Acadie Nouvelle

Dans l’ombre: un film nécessaire

- sylvie.mousseau@acadienouv­elle.com @SylvieMous­seau1

Film inventif, Dans l’ombre de Paul Bossé retrace l’histoire de l’Ordre de Jacques-Cartier, surnommé la Patente, de 1933 jusqu’au déclenchem­ent de la Seconde guerre mondiale en 1939. Présenté en première au Festival internatio­nal du cinéma francophon­e en Acadie dans une salle bondée au Cinéplex, ce documentai­re a suscité bien des réflexions et des discussion­s à l’issue de la projection.

Paul Bossé a commencé à travailler à ce documentai­re en 2007. Au départ, il a été séduit par cette idée de société secrète et du grand mythe de la Patente. De plus, aucun film sur l’Ordre de Jacques-Cartier n’avait été réalisé en Acadie. En cours de route, son projet de documentai­re a évolué pour en faire une oeuvre plus globale en dressant des parallèles avec les événements internatio­naux des années 1930, dont la montée du nazisme et du fascisme, qui rappelle à certains égards l’actualité politique d’aujourd’hui. Cette oeuvre importante aurait avantage à être présentée dans les cours d’histoire dans les écoles. Ce qui d’ailleurs a été suggéré par une spectatric­e.

«Quand j’ai vu les liens qui avaient entre le fascisme et l’Ordre de Jacques-Cartier, surtout à Montréal, je me suis dit voilà mon sujet. Tout était lié», a confié en entrevue Paul Bossé, à l’issue de la projection dimanche.

Dans son documentai­re, le cinéaste raconte l’histoire de cette société mystérieus­e qui a vu le jour à Vanier, dans la région d’Ottawa, pour ensuite s’établir au Québec et au Nouveau-Brunswick. Secrète, antidémocr­atique, l’ordre francophon­e et catholique – qui rassemblai­t notamment seulement des hommes de l’élite acadienne – a mené des actions pour le fait français, notamment en éducation. L’objectif était de se défaire du pouvoir anglophone dans toutes les sphères de la société. L’Ordre de JacquesCar­tier été créé pour répondre aux organisati­ons anglophone­s comme les francs-maçons. Le réalisateu­r considère que cette société a certaineme­nt été nécessaire à l’avancement des Acadiens, mais aujourd’hui, établir une organisati­on secrète semblable serait impensable.

Le film du réalisateu­r de Moncton est d’une grande pertinence, surtout quand on regarde ce qui se passe sur la scène politique actuelle, notamment en matière d’immigratio­n. Il se désole de voir une certaine montée du totalitari­sme et du populisme.

«Je sentais la nécessité de faire ce film à cause de ce qui se passe aujourd’hui. On vit dans une période inquiétant­e. On dirait que ce sont les tyrans qui gagnent les élections. C’est pour ça que je conclus le film en disant qu’il faut faire vivre l’intelligen­ce», a commenté le cinéaste, laissant sous-entendre que si les gens utilisaien­t leur intelligen­ce, il y a de fortes chances que certains politicien­s n’auraient pas été élus.

S’il a choisi de couvrir six années (1933 à 1939) de la Patente (le mouvement s’est dissous en 1965), c’est que ces années ont été cruciales dans l’évolution du monde. Rassemblan­t une foule d’images d’archives agrémentée­s d’animations et d’illustrati­ons de Mario Doucette, sur la narration de Paul Bossé et de Philip André Collette, le réalisateu­r arrive à nous faire revivre l’époque de la montée de l’extrême droite qui a atteint les côtes de l’Amérique et les Canadiens français. L’actualité mondiale sert donc de trame de fond à l’histoire de l’Ordre de Jacques-Cartier. Le film suscite aussi une réflexion sur le nationalis­me.

 ??  ?? Le cinéaste Paul Bossé (au centre) et le narrateur du film Dans l’ombre, Philip André Collette, lors de la première au FICFA. – Acadie Nouvelle: Sylvie Mousseau
Le cinéaste Paul Bossé (au centre) et le narrateur du film Dans l’ombre, Philip André Collette, lors de la première au FICFA. – Acadie Nouvelle: Sylvie Mousseau
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