Le maire de Bertrand dénonce le pouvoir de vie ou de mort de Tracadie
Il suggère de changer la règle du droit de véto dans toutes les commissions de services régionaux
M. Godin travaille actuellement à la rédaction d’une lettre destinée au ministre, dont le journal a obtenu copie. Ce document sera distribué à ses homologues, qui auront à décider de l’appuyer à travers une décision de leurs conseils respectifs.
Faisant notamment référence au dossier controversé de la collecte des déchets dans la Péninsule acadienne, le maire soutient que son village ne sera plus qu’un observateur au sein de la CSR-PA tant que Tracadie aura, à elle seule, le droit de vie ou de mort sur plusieurs projets collaboratifs régionaux.
M. Godin mentionne que la CSR-PA a récemment demandé l’autorisation pour un prêt de 1,9 million $ à la Commission d’emprunt des capitaux par les municipalités. Cette somme lui aurait servi à lancer sa propre flotte de collecte des déchets dès 2020, sans Tracadie.
Leur demande a été refusée à Fredericton, car elle nécessitait un vote favorable des membres représentant au moins les deux tiers de la population de la Péninsule acadienne. La Municipalité régionale de Tracadie s’y est opposée, tout en indiquant qu’elle travaillait à monter sa propre flotte.
M. Godin regrette le résultat final, même si cette décision n’avait aucun impact sur le budget de la MRT, car la responsabilité du projet de collecte incombait aux municipalités participantes seulement.
«Même si la relation avec la MRT à la table de la CSR-PA n’a jamais été facile, cette dernière mésaventure dépasse largement l’entendement et engendre des conséquences très sérieuses pour les autres municipalités à l’égard de l’avenir du service de collecte et du système optimisé de la collecte des déchets», écrit M. Godin.
Le maire de Bertrand justifie sa nouvelle position d’observateur par le fait que «l’intérêt du bien commun n’est plus l’élément essentiel qui dicte l’établissement de nos actions».
«Puisque Tracadie, à elle seule, peut déterminer la destinée de l’ensemble des communautés de la Péninsule acadienne, nous jugeons donc que notre engagement n’est plus nécessaire à la gestion des services régionaux», poursuit le maire de Bertrand dans sa lettre qu’il demande aux autres maires - même celui de Tracadie, s’il en sent le besoin, promet-il de signer et de l’envoyer au ministre.
Mardi, les élus de Caraquet ont appuyé cette démarche.
En entrevue au journal, M. Godin espère que ce moyen de pression convaincra M. Carr de modifier rapidement les règles du jeu.
«C’est dommage d’aller aux réunions de la CSR-PA et de voir Tracadie agir à sa guise comme elle le fait depuis un an. J’espère sincèrement que le ministre va changer cette loi du droit de veto. Il est au courant de ce qui se produit et il nous a même incités à bouger. Nous ne pouvons continuer à collaborer régionalement s’il n’y a pas de modifications.»
«On comprend que c’est une règle démocratique et on peut comprendre quand il s’agit d’une question qui touche le budget d’une municipalité. Mais dans le dossier de la collecte, ce n’est pas le cas puisque Tracadie s’est elle-même retirée du projet. En votant contre, elle bloque toute possibilité de collaboration de la part de gens qui veulent collaborer», a expliqué le maire de Bertrand.
Son action ne vise pas à saborder la CSR-PA, précise-t-il, mais s’il devient impossible de faire avancer des dossiers en continuant à donner autant de pouvoir à une seule municipalité, «aussi bien se rencontrer et jouer aux cartes», dit-il, mi-figue mi-raison.
La prochaine réunion publique de la Commission des services régionaux de la Péninsule acadienne est prévue le jeudi 26 septembre. M. Godin annonce que d’autres actions démocratiques vont se dérouler à cette réunion.
«Dans ces conditions, ce n’est plus plaisant de travailler dans la CSR. Et là, on est proche du conflit. C’est malheureux. Notre CSR est en train d’imploser. Elle vit avec une épée de Damoclès au-dessus de sa tête. Je suis conscient de l’impact de mon geste. Tous les yeux seront désormais rivés sur nous, mais le problème existe aussi ailleurs. Nous aurons des élections municipales en 2020. Qui dit qu’un nouveau maire à Bathurst ou à Edmundston n’agira pas de la même façon que Tracadie?», croit-il. ■