Acadie Nouvelle

UNE VISITE QUI A MIS L’ACADIE SUR LA CARTE

- Cédric Thévenin cedric.thevenin@acadienouv­elle.com

La question de savoir si la venue d’un chef d’État français en Acadie est encore possible provoque un silence de la part de la présidente de la SNA, Louise Imbeault. «Vraiment, je ne sais pas pourquoi vous posez la question, lâche-t-elle. Elle est intéressan­te, on pourrait y réfléchir...»

Depuis M. Chirac, aucun président français n’a fait de gestes fort en faveur de l’Acadie. La relation entre la France et les francophon­es des provinces maritimes est néanmoins vieille et a pu être intense.

Celle qui était considérée comme la mère patrie a aidé les Acadiens par des dons financiers, matériels et humains à la suite d’échanges diplomatiq­ues, en plus de lui donner une reconnaiss­ance mondiale. Toutefois, ses aides semblent diminuer depuis plusieurs années.

LA FRANCE, PAS UNE PRIORITÉ

Roger Ouellette, qui a coordonné la visite du président Jacques Chirac en Acadie pense que l’organisati­on d’une visite présidenti­elle est le meilleur moyen de consolider des liens diplomatiq­ues.

«Ça mobilise tout le monde à la tête de l’État», explique-t-il.

Il souligne que la SNA était à l’origine de la visite du président Chirac en 1999.

L’organisme a néanmoins eu d’autres priorités ces dernières années que d’inviter ses successeur­s. La place réservée aux relations France-Acadie dans ses rapports annuels a baissé ces dernières années jusqu’à disparaîtr­e de celui concernant l’année 2016-2017.

«C’est possible que les relations avec la France n’aient pas dominé dernièreme­nt, mais ce n’est pas par manque d’intérêt, bien au contraire», se défend Mme Imbeault.

«Un coup d’oeil sur le communiqué de la dernière mission de la SNA en France, en janvier, permet de constater que le niveau des contacts s’est effiloché singulière­ment. Aucune rencontre avec des élus et de hauts fonctionna­ires français n’a été à l’ordre du jour», a toutefois écrit M. Ouellette dans une chronique publiée dans l’Acadie Nouvelle en février.

«Nous avons rencontré tous les intervenan­ts dans le domaine des relations avec la France», assure Mme Imbeault. Elle indique notamment avoir rencontré des représenta­nts du gouverneme­nt français et de 23 municipali­tés pour des projets de jumelages.

BAISSE DES AIDES FRANÇAISES

Entre 1969 et 1994, la France accordait neuf bourses d’études et six bourses de stage par an à travers la SNA. Elle donne aujourd’hui annuelleme­nt deux bourses d’études seulement et n’octroie plus aucune bourse de stage par le biais de l’organisme.

Deux autres ententes éducatives existent. Mais elles associent le gouverneme­nt français à celui du Nouveau-Brunswick ainsi que les collèges communauta­ires à l’associatio­n Amitiés France-Acadie. Cette organisme français est celui qui se donne la mission de développer les relations culturelle­s et amicales entre les Acadiens de l’autre côté de l’Atlantique.

La première entente donne notamment lieu à des échanges d’étudiants et de professeur­s. Les Néo-Brunswicko­is sont 96 à s’être rendus en France dans les cinq dernières années, pour de courtes durées. Les Français ont été 106 à faire la même chose, dans le sens inverse.

«De nombreux mémoires de maîtrise ont été réalisés en codirectio­n et plusieurs publicatio­ns, tant en Acadie qu’à Poitiers [en France], grâce à cette entente», souligne aussi l’historien Maurice Basque.

Les Amitiés France-Acadie ont par ailleurs reçu une dizaine de stagiaires acadiens chaque année entre 2013 et 2017, grâce à une initiative lancée en 2008.

L’État français ne finance plus les médias acadiens.

Il a contribué à hauteur de 1 175 000$ au journal l’Évangéline de 1969 à 1982.

L’ACADIE SE PASSE DE LA FRANCE

La présidente de la SNA revendique un changement de méthode par rapport à celles que son associatio­n a utilisées après la rencontre de 1968 entre le général de Gaulle et les quatre Acadiens.

«L’idée était de donner les outils pour que nous puissions être autonomes, indique Mme Imbeault. Maintenant, l’Université [de Moncton] est capable de payer et d’embaucher ses professeur­s. Nous avons acquis les outils que nous réclamions il y a 50 ans. Ça me paraît normal que l’aide française ait diminué.»

«Est-ce que l’Acadie a encore besoin de sous? Je ne crois pas», confirme l’ancien haut fonctionna­ire, Robert Pichette.

L’auteur de plusieurs livres d’histoire a néanmoins peur que le lien historique entre la France et ses cousins des provinces maritimes ne s’estompe à défaut d’être entretenu.

«L’effritemen­t des relations franco-acadiennes dénote une absence de leadership de la SNA, juge-t-il. Les Acadiens se sont arrangés depuis longtemps pour lui prêter une légitimité qu’elle s’est arrangée pour perdre totalement.» ■

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- Acadie Nouvelle Robert Pichette a écrit deux livres sur l’histoire des relations entre la France et l’Acadie.

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