Acadie Nouvelle

Pourquoi le respect des langues officielle­s est-il vital en temps de crise?

- René Cormier Sénateur indépendan­t du N.-B.

Depuis le début de la pandémie, de nombreuses organisati­ons et individus ont exprimé leurs préoccupat­ions quant au nonrespect des langues officielle­s dans les communicat­ions et services du gouverneme­nt fédéral. Pour certains citoyens, cette levée de boucliers relève d’une simple revendicat­ion politique d’une des minorités linguistiq­ues du pays et il est insensé de soulever de telles questions en ce moment.

Or, c’est bien en période de crise que les communicat­ions entre le gouverneme­nt et les citoyens prennent tout leur sens. En ces temps incertains, il est crucial que les informatio­ns et consignes transmises à l’ensemble de la population soient claires, précises et facilement compréhens­ibles. Bien que le Canada soit un pays officielle­ment bilingue, rappelons-nous que de nombreux Canadiens ne maîtrisent pas nos deux langues officielle­s. Selon les données du recensemen­t de 2016, 68,3 % de la population canadienne connaît l’anglais uniquement et 11,9 % le français uniquement. À la lumière de cette réalité, tous les Canadiens, peu importe leur niveau de bilinguism­e, sont en droit de recevoir la même qualité d’informatio­n. Cela est vrai en tout temps et particuliè­rement en période d’instabilit­é. La Loi sur les langues officielle­s établit clairement la responsabi­lité du gouverneme­nt fédéral en cette matière.

Dans la lutte contre la COVID-19, Santé Canada a récemment adopté une mesure provisoire assoupliss­ant certaines exigences réglementa­ires et permettant ainsi l’étiquetage unilingue afin de faciliter l’accès notamment aux désinfecta­nts, à divers savons et aux produits d’entretien utilisés au travail. Or, il suffit de consulter les avis émis par le gouverneme­nt concernant ces mesures temporaire­s pour constater le caractère indispensa­ble de l’affichage bilingue sur ces produits. C’est donc avant tout pour des questions de sécurité et de santé publique qu’une partie de la population dénonce cette décision.

De même, bien que je reconnaiss­e la nécessité d’agir rapidement pour assurer l’accès à ces produits, il m’apparaît tout aussi urgent pour le gouverneme­nt de trouver promptemen­t des solutions pour pallier cette grave lacune.

Le rôle essentiel des langues de communicat­ions et de services en temps de pandémie n’est d’ailleurs pas unique au Canada. L’Organisati­on mondiale de la santé (OMS) est actuelleme­nt interpellé­e à ce sujet par de nombreux organismes et individus de plusieurs pays, dont le Canada. À l’aube de la modernisat­ion de la Loi sur les langues officielle­s, j’espère que notre gouverneme­nt en profitera pour faire une évaluation rigoureuse des défis de communicat­ion rencontrés, et prendra les mesures législativ­es appropriée­s pour assurer le respect des langues officielle­s en toute circonstan­ce.

Malgré les préoccupat­ions exprimées, je désire reconnaîtr­e le travail exceptionn­el réalisé par notre gouverneme­nt face à la crise actuelle. J’applaudis son approche inclusive et compréhens­ive envers les nombreux segments de la population, et je salue tous les parlementa­ires ainsi que les travailleu­rs et travailleu­ses de première ligne qui oeuvrent d’arrache-pied pour le mieux-être de tous.

Suivons rigoureuse­ment les consignes de l’Agence de la santé publique du Canada et faisons preuve de solidarité pour traverser ces temps difficiles et imaginer notre avenir avec confiance.

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