Tracadie: le maire Losier accuse des conseillers de «privilégier l’argent au lieu de la santé»
Le maire de Tracadie, Denis Losier, est déçu que le conseil municipal ait décidé de reporter à une date ultérieure le vote portant sur une interdiction du glyphosate dans l’ensemble de la municipalité.
Mardi soir, la troisième lecture et l’adoption de l’arrêté interdisant l’usage du glyphosate étaient inscrites à l’ordre du jour, mais la motion n’a pas obtenu l’approbation nécessaire d’une majorité des conseillers.
Quatre élus ont voté en faveur, quatre se sont prononcées contre. Trois membres du conseil se sont retirés de la salle après avoir déclaré un conflit d’intérêts.
Le maire Losier s’oppose, dans la municipalité, à l’arrosage de l’herbicide controversé, identifié comme étant un cancérigène probable en 2015 par l’Organisation mondiale de la santé.
«Mon commentaire est simple, je suis déçu. J’estime qu’on privilégie l’argent au lieu de la santé», a-t-il dit lors d’un entretien avec l’Acadie Nouvelle, en fin de soirée.
Bien que la majorité du conseil ait appuyé les démarches visant à interdire le glyphosate jusqu’à maintenant, mardi soir, le débat a pris une nouvelle tournure. Le conseiller JeanYves McGraw a notamment proposé un amendement à l’arrêté afin de permettre l’utilisation du glyphosate dans certaines circonstances. L’utilisation du produit serait permise de façon contrôlée par des gens certifiés.
«J’appuie le fait qu’il y ait un arrêté pour avoir un meilleur contrôle sur l’utilisation du glyphosate, mais je ne veux pas que l’industrie agroalimentaire soit pénalisée», a résumé M. McGraw. Denis Losier n’est pas du tout d’accord. «Ce n’est pas une interdiction si on permet encore son utilisation.»
«Ces produits existent pour économiser de l’argent. La culture biologique demande plus de manutention, plus de temps et probablement des produits un peu plus dispendieux, c’est une autre façon de faire. Veut, veut pas, le glyphosate c’est du poison. Est-ce qu’on veut continuer à l’utiliser? Il y a pourtant des exemples de fermes biologiques dans la Péninsule acadienne qui démontrent que ce n’est pas obligatoire.»
Le maire accepte cependant le verdict. «Le conseil s’est positionné et il faut respecter le choix, mais je n’ai pas peur de le dire, je suis vraiment déçu.»
Le dossier n’est pas mort pour autant. La question pourra être débattue de nouveau dans trois mois ou plus tôt si les trois quarts des membres du conseil le souhaitent.
En débattant l’amendement proposé par le conseiller McGraw, plusieurs conseillers ont avoué que la décision n’était pas toujours évidente. Amédée Boucher, un militant antiglyphosate de la Péninsule acadienne, a aussi exprimé sa déception et sa frustration à la fin de la réunion.
Bien que le glyphosate soit remis en question par plusieurs juridictions qui songent à l’interdire ou à limiter son utilisation, l’industrie agroalimentaire du Nouveau-Brunswick s’est défendue à maintes reprises au cours des dernières années.
Lors d’une entrevue cet été avec l’Acadie Nouvelle, Christian Michaud, président de l’Alliance agricole du Nouveau-Brunswick, a indiqué que la réalité pour la majorité des agriculteurs de la province n’a rien à voir avec les images bouleversantes prises sur des grandes fermes industrielles qui produisent à grande échelle pour les marchés internationaux.
«Les agriculteurs que je connais n’épandent pas de pesticides lorsque ce n’est pas nécessaire. Croyez-moi, au prix que ça coûte, si on peut s’en passer, on va le faire. Les fermiers que je connais vont pêcher dans les étangs près de chez eux, ils chassent et ainsi de suite. C’est dans notre intérêt de s’assurer que notre environnement demeure sain pour gagner notre vie», a déclaré Christian Michaud. ■