État de l’Université de Moncton: «La vitrine de l’Acadie»
Plusieurs conférenciers, étudiants et autres membres de la communauté universitaire étaient réunis mercredi soir, afin d’établir un état des lieux de l’Université de Moncton, avec en ligne de mire sa place au sein de la communauté acadienne et francophone.
«Nous avons senti qu’il y avait une volonté de prendre la parole de la part de l’ensemble de la communauté universitaire, c’est pourquoi nous avons organisé cette conférence, explique Mathieu Lang, président de l’Association des bibliothécaires, professeures et professeurs de l’Université de Moncton. Deux questions cruciales étaient posées ce soir: qu’est-ce que l’Université de Moncton aujourd’hui, et à quoi aspire-t-elle?»
Pour Ibrahim Ouattara, professeur au département de philosophie sur le campus de Moncton, il faut avant tout rappeler le rôle culturel de l’U de M.
«Il ne faut pas la réduire à un unique lieu de formation professionnelle, assure le conférencier. L’Université est un espace d’apprentissage, de recherche, de construction de soi et d’ouverture au monde. Elle est en outre la vitrine et le laboratoire de l’Acadie.»
Même son de cloche chez Louise Imbeault, chancelière de l’Université de Moncton et présidente de la Société Nationale de l’Acadie.
«C’est notre institution phare. Elle est au centre de l’identité acadienne. Il faut absolument la protéger, soutient-t-elle. Il ne faut pas perdre de vue que cette université a une vocation particulière, elle existe avant tout par et pour les Acadiens.»
UNE NÉCESSAIRE MUTATION?
Pourtant, l’Université de Moncton accueille chaque année une part importante d’étudiants internationaux, celle-ci s’élevant à 23% pour la rentrée 2019-2020, selon les chiffres donnés par l’UdeM.
«L’institution s’éloigne de l’université communautaire acadienne», soutient Francis LeBlanc, vice-recteur adjoint à la recherche et doyen de la Faculté d’études supérieures à la recherche.
«Elle tend à devenir une université plus commune, plus ouverte sur l’international.»
Une mauvaise chose? Pas nécessairement selon Ibrahim Ouattara, qui estime que les deux positions ne sont pas inconciliables.
«L’Université est toujours et avant tout acadienne, mais c’est évident que l’institution a évolué depuis 50 ans, soutient le professeur de philosophie. Je pense que cette évolution est nécessaire si l’on ne veut pas être marginalisé.»
REDOUBLER D’EFFORTS
Les conférenciers étaient d’accord sur au moins une chose: l’U de M doit encore développer plusieurs aspects.
«Nous devrions mener une réflexion encore plus intense sur les questions sociales, telles que le féminisme ou les relations avec les Premières Nations, soutient Louise Imbeault. L’Université a le devoir d’être à l’avant-garde sur ces thématiques-là.»
Pour Pascale Rioux, présidente de la Fédération des étudiantes et étudiants du campus universitaire de Moncton, il faut en outre mieux entretenir le sentiment d’appartenance des étudiants.
«Ce sont les médecins ou avocats de demain, c’est par leurs voix que que va rayonner l’institution universitaire à l’avenir, affirme-t-elle. Il faut mieux travailler ce sentiment d’appartenance, pour qu’une fois diplômée, la personne puisse dire: j’ai étudié à l’Université de Moncton.»
Tous s’accordent à dire que beaucoup de travail reste à faire pour faire briller l’institution au niveau gouvernemental.
«Avec la réduction des financements, il y a des menaces qui pèsent sur cette université, souligne Ibrahim Ouattara. Nous devons malgré tout trouver les moyens d’être fidèles à notre vision de base.»
«C’est lassant, car cela fait cinquante ans que l’on existe, et l’on ne devrait pas être obligés de faire plus que les autres pour aller chercher du financement public, déplore de son côté la chancelière de l’Université. Mais force est de constater qu’en tant que francophones, nous devrons faire des efforts supplémentaires pour aller chercher ce financement, car personne ne viendra nous le servir sur un plateau.» ■