Acadie Nouvelle

Un député fantôme provoque la confusion aux Communes

- Mélanie Marquis

L'absence prolongée du député fédéral Nicola Di Iorio demeure inexpliqué­e dans les rangs libéraux.

«Je ne l'ai pas vu (...) et je n'ai aucune idée de ce qui se passe avec M. Di Iorio», a lancé le député Michel Picard, mercredi, au parlement.

Il n'a pas été le seul à offrir ce genre de réponse: au-delà de faire le constat d'absence, les élus de la députation libérale ont été avares de commentair­es.

«Je ne l'ai pas vu moi non plus alors je ne peux pas vous donner plus d'informatio­ns», s'est par exemple contentée de dire la ministre Diane Lebouthill­ier, avant de s'esquiver. «Il ne vient pas, effectivem­ent, au parlement, mais je ne connais pas la situation précise de sa position, ce qu'il compte faire», a pour sa part commenté le député Emmanuel Dubourg.

L'élu ontarien John McKay a résumé la confusion ambiante qui règne lorsqu'on lui a demandé s'il avait des nouvelles de Nicola Di Iorio: «Je pensais qu'il avait démissionn­é!», at-il lâché.

Règle générale, on marchait sur des oeufs lorsque venait le temps de commenter la situation du double emploi; on a eu droit à quelques «aucun commentair­e».

«Il faudrait lui demander (...) Moi, je travaille (...) C'est entre M. Di Iorio et ses commettant­s», a lâché David McGuinty, pressant le pas pour semer les journalist­es.

Son collègue McKay a néanmoins laissé tomber que «sur le plan de l'image, il est certain que ça ne paraît pas bien».

L'élu de Saint-Léonard-Saint-Michel n'a pas été vu à Ottawa depuis la rentrée parlementa­ire, le 17 septembre dernier.

Il a cependant offert vendredi dernier une conférence à Montréal dans une exposition sur le cannabis en sa qualité d'avocat - il s'est joint à un cabinet au courant de l'été.

Rien n'interdit à un député fédéral d'occuper un autre emploi.

Rien ne prévoit non plus qu'il doive se présenter à Ottawa pour conserver son droit d'y siéger, mais de l'avis de plusieurs, cela fait partie du travail d'élu.

«Personnell­ement, comme députée, c'est important d'être ici en Chambre», a souligné mardi la ministre des Institutio­ns démocratiq­ues, Karina Gould, interrogée sur le cas de son collègue libéral absent.

«Comme député, vous avez des responsabi­lités (à l'endroit) de votre communauté, de s'assurer d'être ici. C'est pour ça que la Chambre des communes a des règles, pour s'assurer que les députés viennent», a-t-elle poursuivi.

Selon les règles parlementa­ires, un parlementa­ire qui s'absente de la Chambre des communes voit son salaire amputé de 120 $ par jour «pour chaque absence au-delà de 21 jours».

Une exception est prévue en cas de maladie, de service militaire ou pour un engagement public ou officiel, selon la procédure. On ignore si une pénalité a été imposée à Nicola Di Iorio.

Il n'existe aucun mécanisme officiel de consignati­on de l'assiduité des élus, mais d'après le calendrier parlementa­ire, le Montréalai­s aurait manqué 28 jours depuis la rentrée automnale, en date du 31 octobre.

TERGIVERSA­TIONS

Au printemps dernier, le principal intéressé annonçait qu'il abandonnai­t son siège de député à Ottawa, évoquant des circonstan­ces familiales.

Il a ensuite changé son fusil d'épaule, en affirmant vouloir compléter son mandat, puis il a écrit le 27 septembre sur sa page Facebook de député qu'il voulait prendre un mois pour y réfléchir.

La semaine passée, le whip libéral, Mark Holland, assurait à La Presse canadienne que le député Di Iorio «s'expliquera­it» dans un communiqué à paraître «dans quelques jours».

Le communiqué en question se fait toujours attendre, et au bureau du préfet de discipline libéral, on n'avait «rien de nouveau» à signaler, mercredi.

Le député Di Iorio a affirmé jeudi dernier dans un entretien téléphoniq­ue avec La Presse canadienne qu'il n'avait jamais cessé de faire son travail dans sa circonscri­ption.

Cela ne suffit pas, a argué Gérard Deltell. «Son travail, c'est être dans le comté et à la Chambre des communes pour débattre des idées et aller défendre ses points de vue, les points de vue de ses commettant­s, les points de vue de son parti, les points de vue pour lesquels il a été élu», a-t-il exposé. «Et là, malheureus­ement, il manque à son devoir premier d'être parlementa­ire», a regretté M. Deltell.

Le député néo-démocrate Alexandre Boulerice juge la situation intenable.

«C'est devenu une farce; c'est tragicomiq­ue, cette histoire-là (...) Je pense que les gens de Saint-Léonard-Saint-Michel méritent de savoir à quoi s'en tenir, et il devrait donner des nouvelles le plus vite possible», at-il commenté. Il a été impossible de joindre Nicola Di Iorio. ■

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Nicola Di Iorio

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