Des élus ruraux à la défense de leur bibliothèque
Des maires de municipalités rurales de la province témoignent de l’importance des bibliothèques publiques pour leur communauté. Ils refusent de possibles coupes budgétaires après les discussions sur l’avenir de ces institutions qui se sont tenues en août, à l’initiative du gouvernement.
«Les bibliothèques publiques sont obligatoires dans les régions rurales, proclame la mairesse de Saint-Quentin, Nicole Somers. Chez nous, je crois que c’est l’endroit où il y a le plus d’activités. C’est le lieu de rencontres, de transfert de la culture et d’intégration des nouveaux arrivants.»
Formation en communication, discussions littéraires, lecture de contes, tricotage… la bibliothèque La Moisson semble en effet très active. Sa page Facebook est d’ailleurs suivie par environ 850 internautes alors que Saint-Quentin compte une population de 2200 habitants.
À l’Est, dans le comté de Kent, la bibliothèque de Richibucto paraît bien seule, le long de la côte, entre Miramichi et Bouctouche.
«Il y a des gens qui font de la route pour y aller, pour sûr, s’exclame le maire de Richibucto, Roger Doiron. Ce n’est pas tout le monde qui a accès à Internet à haute vitesse.»
RÉSULTATS DES DISCUSSIONS EN ATTENTE
L’établissement similaire le plus proche se trouve à Rogersville. Sa mairesse Pierrette Robichaud le croit aussi nécessaire à ses citoyens. «Nous sommes à l’écart des centres urbains, souligne-t-elle. Notre population vieillissante y accède difficilement et n’a ni beaucoup de compétences informatiques ni beaucoup de moyens financiers pour acheter des livres.»
Contrairement à Mme Somers et à d’autres, Mme Robichaud se souvient pourtant ne pas s’être inquiétée à l’annonce des discussions à propos des bibliothèques publiques. Les consultations ont porté sur les heures d’ouverture, les forces et les faiblesses ainsi que les sources de financement potentielles de ces établissements.
Elles ont eu lieu en août, à l’initiative du gouvernement provincial. «On attend les résultats», déclare Mme Robichaud. Le ministère de l’Éducation postsecondaire indique ne pas encore avoir reçu de rapport final.
DE GRANDS LECTEURS À ROGERSVILLE
Les habitants de la campagne lisent-ils? La population de Rogersville pratique en tout cas beaucoup cette activité, si l’on se fie à la fréquentation de sa bibliothèque, communiquée dans un rapport annuel. Environ la moitié de ses enfants, soit 76, sont inscrits à son Club de lecture pendant l’été. La majorité de ses membres (60%) possèdent également une carte de membre de l’établissement.
Angèle McCaie fait partie des utilisateurs assidus de la bibliothèque du village. La femme de 34 ans est diplômée d’un bac en littérature anglaise à l’Université de Moncton. «J’ai toujours eu une passion pour la lecture, se souvient-elle. Ma mère était enseignante et grande lectrice. J’ai toujours grandi avec des livres.»
Elle jalouse les jeunes de Rogersville qui ont accès à une bibliothèque depuis une dizaine d’années. «Nous, nous allions au bibliobus pour prendre le plus de livres que nous pouvions afin de tenir jusqu’à sa prochaine visite, raconte-t-elle. Nous allions aussi à un club de lecture au Carrefour Beausoleil à Miramichi pour dévorer des livres tout l’été.»
LA LECTURE TRANSMISE AUX JEUNES
Beaucoup de ses voisins se rendent à Miramichi et à Moncton pour faire leurs courses et acheter des ouvrages. «En tenant compte des prix, je ne pourrais pas acheter tous ceux que je lis (deux par mois)», précise néanmoins Mme McCaie.
Cette dévoreuse de livres admet être un cas spécial. «Je ne me souviens pas que mes amis aient eu autant d’intérêt pour la lecture, note-t-elle à propos de son enfance. Évidemment, nous n’avions pas la technologie d’aujourd’hui. Nous nous occupions différemment.»
Elle n’est toutefois pas la seule à avoir lu tout en ayant grandi à la campagne. La présidente de la Société des enseignantes et enseignants retraités francophones du NouveauBrunswick (SERFNB), Linda LeBlanc a emmené ses enfants à la bibliothèque de Memramcook.
«Ils allaient aux clubs de lecture pendant l’été, se rappelle-t-elle. Sans ça, ils n’auraient pas continué à lire et auraient pris du retard dans leur niveau de français. Ces activités valent de l’or. Les bibliothèques, ça donne confiance! Un jeune qui n’a jamais été trempé dans la lecture ou dans l’information se sentira toujours inférieur aux autres.»
L’ancienne enseignante met en évidence les outils fondamentaux que sont la lecture et les facultés de recherche. Ses enfants, aujourd’hui adultes, les maîtrisent. L’une de ses filles est enseignante et son fils effectue des traductions pour Patinage Canada.
«Je suis très contente que mes enfants et mes petits enfants se servent de leur français, se félicite-t-elle. Ils parlent chiac comme les autres avec leurs amis, mais ils peuvent rédiger dans un bon niveau de langage.»