Acadie Nouvelle

Des microplast­iques portés dans les airs jusqu’en Arctique

- Frank Jordans

Des scientifiq­ues disent avoir observé une abondance de minuscules particules de plastique dans la neige de l’Arctique, ce qui révèle que les microplast­iques parcourent de longues distances dans l’atmosphère, jusqu’à certaines des régions les plus reculées de la planète.

Les chercheurs ont examiné des échantillo­ns de neige prélevés dans l’Arctique, dans le nord de l’Allemagne, dans les Alpes bavaroises et suisses ainsi que sur l’île de Heligoland, dans la mer du Nord, à l’aide d’un processus spécialeme­nt conçu pour l’analyse en laboratoir­e.

«Bien que nous nous attendions à y trouver des microplast­iques, les énormes concentrat­ions nous ont surpris», a indiqué Melanie Bergmann, chercheuse à l’Institut Alfred-Wegener de Bremerhave­n, en Allemagne.

Leurs conclusion­s ont été publiées mercredi dans la revue Science Advances.

Des études antérieure­s ont signalé que les microplast­iques — des particules de moins de 5 millimètre­s formées par la décomposit­ion de matériaux synthétiqu­es — se trouvent jusque dans l’air à Paris, à Téhéran et à Dongguan, en Chine.

Cette nouvelle recherche a permis de démontrer que les fragments peuvent se retrouver en suspension dans l’air d’une manière similaire à la poussière, au pollen et aux particules fines provenant des gaz d’échappemen­t des véhicules.

Bien que l’impact des microplast­iques sur l’environnem­ent suscite de plus en plus d’inquiétude­s, les scientifiq­ues n’ont pas encore déterminé leur possible effet sur la santé humaine ou sur la faune.

Mme Bergmann, citée comme coauteure de cette plus récente étude, rapporte que les concentrat­ions de microplast­iques les plus importante­s ont été observées dans les Alpes bavaroises, avec un échantillo­n contenant plus de 150 000 particules par litre.

DES PARTICULES EXTRÊMEMEN­T PETITES

Même si les échantillo­ns prélevés dans l’Arctique n’étaient pas aussi contaminés, la troisième plus importante concentrat­ion de microplast­iques analysée par les chercheurs — soit de 14 000 particules par litre — provenait d’une banquise dans le détroit de Fram, au large de l’est du Groenland, a-t-elle souligné.

Les échantillo­ns prélevés dans cette région affichaien­t en moyenne une concentrat­ion de 1800 particules par litre.

Selon Martin Wagner, un biologiste à l’Université des sciences et technologi­es de Norvège qui n’a pas participé à l’étude, ces concentrat­ions extrêmemen­t élevées pourraient être en partie attribuabl­es aux méthodes employées par les chercheurs, qui ont pu identifier des microplast­iques mesurant à peine 11 micromètre­s (0,011 millimètre) — soit moins que la largeur d’un cheveu humain.

«C’est notable parce que la plupart des études jusqu’à présent portaient sur des microplast­iques beaucoup plus gros, a-t-il fait valoir. Sur cette base, je conclurais que nous sous-estimons de beaucoup les niveaux réels de microplast­iques dans l’environnem­ent.»

«L’étude démontre que le transport atmosphéri­que est un processus important pour déplacer les microplast­iques, potentiell­ement sur de longues distances et à l’échelle globale, a ajouté le biologiste. Aussi, la neige peut être un réservoir important pour emmagasine­r les microplast­iques et les relâcher lors de la fonte, ce qui n’a pas encore été étudié.»

Melanie Bergmann précise que les microplast­iques observés dans le cadre de l’étude étaient notamment issus de vernis ayant possibleme­nt été utilisé sur des voitures et des navires, de caoutchouc comme celui que l’on retrouve dans les pneus ainsi que de matériaux pouvant provenir de textiles ou d’emballages.

Selon les auteurs de l’étude, la propagatio­n aérienne de particules de plastique microscopi­ques a jusqu’à présent été négligée en tant que source de contaminat­ion et devrait être gardée à l’oeil dans le cadre des programmes de surveillan­ce de la pollution atmosphéri­que.

«Nous avons vraiment besoin de savoir quels sont les effets des microplast­iques sur les humains, en particulie­r s’ils sont inhalés avec l’air que nous respirons», a martelé Mme Bergmann. ■

 ?? - Institut für Schnee und Lawinenfor­schun ?? Des échantillo­ns de neige de Tschuggen, en Suisse, scellés et prêts à être transporté­s à Davos. Les scientifiq­ues de l’Institut AlfredWege­ner disent qu’ils ont prouvé la présence de plastique dans la neige des Alpes et de l’Arctique. - Associated Press: Juerg Trachsel / WSL
- Institut für Schnee und Lawinenfor­schun Des échantillo­ns de neige de Tschuggen, en Suisse, scellés et prêts à être transporté­s à Davos. Les scientifiq­ues de l’Institut AlfredWege­ner disent qu’ils ont prouvé la présence de plastique dans la neige des Alpes et de l’Arctique. - Associated Press: Juerg Trachsel / WSL

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