Le retour au travail pour tous: une utopie
Ceux qui sont en hauts lieux s’imaginent toujours que le retour au travail se fait simplement, qu’il suffit de quelques mesures d’encouragement, et que le tour est joué. Cela va pour quelques-uns, mais pour un grand nombre, le retour au travail se solde par un échec. Ceux qui sont sur le terrain sont plus réalistes. Ils savent bien qu’il est impossible de forcer les temps.
Pensons d’abord à tous ceux dont la santé est précaire. Ils vont travailler, bourrés de médicaments, et parce qu’ils sont au ralenti, leur rendement est inférieur aux attentes du patron. Parfois, pour les punir, les patrons les dégagent et leur donnent un relevé d’emploi indiquant «départ volontaire», ce qui les prive ensuite des prestations d’emploi, alors qu’au fond, ils ont été contraints à quitter, malgré leur bonne volonté.
Prenons maintenant tous ceux qui ont des problèmes de santé mentale. Ce n’est pas l’envie au travail qui leur manque, mais leurs capacités qui sont limitées. Ils s’adaptent mal, suivent mal les directives et ils manquent d’attention et de concentration, ce qui provoque parfois des accidents. Les patrons n’en veulent pas non plus parce qu’ils craignent pour la sécurité de leurs autres employés.
Un autre groupe, enfin, n’a pas de problèmes de santé, mais suivre des cours de récupération scolaire et apprendre un métier les placent dans une situation intenable parce que durant ce temps, ils doivent assumer des frais additionnels de transport et de gardiennage, en plus de leurs frais de scolarité, et les dettes s’accumulent, ce qui leur cause un surcroît de stress qui les épuise complètement.
Un agriculteur québécois disait récemment que les gens locaux qui viennent travailler pour lui dans les champs ne tiennent pas le coup, tant le travail est éreintant.
Ceux qui croient dur comme fer que le travail est une panacée à tous les maux, parce qu’ils sont eux-mêmes de gros travailleurs, et qui prônent le fameux «si j’ai pu le faire, d’autres peuvent le faire aussi», auraient intérêt à faire preuve de réserve, plutôt que de moraliser et de pontifier.
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