Des scientifiques étudient des moyens de prolonger la durée des routes de glace
La route aurait dû être gelée, mais c’était tout sauf ça.
Lorsque les conducteurs ont tenté de parcourir la route de glace de la vallée du Mackenzie dans les Territoires du Nord-Ouest en mars, c’était une route impénétrable de boue bien avant sa date de fermeture habituelle. Quatre collectivités ont été laissées sans accès par la route.
C’est ce que Paul Barrette s’efforce de prévenir en utilisant tout ce qu’il peut, des câbles en acier à la pâte de bois.
«C’est la seule période de l’année, ces deux ou trois mois, pendant laquelle les communautés du Nord peuvent se réapprovisionner en carburant, en matériaux de construction et autres produits en vrac», a déclaré M. Barrette, qui dirige une équipe du Conseil national de recherches Canada qui élabore des moyens de garder les routes de glace praticables dans un climat qui se réchauffe.
«Ce que nous cherchons à faire, c’est de nous assurer que ces routes restent opérationnelles tout au long de ces hivers doux.»
Partout au Canada, il y a au moins 10 000 kilomètres de routes qui dépendent du gel. La plupart sont en Ontario, mais il y en a dans quatre provinces et deux territoires.
Pour des dizaines de communautés isolées, ils constituent le seul moyen d’entrer et de sortir qui ne dépend pas d’un bateau ou d’un avion. Ils sont une bouée de sauvetage pour de nombreux projets de ressources naturelles.
Les méthodes de construction améliorées ont légèrement prolongé la période d’ouverture de la plupart des routes d’hiver et de glace.
Mais le nombre de jours avec des températures glaciales diminue dans le Nord. Les températures ont augmenté de 1,5 degré Celsius au Yukon et dans les Territoires du Nord-Ouest, soit près de trois fois la moyenne mondiale.
Une étude de la route d’hiver reliant Yellowknife aux mines de diamants du centre de l’Arctique prédit qu’il ne sera plus possible de transporter de lourdes charges d’ici la fin du siècle.
«Si une telle projection devenait réalité, la route (Tibbett-Contwoyto) et les autres routes d’hiver de la région ne seraient plus viables pour soutenir l’industrie des ressources naturelles dans le nord du Canada», indique l’étude.
«Le maillon le plus faible se trouve souvent sur la glace, a déclaré M. Barrette. Lorsque cela se produit, la route reste fermée tout un hiver, de sorte que la communauté est bloquée pendant toute une année.»
La glace est délicate. Ce n’est pas aussi rigide qu’il n’y paraît et elle se déforme lentement sous une charge.
«Disons que vous garez votre véhicule sur la glace, a-t-il illustré. Si vous le laissez là deux ou trois heures, le véhicule risque de traverser la glace.»
M. Barrette et ses collègues cherchent des moyens de rigidifier la glace.
Dans le passé, les opérateurs ont jeté des billes de bois sur la route et les ont gelées dans la glace. Mais abattre des arbres au même endroit année après année crée des problèmes environnementaux. De plus, il n’y a pas d’arbres plus au nord dans la toundra.
M. Barrette cherche d’autres matériaux. «La pâte de bois est une possibilité.»
Mélanger de la pâte de bois à de la glace permet de renforcer cette dernière. Le mélange a été utilisé pendant la Seconde Guerre mondiale pour créer un porteavions expérimental.
L’installation de câbles d’acier dans la glace est une autre possibilité.
Plus récemment, M. Barrette a expérimenté ce qu’on appelle des «géotextiles», en l’occurrence une feuille de treillis en polypropylène figée dans la route.
«Ils doivent être assez légers et assez bon marché pour pouvoir être amenés sur place», a expliqué M. Barrette.
Ils doivent également être respectueux de l’environnement. Et ils doivent fonctionner. M. Barrette a déclaré qu’aucune de ces méthodes n’avait encore été testée sur le terrain.
«Nous étudions actuellement cela maintenant, a-t-il déclaré. Nous essayons de rendre cela possible.»
M. Barrette s’attend à pouvoir tester quelque chose sur le terrain dans un délai d’un an et indique qu’il est urgent de rendre la glace plus résistante à un climat plus chaud. ■