Searching: un suspense comme il ne s’en fait pas assez
Un film n’a pas besoin de coûter des millions de dollars à produire pour être efficace. Il suffit souvent d’un peu d’imagination, d’un scénario intelligent et d’un duo de bons comédiens pour éblouir autant, sinon plus, qu’un film à grand déploiement. Le magistral Searching en est la dernière preuve en date.
En salle aux États-Unis depuis trois semaines, le premier long métrage du réalisateur indien Aneesh Chaganty - qui cosigne également le scénario - est devenu un véritable phénomène.
Si le bouche-à-oreille tarde à faire son oeuvre (Searching a engrangé des revenus en salles inférieurs à 21 millions $ en Amérique du Nord), les critiques, eux, raffolent.
Et avec raison. En plus d’être drôlement bien ficelée et de regorger de surprises, l’oeuvre innove en étant entièrement présentée dans la lentille de médiums qui nous sont de plus en plus familiers comme Skype, FaceTime, Youtube et YouCast.
Imaginez un peu l’ambiance et l’intelligence de Gone Girl (2014), mais filmé comme un épisode de Paranormal Activity (2007).
Oubliez les coûteuses caméras, les compliqués plans chorégraphiés, les éclairages sophistiqués et les effets spéciaux.
Searching est plutôt un enchaînement de petites fenêtres d’ordinateur, dans lesquelles ont voit des têtes de personnages cadrées serrées. Un peu comme quand vous participez à une vidéoconférence avec votre maman ou un ami.
Et ça marche!
Il faut dire que le concept n’est pas totalement inédit.
En 2015, les créateurs de la populaire série Modern Family nous avaient offert l’excellent épisode Connection Lost.
Dans ce 16e chapitre de la sixième saison, le personnage de Claire prenait des nouvelles du reste de la famille par le biais des applications de son ordinateur, que ce soit par texte ou par vidéo.
Searching reprend ici le même concept, mais à la puissance 10. Qui aurait crû qu’une succession d’écrans d’ordinateurs puisse être aussi captivante?
OÙ EST MARGOT?
Père seul depuis la mort de sa femme, il y a deux ans, David Kim (John Cho) fait de son mieux pour prendre soin de sa fille Margot (Michelle La), âgée de 16 ans.
Un matin, David réalise que Margot n’a pas couché à la maison, ce qui n’est pas dans ses habitudes. Plus le temps passe et plus l’angoisse le ronge.
Il décide donc de contacter la police. Pendant que la détective Vick (Debra Messing) se charge d’enquêter sur le terrain, David commence à fouiller dans la vie virtuelle de sa fille en épluchant le contenu de son ordinateur.
Virements bancaires, clavardage avec des inconnus et courriels énigmatiques... David se rend compte que sa fille mène une vie dont il connaît bien peu de choses.
Le pauvre David n’est pourtant pas au bout de ses surprises...
BRILLANT
Il y a de ces films qui nous éblouissent par leur capacité à nous faire croire une chose pendant 90 minutes, pour ensuite nous adresser un joyeux pied de nez en nous faisant réaliser que nous avions tout faux depuis le début.
On peut penser à Gone Girl, Usual Suspects (2005), Gone Baby Gone (2005) ou Shutter Island (2010), pour ne nommer que ceux-là.
À mon humble avis, Searching est aussi brillant que ces quatre films cultes.
Chaganty referme tranquillement et délicatement son piège. Et dans les 15 dernières minutes, quand les révélations surprises se succèdent, on ne peut que s’émerveiller devant l’adresse avec laquelle il nous a menés en bateau.
Le réalisateur est aidé par de brillantes performances de Cho et Messing, deux vétérans qui interprètent des rôles qui leur sont un peu atypiques.
ORIGINAL
Si l’histoire est bien racontée, la marque de commerce du film demeure l’originalité des prises de vue.
Presque tout le long du film, on a l’impression d’être derrière un ordinateur. Il est un peu déconcertant au début de voir les fenêtres de navigateurs et d’applications se succéder sans qu’on les contrôle, mais on s’y fait rapidement.
Et plus le film avance, plus on se demande si Chaganty sera en mesure de réaliser l’exploit de raconter son histoire avec toutes les caméras inimaginables, sauf la bonne vieille 9 mm.
La manoeuvre est si bien réussie que, devant son faible coût, il est à peu près certain qu’elle va être imitée encore et encore au cours des prochaines années.
En plus de nous faire jongler sur ce qui a bien pu arriver à Margot et sur l’avenir visuel du cinéma, Searching nous fait également réfléchir sur notre empreinte numérique.
On réalise que tout ce que nous faisons en ligne, ou presque, est aujourd’hui enregistré, catalogué et archivé. Et que le siège devant un écran d’ordinateur n’est pas un endroit aussi douillet et sécuritaire qu’on pourrait le croire...
Envie d’une expérience originale empreinte de mystère? Searching est pour vous. ■