La pleine municipalisation n’est pas le remède miracle aux problèmes du N.-B.
Même si elle est nécessaire, la pleine municipalisation du NouveauBrunswick n’éliminera pas, d’un coup de baguette magique, les problèmes structurels actuels que vit la province, croit Magella Simard.
En réaction à notre dossier sur les 10 ans du rapport Finn, publié mardi, le professeur d’histoire et de géographie spécialisé en développement régional à l’Université de Moncton a proposé une analyse plus nuancée.
Le rapport de Jean-Guy Finn publié en 2008 a, entre autres, proposé la création de 53 municipalités, la disparition des districts de services locaux et la mise en place de 12 districts régionaux de services, connus aujourd’hui comme étant les commissions de services régionaux.
Selon M. Simard, la dispersion de la population, le caractère rural de la province, la faiblesse de l’armature urbaine, l’éloignement des localités par rapport aux villes, la migration NordSud, la dualité linguistique, la décroissance démographique et une économie tournée vers la mise en valeur de la première transformation des ressources ne disparaîtront pas instantanément avec une réforme majeure de la gouvernance locale.
«Cela ne permettra pas non plus de résoudre les carences en matière de gouvernance et de concertation qui persistent au sein de certaines municipalités. Au contraire, elle risque même de les accroître, comme ce fut le cas notamment au Québec», craint le spécialiste dans un courriel acheminé au journal.
À l’aube des années 2000, le gouvernement du Québec avait adopté une réforme de l’organisation territoriale municipale. Ces fusions forcées, auxquelles ont dû adhérer une centaine de municipalités, avaient provoqué de vives tensions entre les résidents et les élus municipaux des anciennes et des nouvelles entités. Le gouvernement a ensuite été obligé d’autoriser les villes qui le souhaitaient à entamer un processus de défusion.
M. Simard donne aussi l’exemple des résidents de la communauté de Saint-Basile, qui n’ont jamais accepté la fusion avec la ville d’Edmundston et qui ont tenté à plusieurs reprises de se défusionner.
Selon l’analyse de l’enseignant, une municipalisation efficace et réussie doit s’inscrire dans le cadre d’une stratégie d’aménagement du territoire beaucoup plus vaste. Cette solution appelle à des interventions urgentes sur le plan démographique et de la restructuration de l’espace compte tenu de la géographie particulière de la province, pense-t-il. Il faut aussi créer des petits pôles de services qui permettront d’atténuer les effets liés au dépeuplement qui affectent le nord de la province, prétend-il.
«L’élaboration d’ententes intermunicipales de services, une décentralisation de certains pouvoirs en matière de développement économique vers les CSR, un meilleur contrôle des courants migratoires et la stimulation de l’immigration devraient aussi faire partie de cette stratégie», assume M. Simard.
Le professeur voit la municipalisation du Nouveau-Brunswick comme un outil de développement régional et non une condition favorisant son émergence.
«De nombreuses localités de la province font preuve de dynamisme, d’innovation et de créativité, rappelle-t-il. C’est le cas notamment de Lamèque, de Cocagne, de Rogersville et de plusieurs autres localités qui se donnent les moyens et les outils nécessaires afin de renforcer leur infrastructure de services et d’améliorer la qualité de vie de leurs citoyens.» ■