Un président... malade
J’ai beau éviter de parler trop souvent du locataire actuel de la Maison-Blanche, tant son comportement erratique m’horripile, mais il y a des cas de force majeure qui nous obligent à parler de lui. Son hospitalisation pour cause de contamination au mozusse de virus en est un. Zut!
Depuis une semaine, il aura réussi, encore une fois, à accaparer la une des médias internationaux et à effrayer la planète sans nous laisser le temps de reprendre notre souffle.
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Premièrement, il a participé, mardi dernier, à un débat «présidentiel» calamiteux où il a laissé libre cours à son mépris pour toute règle, à son mépris pour son adversaire et à son mépris pour ses concitoyens. On a parlé d’horreur télévisuelle, de rixe monstrueuse et même de débat obscène!
Jamais n’aura-t-on vu un président américain se comporter publiquement avec un tel ostensible mépris pour la fonction qu’il occupe, démontrant par l’absurde jusqu’à quel point il n’est pas digne du poste prestigieux dont il a la charge.
Deuxièmement, l’annonce, dans la nuit de jeudi à vendredi, de sa contamination par ce mozusse de virus qui tient déjà la planète sur le qui-vive depuis le début de l’année.
Après avoir ridiculisé à plusieurs reprises les mesures de distanciation sociale et de précautions sanitaires; après avoir ridiculisé son adversaire qui, lui, n’hésite pas à porter un masque pour se protéger et protéger les autres; après avoir ridiculisé les données scientifiques qui évoluent à mesure qu’évolue leur compréhension du virus et de ses effets pernicieux, il s’est retrouvé à l’hôpital!
Et rendu à l’hôpital, il aurait apparemment manigancé avec son médecin pour présenter un tableau lénifiant de la situation, amenant ce dernier à tenir gauchement quelques conférences de presse où l’information retenue en disait plus que les paroles de son médecin. Bref, des conférences de presse aussi ridicules qu’inutiles.
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Évidemment, il fallait s’y attendre: l’annonce de sa contamination et de son hospitalisation a engendré son lot de théories conspirationnistes. Certains y voient une mise en scène de plus pour redorer le blason du président.
Certes, pas besoin d’être astrologue patenté pour saisir que depuis quelque temps son ciel astral est magané. Les sondages nationaux le donnent perdant aux prochaines élections et, pire, il tire de la patte dans plusieurs États clés qu’il devra gagner pour faire le plein de voix du collège électoral.
Dans ce contexte, selon une de ces théories, un membre de son entourage, plus machiavélique que les autres, pourrait avoir eu ce qu’il croyait être un éclair de génie: l’aura d’un Trump atteint comme le commun des mortels par ce mozusse de virus susciterait probablement un élan de sympathie générale; suffisamment de sympathie en tout cas pour faire oublier sa désastreuse performance au débat et ses ratés de campagne, l’état d’une économie mise à mal depuis des mois, et l’indigence des mesures fédérales proposées pour endiguer cette pandémie.
Et ce serait pour lui l’occasion rêvée d’adopter à sa sortie de l’hôpital, mine de rien, et s’il en est capable, une posture plus en phase avec celle du monde scientifique à l’égard du virus et de la pandémie.
Qui sait, peut-être pourrait-il même se défiler «honorablement» devant ses deux autres débats prévus avec son adversaire démocrate Joe Biden sans qu’on puisse vraiment le lui reprocher, étant donné son état de santé?
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Si c’est le cas, si ses conseillers et autres affidés on réellement concocté un tel scénario, le moins qu’on puisse dire c’est que l’affaire a fait patate, car les cafouillages de la Maison-Blanche et des intervenants médicaux autour de lui depuis son hospitalisation ont plutôt amené les médias à porter leur attention sur le fait que l’attitude désinvolte du président, depuis sa contamination et avant l’annonce de cette contamination, pourrait avoir mis en danger plusieurs personnes de son entourage.
De plus, bizarrement, malgré sa maladie, dimanche après-midi Trump s’est même payé une balade en VUS blindé, officiellement pour «réconforter» ses admirateurs ameutés en face de l’hôpital, bien qu’il y ait fort à parier que ce fut plutôt pour réconforter l’ego d’un homme obsessionnellement en quête d’adulation.
Comme il se doit, cette escapade a soulevé moult commentaires marqués d’incrédulité et de perplexité de la part des médias, alors que des médecins ont parlé d’irresponsabilité et que des agents des services secrets faisaient part de leur consternation!
Étonnamment, maintenant qu’on croit qu’il était vraiment malade, la Maison-Blanche fait des pieds et des mains pour qu’il apparaisse moins malade qu’on a voulu nous le faire croire. Incroyable!
Finalement, la vague de sympathie espérée, si tant est que la chose ait été organisée avec le gars des vues, aura provoqué plutôt une vague d’indignation tous azimuts!
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Peu importe son état de santé réel, on se doute bien qu’il recevra des soins haut de gamme, et on le souhaite, comme on le souhaiterait pour tout le monde.
Entre-temps, par son inconscience et son insouciance, il aura amené nombre de ses partisans à négliger les mesures sanitaires préconisées par les autorités de tout acabit, augmentant les risques de contagion communautaire dans la population. Méchant beau gâchis.
Un beau gâchis qui vient s’ajouter à tous les autres gâchis qu’on peut lui attribuer depuis son élection et qui n’ont de cesse de perturber et de polluer le climat politique américain et international.
En finira-t-on jamais avec cet hurluberlu propulsé à la présidence après avoir perdu le vote populaire (celui qui devrait normalement compter en démocratie), en raison d’un système aussi complexe que désuet, le collège électoral, qui ne se justifie plus tellement à notre époque où la technologie favorise une transparence à toute épreuve?
Naturellement, malgré ses frasques et son incurie, on lui souhaite sincèrement un prompt rétablissement, en souhaitant tout aussi sincèrement que les Américains aient la sagesse de changer de président en novembre prochain!
Car, de toute évidence, le président actuel est… malade.
Han, Madame? ■