DES ÉLUS INDÉCIS
Le projet de loi sur la vaccination obligatoire des élèves a du plomb dans l’aile. Plusieurs députés se disent très indécis après trois jours de témoignages à majorité contre l’initiative du ministre de l’Éducation.
Bien malin celui qui réussira à prédire l’avenir du projet de loi 39 de Dominic Cardy. Les audiences de cette semaine devant un comité de l’Assemblée législative semblent avoir surtout servi à brouiller les cartes dans l’esprit des élus.
Des députés des quatre partis ont indiqué jeudi ne pas savoir comment voter sur le projet de loi qui vise à éliminer les exemptions non-médicales à la vaccination dans les écoles et les garderies agréées de la province.
«En tant que père, grand-père et législateur, j’ai du mal avec à l’idée de dire à mes voisins et à mes amis ce qu’ils devraient faire avec leurs enfants», a déclaré le député progressiste-conservateur Bruce Northrup.
«Je suis député depuis 13 ans et c’est probablement la chose la plus difficile que j’ai eue à faire. Je ne suis pas convaincu», at-il dit au sujet de l’initiative de son propre gouvernement.
Depuis mardi, les élus ont entendu plusieurs témoignages, dont ceux de l’Association des pharmaciens du Nouveau-Brunswick et du défenseur des enfants et de la jeunesse, qui se sont prononcés pour la vaccination obligatoire.
La majorité des témoins, dont de nombreux parents, étaient toutefois contre le projet de loi 39. Plusieurs d’entre eux étaient affiliés au groupe anti-vaccin Vaccine Choice Canada qui a payé pour faire venir des figures controversées de leur mouvement devant le comité, dont certaines de l’extérieur du Canada.
Même si l’efficacité des vaccins est incontestable d’après Cathy Rogers, la députée libérale est d’avis que les témoignages des opposants à la vaccination ont aussi de la valeur.
«La science est en constante évolution grâce aux nouvelles données et les expériences vécues s’ajoutent à ces nouvelles données scientifiques», a-t-elle dit.
«La recherche n’est pas concluante, je dirais. Il y a de la science des deux côtés. Il y a de plus en plus de recherches sur les blessures causées par les vaccins ou par des composantes des vaccins.»
Mme Rogers n’a pas décidé si elle allait appuyer le projet de loi, tout comme sa collègue Megan Mitton du Parti vert.
«Veiller à ce que les enfants soient vaccinés lorsque c’est possible est la priorité, mais je crains que certains enfants innocents ne soient exclus de l’éducation publique et, par conséquent, de la Santé publique», a-t-elle confié.
Le ministère de la Santé est en train de mettre sur pied un programme pour suivre à la trace le dossier de vaccination de chaque citoyen. Cette initiative ne sera toutefois pas complétée avant l’année prochaine, a souligné la députée écologiste.
«Nous avons les faits sur les vaccins, mais nous n’avons pas tous les faits sur le nombre d’enfants vaccinés au Nouveau-Brunswick. Pour moi, c’est une pièce importante du casse-tête concernant ce projet de loi.»
Les partisans de la vaccination obligatoire affirment qu’il est nécessaire de mettre fin aux exemptions pour des motifs religieux ou de conscience, et ce, afin de protéger les élèves qui ne peuvent pas recevoir de vaccin pour des raisons médicales.
«Décider de se faire vacciner ou pas, c’est un choix, mais les personnes qui sont immunodéprimées (et donc, à risque de contracter des virus) n’ont pas ce choix», a déclaré le directeur général de l’Association des pharmaciens, Paul Branchard.
Le député Rick De Saulniers de l’Alliance des gens n’a pas décidé lui non plus s’il votera pour ou contre le projet de loi 39.
«J’ai entendu beaucoup de statistiques, mais j’ai aussi entendu beaucoup de témoignages empreints de compassion et très honnêtes sur certains des effets que les gens ont subis à cause de la vaccination.»
Au moins un élu a déclaré qu’il appuierait le projet de loi. Le député progressiste-conservateur Glen Savoie a raconté cette semaine qu’il souffrait toujours des séquelles des nombreuses maladies qu’il a contractées quand il était jeune parce que ses parents ne l’avaient pas fait vacciner.
«C’est simple, le but c’est de protéger les gens du Nouveau-Brunswick en assurant que nous avons un taux de vaccination acceptable. Je vais voter pour ce projet de loi», a-t-il commenté.
Son collègue Bruce Northrup espère toutefois que le gouvernement n’imposera pas la discipline de parti à ses députés.
«Ma recommandation serait que tout le monde puisse voter comme il l’entend», a-t-il confié.
Selon Cathy Roger, les députés libéraux n’ont pas encore décidé s’ils voteront en bloc ou chacun pour soi.
Aucun parti ne détient un nombre suffisant de sièges en chambre pour imposer sa volonté à l’Assemblée sans la collaboration d’au moins un autre parti. ■