Acadie Nouvelle

Kathleen Lapierre a tracé une voie pour les femmes dans l’armée

- Patrick Lacelle patrick.lacelle@acadienouv­elle.com

Kathleen Lapierre n’est pas très grande. Elle ne faisait pas les cinq pieds réglementa­ires pour entrer dans les Forces armées canadienne­s il y a 33 ans. Ça ne l’a pas arrêtée. L’Acadienne a ouvert plusieurs portes pour les femmes dans l’armée.

«D’abord, j’ai été refusée. Puisque je n’acceptais pas non comme réponse, j’ai demandé à ce que ce soit envoyé plus haut. Le recruteur a envoyé une lettre à Ottawa et ils ont décidé qu’ils allaient m’essayer», a confié l’adjudantec­hef à la retraite.

Sa grandeur lui a posé quelques défis, mais rien qu’elle ne pouvait surmonter. L’entraîneme­nt a été difficile, avoue-t-elle. «La seule difficulté que j’ai eue, c’est avec la carabine parce que mes bras n’étaient pas assez longs. Ça n’avait rien à faire avec la grandeur. Je me suis adaptée. Je mettais alors la carabine par-dessus mon épaule. Donc, j’avais toujours un gros bleu sur la joue et non pas sur mon épaule. J’ai réussi quand même.»

«J’ai toujours été une personne très déterminée», ajoute-t-elle en souriant.

En fait, être courte n’était pas le plus grand défi qui l’attendait dans l’armée. Être une femme lui a causé plusieurs complicati­ons.

«Les femmes n’étaient pas bien regardées. Il y a beaucoup de personnes qui ne voulaient pas d’une femme dans leur unité. J’ai donc ouvert bien des portes pour les personnes qui ne sont pas grandes et les femmes», dit-elle.

Une femme francophon­e de surcroît dans un monde masculin et anglodomin­ant en 1981 sur une base militaire en Alberta, ce n’était pas de tout repos.

«J’ai été la première femme qui a été mutée à l’école de combat à la base de Wainwright. Les premières paroles qui m’ont été dites étaient: «On t’accepte, mais on ne voulait pas t’accepter. You’ll have to prove yourself»», raconte Mme Lapierre.

Sept ans plus tard, elle avait réussi à passer outre les préjugés. Si bien que ses collègues ne voulaient plus la voir partir.

«Ils pleuraient quand je suis partie.»

«C’EST UN SOLDAT»

Puis est venu son cadeau de Noël en 1998, une mission en Bosnie où elle avait sous sa responsabi­lité des hommes de partout dans le monde.

«Les femmes n’étaient pas très bien reconnues parce qu’on travaillai­t avec 32 différente­s nations. J’étais une femme en position d’autorité. J’étais adjudant-maître et j’étais responsabl­e de beaucoup d’hommes de plusieurs différents pays. Ottawa ne voulait pas m’envoyer parce qu’ils pensaient que j’allais avoir de la difficulté parce que je suis une femme. Mon officier leur a répondu: ‘‘Voyons ce n’est pas une femme, c’est un soldat’’», s’exclame Mme Lapierre.

À son retour elle a été nommée adjudantch­ef et a reçu une médaille de mérite militaire du lieutenant-gouverneur de l’époque, Roméo Leblanc.

À Ottawa, elle a ensuite travaillé à changer la culture militaire de l’intérieur. Elle a sensibilis­é les troupes sur la diversité culturelle et sexuelle ainsi que sur les genres.

«C’est certain qu’il y a toujours du travail à faire parce que tu ne changes pas une personne d’une journée à l’autre. Il y a donc eu beaucoup de changement depuis que j’ai joint les forces, mais d’après moi il y a encore du travail à faire», reconnaît-elle.

POURSUIVRE LE TRAVAIL

Pour l’Acadienne, il est toujours primordial de reconnaîtr­e les gens qui ont servi leur pays et ceux qui sont toujours à son service le jour du Souvenir.

«C’est touchant et il ne faut jamais oublier ce qu’ils ont fait et ce qu’ils continuent à faire. Ceux qui portent l’uniforme aujourd’hui au service de notre pays, il faut aussi les reconnaîtr­e parce que ce sont eux qui continuent le travail qui a commencé en 1914. On ne doit jamais oublier que notre liberté leur est due.» ■

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La vétérante dieppoise Kathleen Lapierre. - Acadie Nouvelle: Patrick Lacelle

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