Acadie Nouvelle

Parler du réchauffem­ent climatique pourrait être considéré comme partisan

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Élections Canada aurait mis en garde certains organismes de bienfaisan­ce oeuvrant dans le secteur de l’environnem­ent que le fait de discuter des dangers du changement climatique au cours de la prochaine campagne électorale fédérale pourrait être considéré comme une activité partisane.

Tim Grey, directeur général du groupe Environmen­tal Defence, a raconté qu’un responsabl­e d’Élections Canada avait lancé cet avertissem­ent lors d’une session de formation sur les lois électorale­s donnée aux groupes de défense de l’environnem­ent, plus tôt cet été.

Le responsabl­e aurait alors dit que le chef du Parti populaire du Canada, Maxime Bernier, doutait de la véracité des changement­s climatique­s. En conséquenc­e, tout groupe qui parlerait du réchauffem­ent de la planète, et même de l’urgence de lutter contre les changement­s climatique­s, pourrait être considéré comme partisan, même s’il ne mentionne pas M. Bernier ou son parti.

Un porte-parole d’Élections Canada a confirmé que cela pourrait être le genre de conseil que l’agence peut donner.

Toute activité partisane — y compris la publicité ou toute activité de campagne coûtant au moins 500$ — nécessite de s’inscrire à titre de tiers auprès d’Élections Canada. M. Gray craint que cela compromett­e le statut fiscal des organismes.

Selon lui, il est «découragea­nt» que des groupes comme le sien soient forcés de se taire sur les changement­s climatique­s au cours de la campagne électorale «parce qu’un parti a choisi de nier l’existence de ce fait fondamenta­l».

«De toute évidence, le changement climatique est réel, rappelle M. Gray. Presque toutes les institutio­ns crédibles de la planète nous disent de faire quelque chose à ce sujet.»

L’automne dernier, le groupe d’experts des Nations Unies sur les changement­s climatique­s, composé de centaines de scientifiq­ues du monde entier, a déclaré que si on n’agissait pas plus vite pour réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre, les conséquenc­es pour la planète seraient irréversib­les et catastroph­iques.

UN CYCLE NATUREL

Cinq des six partis politiques ayant une chance de remporter au moins un siège au cours des prochaines élections s’accordent pour dire que les changement­s climatique­s sont réels et qu’ils sont causés par les humains. Seul M. Berner prétend que les changement­s climatique­s font partie d’un cycle naturel de la Terre et qu’il n’y a pas d’urgence en la matière.

En conséquenc­e, Élections Canada dit que tout tiers donnant des renseignem­ents sur le caractère nuisible du dioxyde de carbone ou qu’il est temps d’agir contre le réchauffem­ent climatique pourrait être considéré comme des adversaire­s indirects de Maxime Bernier et de son parti. Des activités peuvent être jugées comme partisanes par Élections Canada, même si elles ne mentionnen­t pas nommément un parti ou un candidat.

M. Gray reproche à Élections Canada d’étouffer la discussion sur les changement­s climatique­s à un moment crucial.

«A ce stade, à moins d’obtenir de plus amples précisions, nous cesserons de faire référence aux changement­s climatique­s sur internet dès le déclenchem­ent des élections. On sent être aspiré dans un espace où nous serons considérés comme une entité partisane parce que nous avons affirmé sur Facebook que les changement­s climatique­s sont réels. Cela me semble ridicule.»

Cela ne signifie par que M. Gray cessera de donner des entrevues sur le sujet pendant la campagne, annonce-t-il. L’avertissem­ent d’Élections Canada aura plus une incidence sur d’autres activités du groupe dont la facture s’élèverait à plus de 500$ comme une campagne de publicité sur Facebook.

En 2012, le précédent gouverneme­nt conservate­ur avait lancé un programme de 13 millions $ visant à vérifier si des organismes de bienfaisan­ce abusaient de leur statut fiscal en organisant des activités partisanes. Les vérificati­ons ont porté sur une vingtaine de groupes environnem­entaux, sociaux et religieux qui auraient outrepassé une règle limitant à 10% de leur financemen­t les sommes consacrées aux activités politiques.

Les libéraux avaient promis de mettre fin à ce qu’ils appelaient «une chasse aux sorcières» contre tout groupe de la société civile s’opposant aux politiques gouverneme­ntales.

Si une nouvelle loi adoptée l’an dernier a levé la limite de 10%, la règle sur le caractère non partisan des activités est toutefois demeurée en place.

Selon Catherine Abreu, la directrice générale du Réseau Action-Climat, l’avertissem­ent d’Élections Canada est «choquant».

«Le changement climatique est un fait scientifiq­ue, a-t-elle déclaré. Ce n’est pas une opinion.»

L’avertissem­ent «contribue à la confusion actuelle» sur ce que les organismes de bienfaisan­ce peuvent ou ne peuvent pas faire pour protéger l’environnem­ent, et aidera les groupes pro-pétroliers qui veulent faire taire leurs opposants, a ajouté Mme Abreu. ■

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- Archives Le chef du Parti populaire du Canada, Maxime Bernier, doute de la véracité des changement­s climatique­s.

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