Acadie Nouvelle

François Legault et le N.-B.

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Le Nouveau-Brunswick a fait une petite apparition surprise pendant la campagne électorale au Québec. Le peu de connaissan­ces du chef François Legault à propos de la province voisine en dit long à son sujet… mais encore plus à propos de nous!

Le Québec et le Nouveau-Brunswick sont tous les deux en campagne électorale depuis la fin août. Elles se ressemblen­t à certains égards. Dans les deux cas, le Parti libéral tente de se maintenir au pouvoir face à un adversaire positionné plus à droite. Les luttes sont très serrées, la possibilit­é de gouverneme­nts minoritair­es est bien réelle et nul ne sait quel impact auront les tiers partis sur le résultat.

La Coalition avenir Québec était donnée favorite pour l’emporter au déclenchem­ent des élections. Mais son chef François Legault s’est embourbé dans une série d’engagement­s controvers­és en matière d’immigratio­n dont il avait mal saisi la portée.

Il avait ainsi décrété que les immigrants devraient subir un test de valeurs et prouver qu’ils parlent le français, au risque d’être expulsés. Face aux critiques, il a mis un peu d’eau dans son vin.

Cette histoire a fait mal à sa campagne. Son avance dans les sondages a fondu comme neige au soleil.

M. Legault doit depuis répondre à de nombreuses questions sur le sujet tous les jours, ce qui a démontré sa méconnaiss­ance du processus d’immigratio­n. C’est dans ce contexte qu’un journalist­e lui a posé une question toute simple que l’on retrouve apparemmen­t dans le test d’accès à la citoyennet­é canadienne: combien y a-t-il de provinces bilingues au Canada?

François Legault n’en avait aucune idée. Il a tenté de se tirer de cette fâcheuse situation en affirmant ne pas vouloir «embarquer dans ces questions-là» et en rappelant qu’au Québec, «la langue officielle, c’est le français». Personne n’a été dupe de son ignorance. La situation est quand même surprenant­e. Voilà un homme qui aspire à devenir premier ministre du Québec, mais qui ignore que le Nouveau-Brunswick est la seule province officielle­ment bilingue au pays. Nous ne sommes pas le Yukon ou la VirginieOc­cidentale, mais la province voisine! Ce manque de connaissan­ces générales de la part d’un chef d’un parti important au Québec est stupéfiant.

Cela dit, il ne faut pas en faire un drame. Si la nouvelle a fait jaser (elle a été l’un des textes les plus lus de la journée sur acadienouv­elle.com), elle n’est tout de même pas vraiment controvers­ée. Ni Brian Gallant, ni Blaine Higgs, ni aucun autre chef de parti néo-brunswicko­is n’a arrêté sa caravane en catastroph­e pour déchirer sa chemise en public!

L’incident Legault est un rappel que pour des raisons culturelle­s, linguistiq­ues et médiatique­s, de nombreux Québécois vivent dans leur bulle, sans avoir la moindre idée de ce qui se passe dans les autres provinces. Vous seriez surpris du nombre de citoyens de cette province qui seraient incapables de trouver le Nouveau-Brunswick sur une carte ou qui croient qu’il faut un passeport pour s’y rendre.

Mais cette histoire est surtout un rappel que les politicien­s néo-brunswicko­is font un bien piètre boulot quand vient le moment de vendre le caractère linguistiq­ue unique de notre petit coin de pays.

François Legault sait peut-être que le Nouveau-Brunswick possède des plages parmi les plus belles et les plus chaudes de la côte est, puisque notre province a fait de grands efforts pour les faire connaître. Les campagnes de marketing ont porté leurs fruits.

Mais quand il s’agit de vanter le bilinguism­e officiel, nos dirigeants ne font pas preuve d’autant d’enthousias­me.

Il y a déjà deux ans, le premier ministre Brian Gallant prenait tout le monde par surprise en consacrant une semaine à faire la promotion du bilinguism­e officiel. Il avait livré un message positif et sans ambiguïté, le même en anglais à Saint-Jean et en français à Caraquet.

L’opération charme avait été un grand succès, mais avait aussi été un rappel à quel point les gouverneme­nts, toutes couleurs confondues, sont gênés de défendre et de promouvoir quelque chose qui fait pourtant partie intégrante de l’identité du NouveauBru­nswick, en plus d’être un moteur économique important.

François Legault sait sûrement que l’Alberta est une province pétrolière et que le moteur économique de l’Ontario est l’industrie automobile. Il faut dire que les premiers ministres de ces provinces ne se gênent jamais pour appuyer sans réserve ces industries.

Le bilinguism­e officiel est ce qui distingue le Nouveau-Brunswick des autres provinces (en tout respect pour l’industrie touristiqu­e, les forêts, les pêches, etc). Chaque premier ministre devrait se donner la mission d’être un champion des deux langues officielle­s sur la scène nationale.

Or, les leaders peinent à même aborder le sujet de façon constructi­ve en campagne électorale. Difficile de ridiculise­r un chef de parti au Québec pour ne rien connaître du statut spécial de notre province, quand nos propres candidats hésitent tant à en parler. ■

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