L’ANNULATION DE L’ÉVÉNEMENT ENVISAGÉE
JEUX DE LA FRANCOPHONIE 2021
Le sort des Jeux de la Francophonie 2021 est plus incertain que jamais. Le gouvernement provincial évoque désormais la possibilité de laisser tomber l’événement.
Mercredi, cinq membres du conseil d’administration des Jeux de la Francophonie de Moncton-Dieppe ont claqué la porte, quelques jours après le début de la controverse entourant la planification de l’événement international.
Le lendemain, le premier ministre a expliqué pour la première fois que l’abandon du projet fait désormais partie des possibilités.
«Nous avons eu des suggestions en ce sens à travers toute la province», a déclaré Blaine Higgs lors d’une mêlée de presse.
Il estime qu’Ottawa doit intervenir en acceptant de payer plus de 50% des frais associés à l’organisation.
«Les Jeux n’auront pas lieu sans que le gouvernement fédéral prenne le relais, dit-il. C’est là où nous en sommes, tout de suite.»
Le comité organisateur des Jeux évalue à 130 millions $ le budget nécessaire à la tenue des Jeux.
PAS PLUS DE 10 MILLIONS $
Plus tôt cette semaine, Dominic LeBlanc, ministre des Affaires intergouvernementales, a indiqué que le gouvernement fédéral assumera la moitié de la facture, quel que soit son montant.
Seulement, le premier ministre Blaine Higgs n’entend pas mordre la ligne qu’il a tracée dans le sable. La province ne mettra pas plus de 10 millions $ sur la table, répète-t-il.
«Notre soumission avait des failles et c’est ce qui nous a mené ici. La situation était connue depuis longtemps. Je veux que ces Jeux soient un succès, mais on ne peut pas jeter l’argent par les fenêtres.»
Le chef du gouvernement suggère même de transformer les Jeux en «un événement national qui serait tenu dans différentes provinces», citant le Québec en exemple.
«Étant donné la situation actuelle et la question des coûts, je pense que l’idée que le Nouveau-Brunswick soit le seul hôte doit être questionnée», déclare-t-il.
Cependant, de telles décisions pourraient se faire à un prix. Selon, les statuts du Comité international des Jeux de la Francophonie, un gouvernement hôte qui se rétracte est responsable de tous les coûts encourus.
«Sauf cas de force majeure, lorsque l’État ou le gouvernement qui a été désigné pour organiser une édition des Jeux décide de ne pas réaliser les Jeux, change la date et/ou le site des Jeux inscrits dans le dossier de candidature, est dans l’incapacité d’accueillir les Jeux ou ne peut respecter les conditions de dates et de sites mentionnés dans le cahier des charges: les dépenses effectuées ou engagées par le CIJF en vue de la tenue des Jeux dans le pays désigné, de même que toute réclamation financière liée à un engagement du CIJF, découlant de l’une des trois raisons citées ci-dessus, sont assumées par cet État ou gouvernement.»
Questionné sur le remplacement des membres démissionnaires, qui ont tous été nommés par le gouvernement Gallant, Blaine Higgs répond qu’il souhaite trouver des individus «qui ont déjà eu un rôle à jouer dans l’organisation d’événements similaires par le passé».
«Ce n’est pas mon intention de nommer des personnes sans connaître leurs qualifications pour faire le travail. Pour le moment, le travail n’a pas été fait et nous essayons de comprendre pourquoi.»
UN TRAVAIL SÉRIEUX
Dans un communiqué publié jeudi soir, les six membres restants du conseil d’administration du Comité organisateur national des Jeux de la Francophonie, proposent de passer en mode solution le plus rapidement possible.
«Nous croyons toujours aux Jeux de la Francophonie et tenons à réitérer notre pleine confiance en l’équipe en place et au travail rigoureux accompli pour développer notre plan d’affaires. Rappelons que ce plan d’affaires a été conçu en tant qu’outil de discussion pour encadrer les négociations financières auprès des bailleurs de fonds», écrivent-ils.
Selon des informations obtenues par RadioCanada, la firme MNP retenue par Ottawa pour analyser le plan d’affaires a conclu que 115,3 millions $ seraient nécessaires pour tenir des Jeux de l’envergure souhaitée par le Comité.
D’autres scénarios permettraient de réduire la facture jusqu’à 72 336 826$ à condition d’abandonner certains projets et peut-être même certaines disciplines sportives.
Ce rapport qualifie le travail mené par le comité de «solide et précis», tout en jugeant «significativement sous-estimé» le budget initial de 19,5 millions $ présenté en 2015.
Les membres du comité souhaitent désormais négocier avec les gouvernements pour «évaluer les différentes options de financement et réductions des coûts afin d’avoir des Jeux qui répondent à la fois aux attentes et aux capacités des bailleurs de fonds, tout en laissant des legs pour la communauté.»
«Le conseil est convaincu qu’il est possible d’y arriver pour que les Jeux réussissent», peut-on lire dans le communiqué.
DOMINIC CARDY: «LES ORGANISATEURS SE SONT REMPLI LES POCHES»
De son côté, Dominic Cardy, le ministre de l’Éducation et du Développement de la petite enfance, a tenu des propos particulièrement virulents à l’égard des organisateurs.
Il va jusqu’à les accuser de s’être enrichis sans faire le travail demandé. «Je crois que les organisateurs se sont rempli les poches en recevant des salaires depuis les fonds publics pour une marchandise qu’ils n’ont pas produite. Les membres sont partis en laissant à la province le soin de réparer les dégâts», lance-t-il.
«Si vous touchez un salaire, ou même un dollar, sans livrer la marchandise, c’est un dollar de trop.»
Dominic Cardy s’attaque au passage au gouvernement Gallant, responsable à ses yeux, d’avoir «caché le gaspillage d’argent».
Il reproche à l’ancien premier ministre de refuser de commenter et de prendre ses responsabilités dans ce dossier. ■
Avec la participation du journaliste Mathieu Roy-Comeau.