Acadie Nouvelle

Pour réhabilite­r notre mémoire

- Jean-Paul Savoie, vice-président Coopérativ­e des Arcadiens limitée David Le Gallant, président Société internatio­nale Veritas Acadie

Monsieur le premier ministre (Justin Trudeau). Le geste commémorat­if que vous avez posé en Arménie relié au génocide arménien fut grandement apprécié tout comme la reconnaiss­ance générale par le Parlement canadien en 2004 de plusieurs génocides avec la mention de celui des Arméniens.

Ce geste témoigne d’un grand courage politique étant donné le refus du gouverneme­nt de la Turquie, entre autres, d’admettre cette terrible réalité historique.

Nous apprécions particuliè­rement que le gouverneme­nt canadien continuera, selon vos propos, de plaider sur la scène internatio­nale en faveur de la reconnaiss­ance et de la sensibilis­ation au fait que cette reconnaiss­ance constitue une première étape vers la réconcilia­tion et la paix.

Pour ce qui constitue le génocide acadien, il ne se limite pas à une «déportatio­n», mais à tous les critères énoncés par l’ONU dans l’Article II de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (9 décembre 1948), définition qui cadre parfaiteme­nt à ce qui est arrivé aux Acadiens dès 1755 et aux Arméniens particuliè­rement en 1915. Nos deux peuples ont subi une action concertée pour leur anéantisse­ment quoi que le terme qu’on utilise. Pour nous les Acadiens, cette horreur qui dura au moins huit années (1755-1762), fut orchestrée et exécutée par la Couronne britanniqu­e en collusion avec le duc de Cumberland (fils de George II) connu aussi pour le massacre des clans écossais à Culloden neuf ans avant le début du génocide acadien. La loi canadienne par rapport aux crimes contre l’humanité, adoptée en 2000, rejoint celle de l’ONU en définissan­t le génocide:

Fait – acte ou omission – commis dans l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe identifiab­le de personnes».

Puisqu’il n’y eut aucune reconnaiss­ance des torts causés aux Acadiens dans la «Proclamati­on royale canadienne» de 2003; puisque cette proclamati­on n’a vu le jour que grâce à une réunion du Conseil des ministres du gouverneme­nt Chrétien (2 décembre 2003) qui ratifia le texte final qui allait être soumis à la signature de la gouverneur­e générale Adrienne Clarkson, représenta­nt la reine Élisabeth II du chef du Canada et non du Royaume-Uni, il est grand temps que le Parlement du Canada soit impliqué dans une démarche quelconque qui fera référence à la fois aux torts préjudicia­bles et à une action fomentée pour la destructio­n d’un peuple, à savoir le génocide perpétré par les autorités britanniqu­es à l’endroit des Acadiens.

Par conséquent et puisque la majorité des Acadiens sont des citoyens canadiens, ne serait-il pas dans l’ordre des choses, monsieur le premier ministre, que le Parlement canadien reconnaiss­e enfin et officielle­ment le génocide acadien?

Ce besoin de reconnaiss­ance de la vérité historique eu égard au génocide de notre peuple s’apparente à celui d’autres peuples ou groupes ethniques ayant vécu de graves préjudices par le passé, notamment les peuples autochtone­s. Il en va de la réconcilia­tion des peuples. Une telle reconnaiss­ance contribue à éliminer le déficit de justice historique quant aux fautes, aux torts et aux préjudices commis, tout en jetant moins d’ombre trouble sur le présent qui ne cesse de se traduire par une certaine fragilité identitair­e transgénér­ationnelle. Il est à considérer que le peuple acadien subit encore sur bien d’autres plans, les conséquenc­es du génocide dont il fut victime.

Notre Coopérativ­e des Arcadiens limitée sise à Kedgwick, Nouveau-Brunswick, appuyée par la Société internatio­nale Veritas Acadie, cosignatai­re, envisage la constructi­on sur sa propriété à Kedgwick d’un Mémorial au génocide Acadien, mémorial qui servira à reconnaîtr­e la terrible réalité historique que fut ledit génocide acadien à l’intérieur d’un vaste mouvement dans les sociétés contempora­ines qui vise à réhabilite­r la mémoire des victimes. ■

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– Archives Jean-Paul Savoie montre une maquette du monument proposé par la Coopérativ­e des Arcadiens.

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