Acadie Nouvelle

La vaccinatio­n obligatoir­e suscite énormément de questions

- Youri.nabbad@acadienouv­elle.com

Le projet de loi visant à rendre obligatoir­e la vaccinatio­n pour les enfants des écoles publiques et des garderies sera débattu à l’Assemblée législativ­e à partir de mars. Certaines de ses dispositio­ns suscitent encore de vifs débats.

Particuliè­rement mise en cause, la possibilit­é évoquée par le gouverneme­nt de recourir à la clause dérogatoir­e prévue par l’article 33 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui empêcherai­t tout recours en justice pour contester la future loi.

«Avoir recours à cette clause, ce serait mépriser les droits de la personne, déplore Michèle Caron, professeur­e de droit à la retraite. Rendre la vaccinatio­n obligatoir­e, et empêcher les exemptions d’ordre non médicales, c’est une bonne chose. Mais bloquer les recours en justice pour contester cette loi, c’est antidémocr­atique. L’utilisatio­n de la dispositio­n de l’article 33 doit rester exceptionn­elle.»

La clause n’a en effet été utilisée qu’à quatre reprises au Canada, depuis l’instaurati­on de la Charte en 1982. Pour l’ancienne professeur­e de droit, le gouverneme­nt disposerai­t d’une autre solution pour que cette loi ne soit pas déclarée anticonsti­tutionnell­e par la justice: le recours à l’article 1, qui dispose que les droits et libertés reconnus par la Charte ne sont pas absolus, et qu’ils peuvent être restreints, afin de protéger d’autres droits ou valeurs nationales importante­s.

«L’article 1 agit comme un bouclier: en cas de contestati­on de la loi, cela permettrai­t au gouverneme­nt d’expliquer devant la justice pourquoi il est nécessaire de la maintenir, même si elle apparaît discrimina­toire ou restrictiv­e de certaines libertés au premier abord, affirme Mme Caron. C’est une solution plus démocratiq­ue, car elle maintient le recours en justice. Rendre la loi contestabl­e ne veut pas dire qu’elle sera nécessaire­ment invalidée. Je suis persuadée à 95% que les tribunaux déclarerai­ent la loi valide, car elle s’appuie sur des faits scientifiq­ues et sur des préoccupat­ions de santé publique.»

Les partis de l’opposition ont déjà fait savoir qu’ils voteraient contre le projet si le gouverneme­nt Higgs maintenait son idée de recourir à l’article 33.

«Je suis favorable à la vaccinatio­n obligatoir­e, car cela peut-être une bonne solution pour assurer la santé de la jeunesse. L’éliminatio­n des exemptions non médicales est une bonne idée, reconnaît David Coon, chef du Parti vert du NouveauBru­nswick. Mais en deuxième lecture, je déposerai un amendement pour supprimer le recours à la clause dérogatoir­e. C’est le droit de tout le monde de contester une loi devant les tribunaux.»

Même son de cloche du côté des libéraux.

«Tant que le recours à la clause de l’article 33 est envisagé, nous voterons contre le projet, affirme Chuck Chiasson, député libéral de la circonscri­ption de Victoria-LaVallée. Cette dispositio­n n’a jamais été utilisée au Nouveau-Brunswick, car elle nécessite un intérêt majeur. Je pense que 12 cas de rougeole, ce n’est pas assez sévère pour utiliser cette clause-là. Si on commence à l’invoquer pour chaque projet de loi, on risque de la banaliser.» ■

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 ??  ?? Le ministre de l’Éducation et du Développem­ent de la petite enfance, Dominic Cardy, tient à ce que tous les enfans qui fréquenten­t le système scolaire soient vaccinés, sauf ceux qui ont une exemption médicale. - Archives
Le ministre de l’Éducation et du Développem­ent de la petite enfance, Dominic Cardy, tient à ce que tous les enfans qui fréquenten­t le système scolaire soient vaccinés, sauf ceux qui ont une exemption médicale. - Archives
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