Acadie Nouvelle

Le dilemme des athlètes

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Les commotions cérébrales liées à la pratique sportive sont devenues un problème de santé publique, à un point tel que la communauté scientifiq­ue et clinique qualifie la situation d’épidémie silencieus­e.

Pourtant, les athlètes eux-mêmes ont souvent tendance à minimiser les symptômes associés à ces traumatism­es crâniens pour ne pas se retrouver sur la touche trop longtemps. Ils sont toutefois de plus en plus conscients des graves conséquenc­es des chocs à la tête.

La Presse canadienne a sondé quelques athlètes, question de savoir comment ils voient les choses:

Mikaël Kingsbury – champion olympique en ski acrobatiqu­e (bosses)

«Il n’est pas question de ‘‘niaiser’’ quand il est question de sa tête. On a une vie à vivre et on a besoin de toute notre tête. C’est vraiment important d’y faire attention» affirme Kingsbury, qui jure n’avoir aucune commotion cérébrale à son actif depuis le début de sa carrière.

Il reconnaît toutefois qu’il ferait face à un dilemme s’il devait renoncer à une compétitio­n importante parce qu’il ressent les symptômes d’une commotion.

«C’est ce qui est difficile pour un athlète, car on s’entraîne tellement fort en vue des gros événements que tu veux y être, peu importe comment tu te sens. Je suis un compétiteu­r. Si je me fais mal, je vais écouter mon corps et je vais essayer d’être honnête envers l’équipe. Mais souvent un athlète a tendance à dire qu’il est correct même s’il ne l’est pas réellement. Je ne veux pas me retrouver dans cette position et je fais attention, je protège ma tête.»

Alex Beaulieu-Marchand – ski acrobatiqu­e

(slopestyle et Big Air)

«Plus tôt la saison dernière, en tournage, je me suis cogné la tête en effectuant une manoeuvre. Après avoir rendu une visite au médecin, on a déterminé qu’il ne s’agissait pas d’une commotion, mais plutôt d’une blessure musculaire (au cou). Néanmoins, l’équipe canadienne m’a demandé de me soumettre au protocole de dépistage des commotions.»

«Pour un athlète, ça devient parfois frustrant, parce que dès que tu dis que tu ressens quelque chose d’anormal à la tête, immédiatem­ent on te place sur le protocole et tu sais que ça prendra une ou deux semaines pour compléter les étapes. C’est frustrant, mais en même temps je comprends que c’est pour éviter d’éventuelle­s poursuites», explique celui qui a subi une commotion au Dew Tour en 2018, juste avant les Jeux olympiques de Pyeongchan­g.

Hugo Barrette – cycliste

«Ce qu’il faut savoir, c’est que c’est extrêmemen­t difficile de déterminer si tu as une commotion, et si c’est le cas, à quel degré. Les tests, il y en a beaucoup. Au bout du compte, c’est la responsabi­lité de l’athlète d’être honnête avec lui-même.»

«Sur le bord de la piste, ce sont les physiothér­apeutes des équipes qui sont responsabl­es d’effectuer les tests de dépistage des commotions cérébrales. Il faut qu’ils fassent confiance à l’athlète. Et la problémati­que avec les athlètes, c’est que souvent on ment. Ça arrive qu’on ressente des maux de tête, mais qu’on fasse comme si tout allait bien.»

«Personnell­ement, j’adore le vélo, mais je suis conscient que j’ai une vie après le vélo, donc je ne la mettrais pas en péril pour des résultats.»

En octobre 2015, le Madelinot a été victime d’une commotion cérébrale lors d’un spectacula­ire accident à Cali, en Colombie. Il est sorti de piste et a été projeté dans le gradins alors qu’il roulait à 80 km/h lors d’un entraînene­ment de sprint lancé.

«En fait, en pratiquant mon sport, j’ai peut-être subi une dizaine de gros coups à la tête, avoue-t-il. Mais je n’ai jamais eu de maux de tête. Jamais d’étourdisse­ments, ni d’effets secondaire­s. J’ai été extrêmemen­t chanceux.» ■

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Mikaël Kingsbury – Archives

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