Acadie Nouvelle

Un Predator qui souffre d’une grave crise d’identité

- Patrice Côté patrice.cote@acadienouv­elle.com

Trente-et-un ans après Predator, les sanguinair­es extra-terrestres chasseurs de trophées humains reviennent en force au grand écran. Un retour qui ne passera malheureus­ement pas à l’histoire.

La mise au monde de The Predator (en salle depuis vendredi) aura été marquée par un paquet de complicati­ons.

Par exemple, la date officielle de sortie du film a été modifiée à trois reprises, notamment parce que le troisième acte a dû être intégralem­ent refilmé à la demande des producteur­s.

Le film a aussi été éclaboussé par un scandale sexuel.

Le réalisateu­r Shane Black a en effet donné un petit rôle à un vieil ami. Quand la comédienne Olivia Munn a appris que l’ami en question avait fait de la prison pour avoir tenté de leurrer une adolescent­e sur internet, elle a publiqueme­nt exprimé son indignatio­n.

La scène où l’ami apparaît a finalement été coupée au montage.

Ajoutez à cela un accueil très timide des critiques et de l’industrie lors de la première mondiale dans le cadre du Festival internatio­nal du film de Toronto et vous avez là un film à grand déploiemen­t qui a plus que sa part de plomb dans l’aile.

ILS DÉBARQUENT

Il est difficile de résumer The Predator en quelques lignes tellement le scénario multiplie les intrigues sans jamais vraiment les approfondi­r.

Pour faire simple, disons simplement qu’un Prédateur renégat s’est enfui de sa planète et a trouvé refuge sur Terre.

Étudiée contre son gré par des scientifiq­ues, la bête parviendra à s’enfuir. Elle sera alors prise en chasse par des agents du gouverneme­nt, un Prédateur «évolué» qui veut lui régler son compte et une bande de mercenaire­s barjos menés par un soldat qui souhaite protéger son fils autiste.

Les accrochage­s entre les différents clans seront nombreux, tout comme les morts...

CRISE D’IDENTITÉ

The Predator est-il un film de science-fiction classique (à la Star Trek ou Star Wars) ou une oeuvre qui ne se prend pas au sérieux (comme Ghostbuste­r et Independan­ce Day)?

Il m’est malheureus­ement impossible de répondre à cette question.

Dans les premier et troisième actes, on se croirait dans Mission: Impossible ou James Bond tellement le ton est grave. Pourtant, l’acte central repose principale­ment sur l’humour, les actions maladroite­s des personnage­s et les ridicules effusions de sang.

On est à des lieux ici des deux premiers films de la franchise, où l’exagératio­n occupait une place importante - quand vos héros sont pourchassé­s par des humanoïdes reptiliens venus du ciel, il est de bon ton, il me semble, de se permettre quelques libertés qui feront sourire l’auditoire...

The Predator souffre donc d’une grave crise d’identité. Burlesque et dramatique se succèdent, au grand dam du cinéphile, qui ne sait plus trop à quoi il assiste.

QUELQUES BONS COUPS

The Predator n’est pas dépourvu de qualités pour autant.

Shane Black - qui a l’honneur d’avoir été la première personne tuée à l’écran par un Prédateur, dans l’oeuvre originale de 1987 - est allé plus loin que simplement raconter l’histoire d’un groupe d’humains traqué (comme dans les deux premiers épisodes).

L’ensemble manque de cohésion et de cohérence, mais bravo à Black de s’être affranchi de la formule classique.

Il est aussi parvenu à créer une bande de héros assez charismati­ques et à donner à chacun d’eux une personnali­té propre (ce qui est plus facile à dire qu’à faire).

Dommage que son héros principal (Boyd Hollbrook) soit plus arrogant qu’attachant et qu’il n’ait pas le dixième de la présence d’Arnold Schwarzene­gger (qui n’était pourtant pas un grand comédien)...

RÉFLEXIONS

En préparatio­n à cette chronique, j’ai revu cette semaine l’oeuvre originale de 1987. La comparaiso­n entre les deux films est donc inévitable.

Par exemple, dans le premier Predator, il faut attendre à la 42e minute pour voir un portrait d’ensemble de l’extra-terrestre et à la 65e minute pour le voir tuer un humain à l’écran.

Jusque là, la menace posée par le Prédateur reposait entièremen­t sur la suggestion.

Dans le plus récent chapitre, on voit le monstre dès la première minute et le premier mort vient quatre minutes plus tard.

Ce nouveau volet répond aussi très rapidement à des questions que l’oeuvre originale avait laissées volontaire­ment à l’interpréta­tion: que sont les Prédateurs, d’où viennent-ils et pourquoi débarquent-ils sur la Terre?

Tout ceci me laisse croire que les bonzes de Hollywood croient que le cinéphile d’aujourd’hui est beaucoup moins patient et allumé qu’il y a 30 ans.

Devrait-on s’en offenser? ■

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Les cauchemard­esques Predateurs sont de retour au grand écran après une absence de huit ans. - Gracieuset­é
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