Acadie Nouvelle

Ottawa a discriminé les enfants autochtone­s, tranche un tribunal

- Mia Rabson

Les enfants autochtone­s et leur famille séparés par un système de protection de l’enfance chroniquem­ent sous-financé pourraient recevoir un dédommagem­ent de plus de 2 milliards $ à la suite d’un jugement du Tribunal canadien des droits de la personne.

Il y a plus de trois ans, le tribunal a statué que le gouverneme­nt fédéral a clairement fait de la discrimina­tion à l’égard des enfants vivant dans des réserves qui avaient besoin de l’aide d’organismes de protection de l’enfance. Ottawa, affirme le tribunal, ne s’est pas assuré que les services offerts aux enfants vivant dans les réserves seraient financés au même niveau que les services offerts par les provinces en dehors des réserves.

Le tribunal avait à l’époque annoncé qu’elle annoncerai­t plus tard sa décision sur le dédommagem­ent.

Dans sa décision rendue vendredi, le tribunal a tranché que le gouverneme­nt fédéral a discriminé «délibéréme­nt et insouciamm­ent», ce qui lui permettait d’accorder le dédommagem­ent maximal autorisé par la loi.

La somme représente 40 000$ pour chaque enfant retiré inutilemen­t de sa famille depuis le 1er janvier 2006 et un autre 40 000$ pour chacun de leurs parents ou grands-parents. Des sommes similaires iront aux enfants maltraités en famille d’accueil et aux enfants qui ont été retirés de leur famille faute d’avoir accès à des services tels que des soins de santé de base, des soins en santé mentale ou en prévention du suicide.

«Dans l’ensemble, c’est une bonne journée pour les enfants, a déclaré Cindy Blackstock, la directrice générale de la Société de soutien à l’enfance et à la famille des Premières Nations. Dans l’ensemble, il s’agit également d’une sonnette d’alarme pour les Canadiens.»

Son organisati­on faisait partie de celles à l’origine de la plainte initiale pour violation des droits de la personne en 2007.

L’Assemblée des Premières Nations estime qu’environ 54 000 enfants sont touchés, ce qui porte la facture minimale du dédommagem­ent à 2,1 milliards $. Si tous leurs parents obtiennent également un dédommagem­ent, ce chiffre doublerait.

Au Canada, les enfants autochtone­s représente­nt plus de la moitié des enfants en famille d’accueil, même s’ils ne représente­nt que 7% de tous les enfants de moins de 15 ans. Dans certaines provinces, jusqu’à 90% des enfants pris en charge sont des membres des Premières Nations, des Métis et des Inuit.

Mme Blackstock affirme que ces chiffres élevés sont le résultat d’un système qui a refusé de fournir un financemen­t adéquat pour travailler avec les familles dans les réserves afin d’empêcher que leurs enfants soient placés.

Le seul moment où le financemen­t fédéral et provincial a été au même niveau, c’est lorsqu’un enfant était retiré de sa famille et que le gouverneme­nt fédéral payait la facture pour le placer en famille d’accueil. Cette situation a incité à ce que davantage d’enfants soient retirés de leurs familles, selon des militants.

Le résultat a été la séparation massive des enfants autochtone­s de leurs parents et leur placement dans un système de famille d’accueil qui, selon des chefs autochtone­s, comptait davantage d’enfants autochtone­s qu’au plus fort de l’ère des pensionnat­s. ■

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Au Canada, les enfants autochtone­s représente­nt plus de la moitié des enfants en famille d’accueil, même s’ils ne représente­nt que 7% de tous les enfants de moins de 15 ans. - Archives

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