En plein coeur
Le Nouveau Parti démocratique a-t-il encore un avenir au Nouveau-Brunswick? La question se pose plus que jamais avec le départ de 14 candidats et d’un important conseiller politique.
Le NPD n’est aujourd’hui plus que l’ombre de lui-même. Il est devenu un zombie, une sorte d’épave sans capitaine et condamnée à couler à brève échéance.
Le constat peut sembler dur. Mais comment évaluer autrement un parti qui vient de perdre le tiers de ses candidats des dernières élections, qui n’arrive pas à se trouver un leader et qui intéresse si peu le chef fédéral, Jagmeet Singh, que celui-ci ne daigne même pas se déplacer au Nouveau-Brunswick?
Comprenons-nous. Les choses peuvent changer très vite en politique. Les intentions de vote de la People’s Alliance ont longtemps vivoté autour de 1% avant que cette formation ne surfe sur les problèmes linguistiques d’Ambulance NB pour réussir une percée aux dernières élections.
Même chose pour le Parti vert, dont les appuis étaient faméliques au début de la décennie sous le leadership de Jack MacDougall. Il aura fallu un extraordinaire concours de circonstances (création d’une nouvelle circonscription, candidature d’un ex-ministre libéral sous la bannière néo-démocrate et division du vote) pour permettre au nouveau chef David Coon de se faire élire une première fois en 2014, dans Fredericton-Sud.
Rien n’est impossible. Il est cependant inutile de se cacher la tête dans le sable: il faudra rien de moins qu’un miracle pour que le Nouveau Parti démocratique redevienne pertinent dans notre province.
Certains croient que le NPD est mort en tant que force politique avec la démission en 2005 de sa seule chef à avoir été élue à l’Assemblée législative, Elizabeth Weir. D’autres pointeront plutôt du doigt le départ de Dominic Cardy, qui a quitté le parti avec fracas après avoir tenté en vain de l’amener vers le centre-droit.
C’est toutefois la montée en force du Parti vert qui sera fatale aux néo-démocrates. Il n’y a pas de place pour deux partis de gauche sur l’échiquier politique néo-brunswickois.
Le Nouveau Parti démocratique ne s’est pas non plus fait de faveur en poussant vers la porte de sortie sa leader Jennifer McKenzie, plus tôt cette année. Le parti, malgré son état de délabrement, avait la chance de compter sur une chef compétente, bilingue, active sur les médias sociaux et dotée de bons instincts politiques.
Cette ingénieure de profession n’a pas réussi à se faire élire dans Saint-Jean-Havre (elle a terminé 3e, tout juste devant le candidat du Parti vert), mais a fait bonne impression, notamment lors des débats télévisés.
Lors d’une assemblée en février, des délégués ont malgré cela choisi de déclencher une campagne à la direction. Mme McKenzie a moins besoin du NPD dans sa vie que le contraire. Elle a donc remis sa démission.
Six mois plus tard, aucun candidat crédible n’a toujours posé sa candidature à sa succession. Le congrès, qui devait avoir lieu en août, a été annulé. Un inconnu dans la jeune vingtaine assure l’intérim.
Jennifer McKenzie a tout de même ses défauts, le principal étant qu’elle n’a pas reconnu que les verts étaient en train d’occuper le terrain traditionnellement réservé à son parti ni agi en conséquence. Elle a continué de répéter jusqu’à la fin que le Parti vert n’est pas un vrai parti de gauche, qu’il ne représente pas une menace pour sa formation et qu’elle ne voyait pas l’utilité d’une fusion.
Non seulement les électeurs ont une opinion différente, mais voilà que plusieurs de ses candidats et organisateurs pensent de même.
Des gens comme Jean-Maurice Landry (Bathurst-Est-Népisiguit-Saint-Isidore), Francis Duguay (Tracadie-Sheila) et Joyce A. Richardson (Dieppe), qui ont tous réussi de bons scores aux élections de 2018 sous la bannière orange, se sont tournés vers le parti de David Coon.
Il serait tentant de ne pas accorder trop d’importance à cette saignée. Après tout, la plupart des transfuges n’ont obtenu que quelques centaines de votes l’année dernière.
C’est toutefois oublier que le NPD n’a jamais été un parti de pouvoir. C’est un parti d’idées, qui cherche à défendre une vision du monde en faveur des travailleurs, de l’environnement, des démunis et des laissez-pourcompte.
Sa force a toujours été de compter sur des militants qui ne ménagent pas les efforts pour tenir le parti à bout de bras. Si même ceux-ci cessent de croire en leur formation politique et croient pouvoir mieux propager leur message avec les verts, que restera-t-il de l’option néo-démocrate?
Le Nouveau Parti démocratique du Nouveau-Brunswick n’a pas su évoluer ni se transformer afin de devenir une véritable solution de rechange aux partis traditionnels. Il est aujourd’hui en danger de disparition. Son pendant fédéral pourrait à la longue être menacé de subir le même sort s’il ne retient pas les leçons qui s’imposent.