Brexit: le Canada a besoin de certitude
Des experts préviennent qu’un Royaume-Uni post-Brexit représentera pour les entreprises canadiennes une grande incertitude pour des milliards de dollars en échanges commerciaux et en investissements, indépendamment du résultat du vote que tiendra samedi le Parlement britannique.
Le résultat du vote à Londres est, en soi, loin d’être prévisible, le premier ministre britannique Boris Johnson éprouvant des difficultés à obtenir du soutien pour l’accord controversé qu’il a conclu jeudi avec l’Union européenne.
Cependant, des observateurs estiment que même une victoire de M. Johnson ne serait que le point de départ de nouvelles séries de négociations difficiles entre Londres et Bruxelles et, éventuellement, entre le Canada et le Royaume-Uni.
L’avocat Clifford Sosnow, partenaire chez Fasken spécialisé dans le commerce, estime que le principal avantage du plan de M. Johnson est de prévoir 14 à 36 mois de négociations pour conclure un nouvel accord commercial pour deux des plus importants marchés d’exportation et d’investissement du Canada.
«La principale préoccupation de tout le monde est l’instabilité, et l’instabilité de ne pas savoir quelles seront les relations commerciales, quelles en seront les relations d’investissement», a affirmé M. Sosnow, qui fournit des conseils stratégiques sur le commerce international et les investissements dans l’un des plus importants cabinets d’avocats en droit des affaires au Canada.
Il ajoute que les négociations ouvertes entre le Royaume-Uni et le Canada ne seraient autorisées qu’une fois que le Royaume-Uni aura quitté l’Union européenne, le 31 octobre, si le calendrier de Boris Johnson est adopté par la Chambre des communes britannique.
Le Royaume-Uni représente à lui seul l’une des cinq principales destinations des investissements du Canada et l’un des dix principaux marchés de biens et de services.
Il joue également le rôle de passerelle pour les entreprises canadiennes qui exercent des activités dans l’Union européenne, qui est le deuxième ou le troisième partenaire commercial du Canada après les États-Unis et la Chine, selon les données utilisées.
Achim Hurrelmann, politologue et codirecteur du centre des études européennes de l’Université Carleton, reconnaît que les enjeux sont importants, puisqu’environ 40% du commerce de marchandises du Canada avec l’Union européenne passe par le Royaume-Uni.
Sans un bon accord de libre-échange entre Bruxelles et Londres, les entreprises pourraient reconsidérer «si elles souhaitent rester au Royaume-Uni ou (...) se rendre à Dublin (Irlande), en France, en Allemagne ou aux Pays-Bas».
«Dans une certaine mesure, cela s’est déjà produit, mais j’ai l’impression que la plupart des entreprises sont restées immobiles en attendant de voir ce qui va se passer», a indiqué M. Hurrelmann.
En outre, il a noté que l’accord proposé par Johnson donnerait plus de temps pour régler les relations commerciales du Royaume-Uni avec l’Union européenne, mais également avec le Canada.
«Le Canada veut avoir un accord commercial avec le Royaume-Uni et le RoyaumeUni veut en avoir un aussi avec le Canada», a souligné M. Hurrelmann.
«Mais la question, bien sûr, est de savoir si nous aurons le temps de régler cela correctement ou si nous devrons être très pressés par un Brexit sans accord.» ■