The Grinch: Noël à la puissance dix
L’Halloween est chose du passé depuis à peine dix jours, mais déjà, la grosse machine commerciale nous rappelle que Noël est à nos portes. Ce qui est vrai pour les chaînes de magasins à grande surface vaut aussi pour le cinéma alors que The Grinch (en salle depuis vendredi) nous arrive, dégoulinant de musique festive, de décorations étincelantes et de cadeaux éblouissants, six bonnes semaines et demi avant le 25 décembre.
Pour la deuxième fois en 18 ans, le Grincheux débarque sur nos écrans. Oubliez les grimaces de Jim Carrey; cette fois, les aventures du bourru personnage sont racontées en animation.
Le film s’adresse principalement aux enfants et est une adaptation presque mot pour mot du classique créé en 1957 par Dr Seuss.
L’histoire, vous la connaissez sûrement - elle a après tout été adaptée à Broadway et au grand écran dans au moins quatre films différents.
C’est celle des habitants de Whoville, de joyeux personnages qui s’apprêtent à fêter Noël dans une allégresse et une exubérance encore jamais vue. Sapin gigantesque, orgie de lumières - à vous en donner une crise d’épilepsie - et montagne de nourriture… tout y est.
Tous trépignent d’impatience dans l’attente du grand jour. Tous sauf le Grincheux, un personnage qui vit avec son chien, isolé dans une grotte.
Le Grincheux ignore d’où lui vient son aversion pour Noël. Ce qu’il sait, c’est qu’il ne peut pas blairer cette fête. Et encore moins ceux qui la célèbrent.
Incapable de supporter l’excitation des citoyens de Whoville, le triste sire met au point un plan machiavélique: la nuit du 24 décembre, déguisé en père Noël, il compte subtiliser tous les cadeaux et toutes les décorations de toutes les résidences du village.
En gros, il veut voler Noël.
C’est toutefois sans compter sur la détermination d’une petite fille qui tient absolument à rencontrer le père Noël afin de lui faire une demande bien spéciale…
ORGIE DE NOËL
La beauté du cinéma d’animation, c’est qu’il permet de dépasser les limites imposées par les effets spéciaux du cinéma conventionnel. Les dessins animés offrent donc à leurs auteurs une liberté à laquelle les scénaristes de films à grand déploiement ne peuvent que rêver.
En ce sens, The Grinch est une immense réussite. Personne ne pourra jamais reprocher à ses créateurs d’avoir manqué d’imagination. Des décorations de Noël jusqu’aux moyens de transport en passant par l’équipement du Grincheux... à peu près tous les éléments du film regorgent d’originalité.
Si, à l’instar du bourru Grincheux, vous détestez Noël, ce film n’est pas pour vous. Le caractère festif de l’oeuvre est si démesuré qu’on a l’impression de se retrouver dans le village d’un père Noël qui aurait fait une triple surdose de Prozac!
L’intelligence et la richesse de la facture visuelle valent à elle seules le prix d’entrée et font qu’on ne s’ennuie pas une seule minute.
PRÉVISIBLE
Si le film se démarque par son originalité, son scénario, lui, est un tantinet décevant.
Il est un peu triste de constater que la version 2018 du Grinch s’éloigne très peu de l’histoire originale et de ses nombreuses adaptations. Il n’aurait pas fait de tort, il me semble, d’actualiser un tout petit peu ce récit écrit il y a déjà plus de 60 ans. Un manque d’audace qui détonne avec tous les efforts qui ont été mis pour créer un monde et des décors d’une très bienvenue extravagance.
Le film n’en est donc que plus prévisible - même ceux qui n’ont jamais entendu parler du Dr Seuss vont deviner bien avant le temps la façon dont les 30 dernières minutes vont se dérouler.
The Grinch aurait aussi pu être plus subtil. Je comprends qu’il s’adresse d’abord à des enfants, mais il y a une limite à prendre son public par la main sans jamais lui donner la chance d’avoir recours à son imagination.
Heureusement, plusieurs gags touchent leur cible, dont certains qui vont plaire autant aux petits qu’aux grands (mon favori: le renne qui mange de la crème fouettée!).
De toujours, on évalue les films d’animation pour leur propension à aller plus loin que de simplement raconter une histoire. Les meilleurs sont ceux qui en parviennent inculquer une belle leçon de vie aux enfants tout en les divertissant.
Les 85 premières minutes de The Grinch sont du bonbon pour les yeux, mais apportent fort peu d’éléments de réflexion. C’est dans les cinq dernières minutes que le film se transforme en fable sur le véritable sens de Noël et sur le fait que la gentillesse et l’amour valent beaucoup plus que n’importe quel cadeau.
Morale banale s’il en est une, mais, en ces temps où le racisme et l’intolérance sont plus que jamais d’actualité, qu’il n’est jamais mauvais de répéter. ■