LA COVID-19 FAIT MAL AUX FINANCES DES MUNICIPALITÉS
Les pertes sont maintenant estimées à 16 millions $ et continueront de grimper, dit l’AFMNB
Plus le temps file, plus la COVID-19 étouffe les finances des municipalités du Nouveau-Brunswick. Les prévisions de 10,5 millions $ de pertes émises en avril passent maintenant à 16 millions $ d’ici la fin de 2020, selon l’Association francophone des municipalités du N.-B. Et il s’agit là du meilleur des scénarios, laisse tomber le DG Frédérick Dion. Car le pire pourrait très bien saigner à blanc plusieurs villes et villages en 2022.
L’organisation a récemment questionné les communautés incorporées sur les impacts du coronavirus sur leurs budgets. Les réponses n’ont pas été très rassurantes.
À elles seules, les villes de Grand-Sault et de la Municipalité régionale de Tracadie calculent un manque totalisant plus d’un million $ si rien n’est fait. Moncton a calculé un manque de revenus de 3,8 millions $ ce printemps, bien au-delà des économies de 1,9 million $ grâce à la réduction forcée de ses services.
Les calculs de l’AFMNB ont été effectués dans un contexte de déconfinement progressif. Cette période de relâchement contrôlé est parvenue à réduire cette estimation, qui aurait pu atteindre les 25 à 30 millions $ sans cela à son avis. Mais ce portrait pessimiste n’est pas totalement exclu, prévient M. Dion. Il craint l’arrivée d’une deuxième vague du virus et d’un retour obligé aux mesures sévères de confinement.
«Dans les meilleures des circonstances, nous avons un scénario de pertes de 16 millions $. Les mesures strictes imposées par la Santé publique ont ce qui a coûté le plus cher. Heureusement, la réouverture de certains services depuis quelques semaines et un retour partiel à la normale ont évité un trou encore plus creux. Sauf que si nous revenons dans un contexte de mars, avril et mai, on atteindra peut-être 20, 25 ou même 30 millions $», réfléchit le DG de l’AFMNB.
Comme la Loi sur les municipalités accorde un délai maximal de deux ans aux villes et villages pour effacer un déficit, M. Dion en vient rapidement à la conclusion que 2022 fera particulièrement mal aux contribuables. Il s’attend à des réductions notoires de services et des hausses considérables des taxes foncières à plusieurs endroits.
«Prenons l’exemple de Grand-Sault. Si elle fait un déficit de 500 000$, elle peut le reporter sur son budget jusqu’en 2022.
Cela veut dire que d’ici là, elle devra chercher des revenus pour l’effacer. En 2021, elle devra commencer le travail en coupant dans des services, en montant les taxes et en pigeant probablement dans son fonds de réserve qu’elle gardait pour des besoins urgents en infrastructures», poursuit M. Dion.
«LA CLAQUE EN 2022»
Mais ce n’est pas tout, ajoute-t-il. Rien ne dit que la situation économique sera meilleure dans deux ans, ce qui engendrerait donc une deuxième crise municipale, a-t-il bien peur.
«Les revenus d’impôt foncier, qui représentent en moyenne 90% de l’argent des municipalités, ne monteront pas. La construction sera en baisse, tout comme le marché immobilier. Les hausses de l’évaluation foncière ne seront plus aussi généreuses. Comme on le sait tous, les municipalités établissent leurs budgets à l’aide de projections. Mais elles ne tiennent plus la route avec la COVID-19. L’année 2021 ne sera pas si pire, mais les municipalités vont manger la claque en 2022», voit-il dans un avenir rapproché.
Dans ce contexte déjà très ardu, M. Dion déplore le manque de compréhension du gouvernement Higgs. Il refuse toujours d’annoncer une quelconque forme d’aide aux municipalités de la province afin de traverser la crise.
«Nous avons une fin de non-recevoir de Fredericton. Il n’y a même pas de discussions. M. Higgs ferme la porte. Ça crée un climat très peu constructif, face à un gouvernement centralisateur qui ne fait qu’à sa tête et qui ne consulte personne. Il ne montre pas beaucoup d’empathie devant nos difficultés. Il nous dit de nous arranger avec nos troubles. Mais nous demeurons optimistes», estime M. Dion, qui propose notamment un étalement plus long de l’effacement d’un déficit municipal compte tenu de la situation exceptionnelle.
Lundi, des maires des plus grandes villes de l’Ontario ont requis un financement d’urgence des gouvernements fédéral et provinciaux pour couvrir les coûts liés à la pandémie.
Le regroupement affirme qu’Ottawa et les provinces doivent agir dès maintenant pour que les citoyens n’aient pas à subir des hausses d’impôts fonciers, des réductions de services et des augmentations de frais d’utilisation.
Le groupe réclame depuis plusieurs mois au moins 10 milliards $ d’aide financière pour les municipalités de tout le pays. ■