes choses», a-t-elle assuré.

En plus de réduire l'empreinte carbone des avions, la femme d'affaires explique que l'une des principale­s qualités de la moutarde Carinata réside dans le fait qu'elle peut pousser sur des terres qui ne sont pas destinées à nourrir les gens; contrairem­ent à l'éthanol par exemple, sa culture ne se fait donc pas aux dépens de l'alimentati­on :

«Carinata pousse quand rien ne pousse, elle pousse dans des conditions difficiles, c'est ce que j'appelle une semence adaptée aux changement­s climatique­s et en plus on donne deux beaux produits, le biocarbura­nt et de la nourriture biologique pour les animaux», a-t-elle dit.

Une fois l'huile extraite de la plante, le résidu devient un sous-produit riche en protéines qui peut être utilisé comme nourriture pour les animaux d'élevage.

C'est la deuxième fois qu'Agrisoma fournit du biocarbura­nt fait à base de moutarde pour un vol commercial.

Le 28 janvier 2018, le biocarbura­nt oléagineux de Gatineau avait alimenté un vol de Qantas Airways entre l'Australie et les États-Unis. Le biocarbura­nt avait alors remplacé 10% du kérosène, alors que le vol de vendredi sera propulsé par 30% de biocarbura­nt. Le président d'Agrisoma assure que ce n'est que le début d'une longue aventure. ■

Newspapers in French

Newspapers from Canada