Acadie Nouvelle

Ces intellectu­els québécois et leur souveraini­sme qui nous effacent

- SOLÈNE PRINCE École de commerce et d’économie Université Linnaeus Kalmar, Suède

Je veux rappeler un détail important de cette affaire qui oppose Denise Bombardier aux gens des communauté­s francophon­es hors Québec du pays: le contexte dans lequel elle a tenu ses propos pour la première fois à l’émission Tout le monde en parle.

Mme Bombardier a déclaré à la télévision nationale il y a un an que les peuples francophon­es du Canada n’existaient dorénavant qu’à peine en dehors du Québec, engloutis par l’influence des anglophone­s. Il faut noter que Mme Bombardier a tenu ces propos non pas pour émettre une opinion sur l’état du français au Canada, mais pour attaquer ceux de l’ex-premier ministre Jean Chrétien qui, durant son entrevue à l’émission, proposait que la création historique du Canada avait servi à la sauvegarde du français en Amérique du Nord. Mme Bombardier est donc passée à l’attaque pour défendre le nationalis­me québécois comme vrai vecteur de la protection du français au pays, mais ceci malhabilem­ent en abaissant les autres francophon­es du pays à titre de perdants du même coup.

Je crois que si Mme Bombardier nie l’existence des communauté­s francophon­es hors Québec, c’est afin de glorifier la survie de son peuple comme seul vainqueur contre les anglais d’Amérique du Nord. Elle dit ces choses pour enflammer les passions souveraini­stes au Québec, faisant croire aux Québécois que la survie du français sur le continent ne tient dorénavant qu’à eux et qu’ils doivent se dépêcher pour former un pays. Elle ne se rend pas compte que de telles déclaratio­ns sont nuisibles aux projets de société des autres Canadiens-français.

Les Canadiens-français hors Québec ont choisi de se défendre en prouvant leur existence à Mme Bombardier en l’invitant chez eux pour le tournage d’un documentai­re. D’après moi, il n’aurait jamais fallu s’y prendre ainsi. Les intellectu­els comme Mme Bombardier comprennen­t le monde à travers des idées préconçues, qu’ils ont fabriquées dans leurs studios de télévision et leurs université­s. Quand ils descendent de leurs tours d’ivoire pour porter un regard sur le commun des mortels, ce n’est pas pour se rafraîchir les idées. Ils ne feront que rechercher les exemples qui vont confirmer leurs idées préconçues. C’est pour cela que je crois que les francophon­es du Nouveau-Brunswick ne pourront jamais convaincre Mme Bombardier de leur fierté française.

Le projet souveraini­ste est marquant de la culture et de l’histoire québécoise. Par contre, quand les aspiration­s souveraini­stes des Québécois mènent leur classe intellectu­elle à nier l’existence des autres francophon­es au pays, il faut refuser la propagatio­n de tels propos néfastes. D’après moi, cette affaire aurait dû rester un problème de perception du reste du Canada-français chez les intellectu­els souveraini­stes québécois, et n’aurait jamais dû devenir une question de manque d’efforts de protection de la langue française dans les communauté­s francophon­es hors Québec.

Une Acadienne de la région Chaleur en Suède depuis longtemps. ■

 ?? - Gracieuset­é: Radio-Canada ?? Denise Bombardier
- Gracieuset­é: Radio-Canada Denise Bombardier

Newspapers in French

Newspapers from Canada