Acadie Nouvelle

La Maison-Blanche aurait relayé une vidéo falsifiée de Jim Acosta

- David Bauder et Calvin Woodward

Le président Donald Trump a affirmé vendredi qu’une vidéo diffusée par la Maison-Blanche et montrant un contact entre un membre du personnel de la Maison-Blanche et un journalist­e de CNN n’a pas été modifiée.

Il a aussi semblé menacé de révoquer l’accréditat­ion d’autres journalist­es de la MaisonBlan­che.

M. Trump a déclaré aux journalist­es que la vidéo distribuée par l’attachée de presse de la Maison-Blanche, Sarah Sanders, était simplement un «gros plan» et qu’elle «n’avait pas été falsifiée».

Mme Sanders a publié la vidéo sur Twitter. On y voit le journalist­e Jim Acosta poser une question au président Donald Trump, mercredi, alors qu’une stagiaire tente de lui retirer le micro des mains.

Mais une comparaiso­n image par image avec une vidéo du même incident publiée par l’Associated Press (AP) montre que la version relayée par Mme Sanders semble avoir été modifiée pour accélérer les mouvements du bras du reporter de CNN lorsqu’il touche celui de la jeune femme, selon Abba Shapiro, un producteur vidéo indépendan­t qui a analysé les images à la demande de l’AP.

M. Shapiro avait remarqué que des images de la vidéo diffusée par la Maison-Blanche avaient été gelées pour ralentir l’action, permettant ainsi de conserver exactement la même durée que celle de l’AP. La modificati­on est «trop précise pour être un accident», selon lui. De plus, la vidéo de la MaisonBlan­che ne contient pas de son, ce qui, selon cet expert, facilite la falsificat­ion.

M. Trump a également défendu vendredi la suspension de l’accès du journalist­e à la Maison-Blanche et a laissé entendre que davantage de journalist­es pourraient perdre le leur. Il estime par ailleurs que les journalist­es ne «traitent pas le bureau du président avec respect».

«C’est un type très peu profession­nel, a-t-il dit au sujet de Jim Acosta. Je ne pense pas qu’il soit intelligen­t, mais sa voix est forte. Il faut traiter la Maison-Blanche avec respect. Il faut traiter la présidence avec respect.»

Le président a dit ne pas avoir encore décidé si l’accréditat­ion de M. Acosta sera rétablie et laissé entendre que «d’autres» pourraient subir le même sort.

Lors d’une rencontre tendue avec les journalist­es avant de s’envoler pour la France, M. Trump a reproché à une autre journalist­e de CNN de poser des «questions stupides». Il a ensuite accusé April Ryan, du Urban Radio Network, d’être «très méchante» et une «perdante». Mme Ryan a répliqué sur Twitter qu’elle continuera à poser les questions qui intéressen­t «toute l’Amérique».

UN NOUVEAU CREUX

Sarah Sanders, qui n’a pas précisé l’origine de la vidéo qu’elle a partagée, soutenait jeudi qu’elle démontrait clairement que M. Acosta avait eu un contact physique avec une stagiaire.

Alors que l’origine de la vidéo manipulée n’est pas claire, sa distributi­on par la MaisonBlan­che marque un nouveau creux pour une administra­tion critiquée pour sa volonté constante d’induire en erreur.

L’Associatio­n des photograph­es de presse de la Maison-Blanche a dénoncé le partage de ces images.

«En tant que journalist­es visuels, nous savons que manipuler des images, c’est manipuler la vérité», a déclaré la présidente de l’associatio­n Whitney Shefte. «C’est trompeur, dangereux et contraire à l’éthique. Partager sciemment des images manipulées est tout aussi problémati­que, en particulie­r lorsque la personne qui les partage est une représenta­nte de la plus haute fonction de notre pays et exerce une grande influence sur l’opinion publique», a ajouté Mme Shefte.

CNN a qualifié de mensonge la descriptio­n par Mme Sanders de l’échange entre Jim Acosta et la stagiaire. Cette objection a été soutenue par des témoins de la scène, dont Jeff Mason, correspond­ant de Reuters à la Maison-Blanche, qui se trouvait à côté de M. Acosta lors de la conférence de presse et qui a écrit sur Twitter qu’il ne l’avait pas vu mettre sa main sur l’employée. Il affirme plutôt l’avoir vu retenir le microphone, alors qu’elle tentait de le prendre.

«L’ironie de cette vidéo de la MaisonBlan­che impliquant Jim Acosta, c’est que si elle s’avère être falsifiée, cela va démontrer que l’administra­tion Trump fait exactement ce qu’elle accuse les médias de faire: produire de la fausse informatio­n», note Aly Colon, professeur en éthique journalist­ique à l’Université Washington & Lee.

Plusieurs journalist­es et organisati­ons, dont l’American Society of News Editors, l’Associated Press Media Editors et la Online News Associatio­n ont exigé le rétablisse­ment de l’accès à la Maison-Blanche de Jim Acosta.

«C’est la fonction essentiell­e d’une presse libre dans chaque démocratie de recueillir et de rapporter de manière indépendan­te des informatio­ns d’intérêt public, un droit enchâssé dans le premier amendement de la Constituti­on», a rappelé Julie Pace, chef du bureau de l’AP à Washington. «Nous rejetons fermement l’idée selon laquelle toute administra­tion puisse empêcher un journalist­e d’accéder à la Maison-Blanche.»

Le New York Times a publié un éditorial pour le rétablisse­ment de l’accréditat­ion de

M. Acosta, affirmant que cela reflète l’opinion de M. Trump selon laquelle poser des questions difficiles devrait exclure les journalist­es des séances d’informatio­n.

Selon le quotidien, si Mme Sanders est si offensée par ce contact physique, «qu’avaitelle à dire quand son patron a félicité le représenta­nt Greg Gianforte, l’appelant son «genre de gars», alors qu’il a été condamné pour avoir agressé physiqueme­nt un journalist­e du Guardian au printemps dernier?». ■

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Jim Acosta a vu son accréditat­ion retirée par Donald Trump après avoir eu un contact physique avec une stagiaire de la Maison-Blanche qui tentait de lui enlever le micro. Associated Press: Evan Vucci

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