COMPORTEMENT NÉGLIGENT: LES CONSÉQUENCES
L’éclosion de COVID-19 dans le Restigouche soulève une question importante: à quelles conséquences juridiques s’exposent les personnes qui font fi des règles et qui contribuent à la propagation du virus? L’Acadie Nouvelle l’a posée à deux avocats.
Tous les projecteurs sont présentement braqués sur la région du Restigouche, théâtre d’une éclosion du nouveau coronavirus.
Deux nouveaux cas confirmés ont été rapportés dans le coin vendredi, ce qui porte à huit leur nombre total. Deux de ces personnes sont aux soins intensifs. Leur état est qualifié de «stable».
Ces huit cas – les seuls cas actifs au N.-B. - sont liés à un médecin de la région qui ne s’est pas auto-isolé à son retour d’un voyage au Québec. Il a ensuite vu des patients et travaillé à l’hôpital.
Jeudi, Blaine Higgs a rapporté que le dossier de professionnel de la santé a été transmis à la GRC afin de «déterminer exactement ce qui est arrivé, et si des accusations sont justifiées».
Quelles conséquences possibles dans un cas de ce genre?
L’avocat Mathieu N. Picard, du cabinet Fidelis de Moncton, a accepté de répondre à nos questions pour nous aider à comprendre ce qui peut se passer dans une telle affaire.
Il précise d’entrée de jeu qu’il ne souhaite pas commenter le cas du médecin de la région de Campbellton. Rappelons que ce dernier ne fait face à aucune accusation et que l’on a toujours peu d’information sur ce qui s’est produit.
«Je ne veux pas jeter des pierres à quelqu’un alors qu’on ne connaît pas encore la fondation factuelle de son dossier. Ce qu’on entend, ce sont des ragots et des commérages. Je ne vais pas commencer à juger cette personne-là sur la foi de racontars», dit-il.
Mais on peut tout de même se demander ce qui peut se produire lorsqu’une personne – qu’elle soit professionnelle de la santé ou pas – enfreint les règles mises en place par le gouvernement provincial afin de ralentir la propagation de la COVID-19.
«Si la personne sait qu’elle est porteuse d’un virus ou d’une condition contagieuse et qu’elle décide, sans égard à la santé et à sécurité d’autrui, décide de s’exposer à des gens; cette personne s’expose – à mon avis – à des conséquences sur le plan pénal, criminel et civil», affirme Me Picard.
On parle donc de la possibilité d’amendes, d’accusations criminelles ou de poursuites au civil. Ces dernières pourraient être intentées par des personnes ou des entités qui estiment avoir été lésées par les actions de l’individu.
Son confrère Mathieu S. Boutet, avocat criminaliste au cabinet Fowler Law P.C. de Moncton, abonde dans le même sens.
Il croit lui aussi – sans parler d’un cas en particulier – qu’une personne qui met des gens en danger en enfreignant les règles liées à la COVID-19 risque de faire face à de gros ennuis.
«Si un individu – sachant qu’il pourrait mettre quelqu’un à risque – ne prend pas les précautions nécessaires pour protéger d’autres individus, il pourrait faire face à des accusations criminelles assez sérieuses.»
Méfait public, négligence criminelle; plusieurs accusations assez graves pourraient être déposées dans un cas de ce genre.
Et pire encore si les actions de l’individu mènent à la mort d’un de ses concitoyens.
«Il pourrait même y avoir des accusations d’homicide involontaire. Si une personne décède, ça peut ouvrir des portes dangereuses pour la personne qui a choisi d’exposer d’autres personnes au virus», affirme Me Boutet. ■
«Si quelqu’un, par son comportement négligent, occasionne des pertes économiques à des gens qui ont été exposés (au virus), cette personne-là pourrait s’exposer à une poursuite civile qui vise à récupérer l’argent perdu.»