DES HÔPITAUX SOUS LES BOMBES
Pendant que l’Amazonie en feu a soulevé une vague d’indignation mondiale, un peuple disparaît dans la quasi-indifférence.
«Les images qui nous parviennent d’Idleb en Syrie sont terrifiantes!», écrit cette semaine l’Union des Organisations de Secours et Soins médicaux (UOSSM France).
Longtemps sous le feu des projecteurs, l’ONG nous rappelle ici que la guerre civile syrienne ne fait plus les manchettes depuis longtemps. Pourtant, les atrocités se poursuivent au pays de Bachar el-Assad.
Des raids aériens et des bombardements continuent en effet de frapper sans distinction de cibles. Là-bas, même le statut de professionnel de santé ne permet pas d’échapper aux horreurs de la guerre. Car dans ce conflit vieux de huit ans, tous les coups sont permis. Même contre les établissements médicaux situés dans cette zone où vivent quatre millions d’habitants.
Les derniers événements en date font froid dans le dos. Parlons tout d’abord du centre de santé primaire d’Alzerbeh, dans la province d’Idleb. Celui-ci a été directement pris pour cible, le 30 août 2019. Deux frappes aériennes l’ont visé, le mettant hors service. Comme l’établissement avait été auparavant fermé, aucune victime n’est heureusement à signaler. Quelques heures de répit seulement, puisque dès le lendemain, c’est au tour de l’hôpital Al-Iman à Urem Al-Kubra d’être visé par sept frappes aériennes. Endommagée, la structure a dû fermer ses portes. Pour comprendre l’ampleur de l’impunité qui règne dans la région, l’UOSSM informe qu’il s’agit des 49e et 50e établissements médicaux à être visés depuis le 28 avril. Résultat, 30 humanitaires y ont laissé leur vie. Des décès qui ne sont nullement les dégâts collatéraux de bombardements ratés. L’UOSSM explique que ces travailleurs sont poursuivis jusque dans leurs interventions. En témoignent les cinq ambulances qui ont été ciblées alors qu’elles portaient secours à des patients, tuant huit membres du personnel.
Mais dans ce triste bilan, ce sont bien évidemment les civils qui paient le plus lourd tribut. Venant d’Alep, de la Ghouta ou de Deraa, ils avaient pour la plupart déjà fui le pire. Sauf que comme le paradis en théorie, l’enfer sur terre semble éternel. Dans les conditions déplorables d’Idleb, ces malheureux sont donc encore pris pour cible. De nouveau, ils vivent l’encerclement, la famine, le manque d’eau et la destruction systématique de leurs lieux de vie. Au moins 892 d’entre eux ont été tués, dont au moins 226 enfants et 179 femmes.
Pour ceux qui s’en sortent vivant, c’est un autre cauchemar qui commence. Celui de la convalescence ou d’un autre déplacement. Plus de 1912 civils ont ainsi été blessés. Et plus de 750 000 personnes ont été envoyées au nordouest de la Syrie. En résumé, afin d’échapper aux obus, ces populations n’ont souvent d’autre choix que l’exil. Voilà l’histoire de nombreux Syriens immigrés au Canada…
«Il est inadmissible que deux autres établissements médicaux aient été directement ciblés et mis hors service. Voir des photos de nouveau-nés évacués d’un hôpital dans lequel ils viennent de naître est absolument inacceptable. Où les civils innocents sont-ils censés aller pour recevoir des soins médicaux et des services d’urgence si tous les établissements médicaux sont bombardés?», s’indigne le Dr Ziad Alissa, président de l’UOSSM France.
Ce médecin répète inlassablement que ces crimes de guerre ne peuvent continuer à se produire sans conséquence. Son organisation appelle donc la communauté internationale à appliquer les chartes des Nations Unies qui visent à maintenir la paix.
En face, les réponses des grands de ce monde sont inacceptables. Leur impuissance d’abord. Puis leur silence. En huit ans, aucun d’entre eux n’est parvenu à trouver une solution pour mettre fin à la guerre civile syrienne.
À ce sujet, on note que le dernier G7 en France a une nouvelle fois échoué. Mais il devait, c’est vrai, répondre d’urgence à d’autres priorités. Le président français, Emmanuel Macron, a promis par exemple une indemnisation immédiate aux commerçants lésés par la bunkerisation de la ville de Biarritz lors du sommet.
En cette fin d’été, on imagine que les vacances des familles syriennes ont été bien différentes des nôtres. Idem pour cette semaine, où les petits Syriens ont fait leur rentrée scolaire sous les sonneries des bombes.