Le Joker n’est pas un personnage tourmenté, selon Joaquin Phoenix
Joaquin Phoenix cherche ses mots lorsque vient le temps de décrire le Joker, mais il ne souhaite pas le faire.
L’acteur américain a exploré ce rôle pendant huit mois afin de comprendre comme un humoriste nommé Arthur Fleck s’est transformé en un des plus grands ennemis de Batman.
Se préparer en vue du tournage a nécessité une grande perte de poids et l’étude des troubles de la personnalité. Il a également dû s’exercer assidûment à rire.
«C’est difficile à résumer en une phrase», a-t-il dit, samedi, peu avant la première mondiale de Joker à la Mostra de Venise où le film est en lice pour le Lion d’or.
Il doit sortir officiellement sur les grands écrans le 4 octobre.
La perte extrême de poids - plus de 22 kilos, a-t-on rapporté - a résulté d’un processus un peu dingue qui a aidé l’acteur à être prêt pour le tournage.
Phoenix a aussi lu un livre sur les assassinats politiques, mais il voulait créer un psychopathe criminel qui pouvait échapper à toute catégorisation.
«Je ne voulais pas qu’un psychologue puisse identifier le genre de personne que j’étais. Je voulais que le personnage garde un peu de mystère.»
Il était si nerveux au sujet du rire particulier du personnage qu’il a invité le directeur-scénariste Todd Phillips de venir chez lui pour en entendre quelques-uns. La session a duré pendant un long moment, un trop long moment, sans doute.
Le personnage a continué d’évoluer, même pendant le tournage. La musique obsédante de la compositrice Hildur Guðnadóttira a fortement contribué au processus. Phillps en faisait jouer des extraits pour bien établir le climat.
«Nous avons découvert des nouveaux aspects de sa personnalité jusqu’à la toute dernière journée», se rappelle l’acteur.
Et cela a déclenché des débats sur la nécessité de tourner de nouveau certaines scènes.
Au cours de l’écriture du film, Phillips et son co-scénariste Scott Silver se sont mutuellement poussés «à trouver tous les jours quelque chose de complètement dément». Le film s’éloigne du ton habituel des films issus de l’univers de DC Comics comme Wonder Woman ou La Ligue des justiciers. Il n’est pas enchaîné à la bande dessinée ou influencé par les anciens portraits du personnage. «L’objectif du Joker n’est pas de regarder le monde brûler», confie Phillps, en faisant référence au leitmotiv du Joker interprété par le regretté Heath Ledger, dans The Dark Knight Rises, de Christopher Nolan.
«Il a été difficile pour nous de convaincre DC et le studio [Warner Bros], reconnaît le réalisateur. Il est juste de dire que le studio a pris un grand risque en nous laissant faire exactement ce que nous voulions. Il n’y avait aucune règle, aucune limite à respecter.»
Todd Phillips décrit son film comme une étude de personnage dans la même veine que ceux des années 1970 comme Taxi Driver ou La Valse des pantins de Martin Scorcese.
Le film se déroule la fin des années 1970 et au début des années 1980. New York joue le rôle de Gotham City.
Le Joker, coté Restricted (les mineurs âgés de 17 ans et moins doivent être accompagnés d’un adulte pour le voir), est d’un réalisme rugueux.
Il a suscité certaines inquiétudes au sujet de la violence à laquelle seront soumis les spectateurs.
Selon le réalisateur, il n’y en a pas tellement. Les scénaristes ont été «très prudents» sur la façon dont les personnages feraient usage de la violence dans le film.
«Plusieurs pensent déjà que ce film sera très violent, constate Todd Phillips. Ce qui pourrait affecter le spectateur, c’est notre portrait réaliste. Quand la violence survient, elle peut faire mal comme un coup à l’estomac.»
De son côté Joaquin Phoenix refuse de considérer son Joker comme un personnage «tourmenté».
«J’étais intéressé par la luminosité d’Arthur, à défaut d’un meilleur mot. Sa lutte pour trouver le bonheur, pour se sentir connecté, pour ressentir la chaleur humaine et l’amour», dit-il. ■