LE RESTIGOUCHE SOUS HAUTE SURVEILLANCE
«On s’y attendait. On ne savait tout simplement pas quand et où ça allait se produire.»
Le PDG du Réseau de santé Vitalité, Gilles Lanteigne, l’avoue: l’éclosion de COVID-19 qui sévit actuellement dans le Restigouche est un épisode particulièrement inquiétant, possiblement le pire à ce jour depuis l’apparition du virus dans la province.
C’est que le coronavirus frappe directement au coeur des ressources médicales, une ressource indispensable en temps de pandémie.
Le foyer se trouve en effet au coeur même de l’Hôpital régional de Campbellton. Là, un médecin a contracté le virus lors d’un séjour à l’extérieur de la province pour des raisons personnelles et ne se serait pas mis en quarantaine à son retour.
En reprenant le travail, il a infecté à son tour patients et autres membres du personnel hospitalier, une spirale depuis difficile à contenir.
Dès lors, le réseau s’est mis en mode urgence.
Mercredi en après-midi, l’organisme a mis un processus en place pour retracer les contacts primaires et secondaires du professionnel en cause. Une soixantaine de tests de dépistage ont été effectués dans les heures qui ont suivi, dont un grand nombre au sein du corps médical.
Jeudi, au moins une centaine d’autres tests de dépistage étaient prévus, toujours auprès du personnel en santé, mais également des individus ciblés dans la communauté, soit des gens qui auraient pu être en contact avec l’un ou l’autre des porteurs du virus.
À compter de vendredi, des opérations blitz seront aussi mises de l’avant pour les citoyens n’ayant pas été directement en contact avec l’un des porteurs, mais qui désirent néanmoins en avoir le coeur net.
Pour ce qui est des employés testés, plusieurs ont été renvoyés à la maison dans l’attente de leur résultat.
En raison de la portée de l’éclosion, Vitalité a procédé à la fermeture de l’urgence de l’Hôpital régional de Campbellton. Ainsi, les ambulances sont directement redirigées vers l’hôpital de Bathurst (à 100 km de là).
Docteurs et infirmiers demeurent néanmoins en poste à Campbellton afin d’assurer une veille et de traiter les cas les plus instables avant leur transfert. Prévue d’abord pour une période d’une journée, la mesure vient d’être étendue jusqu’au début de la semaine prochaine.
«On se doit de s’assurer qu’il n’y a pas de contamination interne, que le risque est minime, car on ne voudrait pas répandre davantage le virus ni dans la communauté ni au niveau de notre personnel. C’est une précaution nécessaire», estime le PDG, notant qu’en raison des problèmes de manque de personnel qui afflige la région depuis plusieurs mois, l’hôpital n’a pas le luxe de perdre plusieurs soldats avant même le début du combat.
Selon M. Lanteigne, le degré de dangerosité de cette éclosion est très élevé. Un peu à l’image d’un feu de broussaille, celle-ci a le potentiel de se propager à très grande vitesse et de devenir hors de contrôle.
«Et c’est là qu’entrent en jeu les comportements individuels des citoyens. Ça peut facilement dégénérer si personne n’y met du sien. Cela dit, nous sommes en bien meilleure posture cette fois que nous l’étions lors de l’arrivée de la pandémie au pays. Penser à faire 500 dépistages en quelques jours dans la zone Restigouche en mars, c’était impensable. Aujourd’hui, c’est beaucoup plus réaliste. On a appris et on est mieux préparé. Mais ça demeure une situation qui est loin d’être idéale et que nous aurions aimé éviter», réagit M. Lanteigne.
Le PDG se dit préoccupé du fait qu’il s’est écoulé plusieurs jours avant de trouver la souche des deux premiers cas, ce qui fait que depuis, plusieurs personnes ont été en contact avec le virus et ont voyagé dans la communauté, voire même à l’extérieur des limites du Restigouche.
Chose certaine, le PDG ne cache pas sa déception de voir que cette éclosion est directement liée à un membre du corps médical.
«Ç’aurait pu être n’importe qui, mais c’est tombé sur un des nôtres. Alors oui, on est déçu. Et ça nous fait réaliser à quel point un comportement quelconque – que l’on croit anodin – peut avoir de lourdes conséquences», indique-t-il.
Pour ce qui est de la suite des choses, M. Lanteigne n’a pas voulu à ce stade s’avancer à savoir si des sanctions seraient imposées au docteur en question.
«Toutes les personnes qui travaillent pour nous ont des responsabilités et des obligations. Toute situation sera étudiée en fonction de ces responsabilités et obligations, et nous agirons en conséquence en temps et lieu», a-til précisé. ■