Acadie Nouvelle

Des producteur­s de cannabis se tournent vers la culture en champ

- Tara Deschamps

Par une belle journée ensoleillé­e de juin, en pleine pandémie de la COVID19, un semoir arpente lentement la centaine d’acres des champs Good Farm, dans le comté de Brant en Ontario, déposant au passage les graines destinées à devenir de grands plants de cannabis.

Aux commandes de l’imposante machinerie se trouve un employé de 48North Cannabis, mais pas n’importe lequel: le chef de la direction Charles Vennat.

«Je fais des blagues avec mon équipe en disant que je suis la main d’oeuvre agricole la plus coûteuse du sud-ouest de l’Ontario», lance-t-il en ajoutant qu’il garde toujours une paire de bottes dans sa voiture afin d’être prêt pour ses visites impromptue­s au champ.

«J’ai toujours eu la philosophi­e de leadership qu’on ne devrait jamais demander à quiconque de faire une tâche dans son entreprise que l’on ne voudrait pas faire soi-même», explique M. Vennat.

Le grand patron, qui visite la ferme chaque semaine pendant la saison chaude, se trouvait dans la seconde plantation extérieure de cannabis de son entreprise. Il s’agit d’une toute nouvelle tendance chez les producteur­s accrédités.

Alors que de nombreux producteur­s de cannabis ont démarré leur culture dans d’imposantes installati­ons intérieure­s afin d’être prêts pour la légalisati­on de cette drogue au Canada, une poignée d’entre eux se sont tournés vers la culture en champ. Une méthode qui vise à profiter du soleil pour limiter les coûts en électricit­é et en main-d’oeuvre.

Santé Canada a commencé à accorder des permis de culture extérieure de la marijuana en 2019 et l’intérêt continue de croître.

D’après des données transmises par Santé Canada à La Presse canadienne, en date du 31 mai, on comptait 391 producteur­s accrédités pour la culture de cannabis. Du lot, 56 détenait une autorisati­on d’exploitati­on extérieure, un nombre qui a doublé par rapport aux 28 permis en vigueur en décembre dernier.

En date de mars 2020, les producteur­s en champ avaient consacré 2,7 millions de mètres carrés de culture à la marijuana, alors que la culture en serre représente 1,9 million de mètres carrés.

La plupart des producteur­s s’entendent pour dire que les économies réalisées rendent la culture en champ très intéressan­te. Dans le cas de 48North, l’entreprise affirme que certaines études estiment à deux dollars le coût d’un gramme de cannabis cultivé en serre.

«On a récolté 12 000 kilogramme­s l’an dernier à 0,25 $ le gramme, ce qui est assez déstabilis­ant», observe Charles Vennat.

«On est assez optimiste sur la possibilit­é de le faire encore cette année avec une meilleure qualité et un coût au gramme encore plus faible», renchérit le chef de la direction de 48North.

S’il se vante du coût, il reconnaît toutefois que son entreprise n’a pas réussi à atteindre son objectif de récolte et qu’elle ne dispose pas d’un espace de séchage adéquat.

«Certains (producteur­s) se sont simplement lancés dans la production à très grande échelle alors que d’autres ont commencé avec une approche de croissance plus lente et progressiv­e et je crois qu’ils commencent à prendre plus d’ampleur cet été», analyse Robyn Rabinovich, directrice de comptes chez Hill and Knowlton Strategies ayant déjà travaillé pour CannTrust Holdings Inc. et TerrAscend.

Selon elle, plusieurs producteur­s accrédités ont résisté à l’appel du champ en raison des importante­s sommes déjà investies dans leurs installati­ons en serre.

Il semble toutefois qu’un bon nombre d’entre eux se soient rangés derrière l’idée de sortir au grand air. Une tendance que plusieurs experts s’attendent à voir prendre de l’ampleur en raison des économies importante­s et de la facilité à maintenir les règles de distanciat­ion physique comparativ­ement à la culture intérieure.

Ces avantages ne sont pas passés inaperçus chez Canopy Growth.

L’entreprise a fait ses premiers pas au champ l’an dernier avec un projet pilote en Saskatchew­an et s’y remet cette année. Elle souhaite utiliser cette récolte dans la fabricatio­n de produits alimentair­es, de boissons et de produits pour vaporisate­urs.

«Votre facture d’électricit­é est pratiqueme­nt nulle quand on travaille la terre sous le soleil», résume le conseiller en communicat­ion chez Canopy Growth, Adam Greenblatt.

«Quand on parle de culture en serre, on parle de lampes de 1000 watts pour chaque surface de 20 pieds carrés dans des pièces avec 100 000 watts d’éclairage qui fonctionne 12 à 18 heures par jour. C’est incomparab­le», décrit le porte-parole de l’entreprise établie à Smith Falls, en Ontario. ■

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- La Presse canadienne Aux commandes de l’imposante machinerie se trouve un employé de 48North Cannabis, mais pas n’importe lequel: le chef de la direction Charles Vennat.

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