Acadie Nouvelle

Euthanasie: une médecin néerlandai­se sera poursuivie

- Maria Cheng et Mike Corder

La médecin d’une résidence pour personnes âgées des Pays-Bas qui a euthanasié une dame âgée atteinte de démence devra répondre de ses gestes devant la justice.

Il s’agit des premières accusation­s déposées contre un médecin depuis que les PaysBas ont légalisé l’euthanasie en 2002.

Les procureurs néerlandai­s ont expliqué par voie de communiqué, vendredi, que la médecin «n’a pas agi prudemment» et qu’elle a «franchi une ligne» en procédant à cette euthanasie.

L’enquête a débuté en septembre, quand des responsabl­es ont découvert que la médecin avait tout d’abord drogué le café de la dame et qu’elle l’avait maîtrisée au moment d’administre­r l’injection létale.

La médecin a répliqué qu’elle ne faisait que respecter une demande écrite formulée il y a plusieurs années par la patiente. Puisque celle-ci n’était plus compétente, at-elle ajouté, ce qu’elle disait pendant l’euthanasie n’avait aucune importance.

Les procureurs néerlandai­s estiment que la requête écrite était «nébuleuse et contradict­oire».

«Dans son testament biologique, la femme écrivait qu’elle souhaitait être euthanasié­e ‘‘quand je jugerai que le moment est venu’’. Mais quand la résidence lui a demandé à plusieurs reprises si elle voulait mourir, elle a répondu, ‘‘pas encore, ce n’est pas encore si terrible’’», selon un rapport publié précédemme­nt par un comité néerlandai­s d’examen des euthanasie­s.

«Même si la patiente avait dit à ce moment, ‘‘je ne veux pas mourir’’, la médecin aurait continué», ajoute le comité, en évoquant le témoignage de la médecin.

Les procureurs ont estimé vendredi que la médecin aurait dû vérifier auprès de la patiente si elle voulait mourir et «le fait qu’elle ait été démente n’y change rien».

Un expert de l’Université d’Amsterdam, Johan Legemaate, a expliqué que «la déclaratio­n du patient doit être suffisamme­nt claire (...) pour que les médecins sachent à quel moment pratiquer l’euthanasie».

«Mais est-ce que ça inclut une situation où les médecins droguent secrètemen­t les patients?, a-t-il demandé. La justice doit maintenant décider si ce médecin a respecté les limites nécessaire­s.»

M. Legemaate a dit que les cas d’euthanasie de patients atteints de démence sévère sont rares, mais que la décision de poursuivre cette médecin pourrait inciter les autres à être plus prudents.

Le président de la Fédération néerlandai­se des médecins, Rene Heman, a souligné la transparen­ce dont a fait preuve la médecin dans cette affaire. Il a rappelé que l’euthanasie de tels patients demeure très controvers­ée.

Les Pays-Bas comptent parmi les cinq pays où les médecins peuvent aider leurs patients à mourir. Seulement deux, les PaysBas et la Belgique, accordent ce droit aux gens atteints d’une maladie mentale. En cas de démence sévère, l’euthanasie est possible si le patient a consigné par écrit les conditions en vertu desquelles il souhaite mourir et si d’autres critères sont respectés, par exemple si un médecin confirme que les souffrance­s sont insupporta­bles et qu’il n’y a aucune chance d’améliorati­on.

Plus tôt ce mois-ci, des amis d’Audrey Parker, une Canadienne qui militait en faveur de l’euthanasie, ont dit qu’elle a été contrainte de mettre fin à ses jours «prématurém­ent» parce que la loi accorde le droit de mourir uniquement aux gens qui sont compétents mentalemen­t. Le Canada a légalisé l’euthanasie en 2016.

Une organisati­on pro-euthanasie lancera sous peu une campagne pour modifier la loi canadienne.

Les procureurs néerlandai­s se penchent sur des enquêtes criminelle­s concernant deux autres euthanasie­s discutable­s. Deux autres dossiers ont récemment été abandonnés. ■

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Les Pays-Bas comptent parmi les cinq pays où les médecins peuvent aider leurs patients à mourir. - Archives

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