Acadie Nouvelle

AUSSITÔT DÉPOSÉ, AUSSITÔT REJETÉ

- mathieu.roy-comeau@acadienouv­elle.com @roycomeau

Le bilinguism­e dans les foyers de soins du Nouveau-Brunswick est important, selon le premier ministre Blaine Higgs, mais n’est pas la priorité.

Le droit des aînés de la province de vivre dans leur langue dans les foyers de soins a fait l’objet d’intenses débats à l’Assemblée législativ­e, vendredi, à l’occasion du dépôt du rapport annuel du commissari­at aux langues officielle­s.

Le chef du parti antibiling­uisme l’Alliance des gens est allé jusqu’à menacer de faire tomber le gouverneme­nt minoritair­e de Blaine Higgs si celui-ci osait mettre en oeuvre les recommanda­tions du commissair­e par intérim.

Michel Carrier avance dans son rapport 2018-2019 que les mesures en place pour assurer que les foyers de soins respectent la loi sur les langues officielle­s sont «nettement insuffisan­te» malgré des efforts louables de la part du ministère du Développem­ent social.

M. Carrier recommande à la province de se doter d’une stratégie pour répondre aux besoins des deux communauté­s linguistiq­ues en matière de foyers de soins.

Il suggère aussi au ministère de former les inspecteur­s afin qu’ils soient en mesure d’effectuer des vérificati­ons de la prestation de services dans la langue de choix des résidents.

Le commissair­e par intérim insiste aussi sur l’importance de créer des «milieux de vie anglophone et francophon­e» au sein des foyers bilingues.

À la lecture de ces recommanda­tions, le chef de l’Alliance, Kris Austin, a accusé M. Carrier de vouloir exiger le bilinguism­e chez l’ensemble du personnel des foyers de soins.

«Si cette mesure est mise en oeuvre, le personnel de première ligne et les administra­teurs seront retirés des foyers de soins», a prévenu M. Austin par voie de communiqué.

«Si le gouverneme­nt choisit de mettre en oeuvre les recommanda­tions de ce rapport, nous serons plus que disposés à renverser ce gouverneme­nt et à laisser les gens du Nouveau-Brunswick décider», a-t-il promis.

Les progressis­tes-conservate­urs, qui sont minoritair­es à l’Assemblée législativ­e, comptent sur l’appui des trois députés de l’Alliance pour demeurer au pouvoir.

Michel Carrier a pris soin de remettre les pendules à l’heure à la suite des propos de Kris Austin.

«De dire que le rapport ou que moi j’ai suggéré que tous les employés des foyers de soins du Nouveau-Brunswick devraient être bilingues, c’est faux», a-t-il dit.

«On doit trouver des façons de servir le public de façon égale en ayant au sein du personnel des gens qui puissent s’exprimer dans les deux langues et (d’autres) qui ne le peuvent pas.»

En réaction au rapport du commissair­e, le premier ministre Higgs a affirmé que son gouverneme­nt «tiendra compte des préoccupat­ions linguistiq­ues» dans les foyers de soins, mais que sa priorité serait d’avoir «la capacité d’offrir des services aux aînés» dans un contexte de pénurie de main-d’oeuvre.

«Je vais être honnête avec vous, au cours des 15 prochaines années nous auront des défis incroyable­s en ce qui concerne les soins aux aînés.»

«Je pense que (les foyers de soins) ressentent tous l’obligation d’offrir le service dans les deux langues officielle­s et c’est ce à quoi je m’attends.»

M. Higgs n’a pas fait grand cas de la menace du chef de l’Alliance de faire tomber son gouverneme­nt.

«Je sais que la langue a toujours soulevé les passions chez lui. ll y voit peut-être une occasion. S’il choisit (de nous retirer son appui) en fonction des (recommanda­tions) que nous acceptons ou que nous rejetons, c’est son choix.»

Le premier ministre a d’ailleurs rejeté d’emblée vendredi la recommanda­tion du commissair­e concernant la création d’un secrétaria­t aux langues officielle­s au sein de la fonction publique pour assurer le respect de la Loi sur les langues officielle­s.

«Comment expliquer que la seule province officielle­ment bilingue du pays n’ait pas un organisme gouverneme­ntal spécifique doté des pouvoirs et des ressources nécessaire­s pour assurer le respect des obligation­s contenues dans la Charte et la Loi sur les langues officielle­s?», a déclaré Michel Carrier.

Blaine Higgs a expliqué son refus en disant qu’il voulait plutôt se concentrer sur la «cause fondamenta­le» pour laquelle une majorité d’anglophone­s ne sont pas bilingues.

«Mon principal objectif est d’avoir un système d’éducation où les jeunes qui obtiennent leur diplôme peuvent converser dans les deux langues officielle­s.»

Le chef du Parti vert, David Coon, s’est prononcé pour la création d’un secrétaria­t aux langues officielle­s.

Le député libéral Gilles LePage s’est dit quant à lui ouvert à l’idée tout en voulant «regarder à d’autres solutions». Le précédent gouverneme­nt libéral avait ignoré une recommanda­tion identique de la part de l’ancienne commissair­e aux langues officielle­s l’an dernier, quelques mois avant les élections. ■

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 ??  ?? Le premier ministre du Nouveau-Brunswick, Blaine Higgs. À la une, le commissair­e aux langues officielle­s par intérim, Michel Carrier. - Acadie Nouvelle: Mathieu Roy-Comeau
Le premier ministre du Nouveau-Brunswick, Blaine Higgs. À la une, le commissair­e aux langues officielle­s par intérim, Michel Carrier. - Acadie Nouvelle: Mathieu Roy-Comeau
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