Acadie Nouvelle

RETOUR À MISCOU DU ROI DES OCÉANS

- Réal Fradette real.fradette@acadienouv­elle.com

Le thon rouge, le «roi des océans», jouit d’un vif regain d’intérêt au large de l’île Miscou. Les prises spectacula­ires se multiplien­t. Les marins de la Péninsule acadienne s’en donnent à coeur joie, tout comme ceux de la Gaspésie. La demande pour ce poisson apprécié pour sa chair grasse et tendre bondit sur les marchés locaux. En tartare ou en steak frites, il n’est plus réservé à la fine gastronomi­e ou encore aux tables des Japonais.

«C’est la plus belle pêche qu’il y a!» James Stewart est catégoriqu­e. Le pêcheur de Miscou sait de quoi il en retourne quand il va taquiner le monstre. Tendre la ligne avec sa canne robuste et sentir mordre ce mastodonte qui peut parfois dépasser 1000 livres n’a pas d’égal à ses yeux. Chaque fois qu’il sort en mer, il sait que l’affronteme­nt à venir est assurément gage de toute une bagarre.

Ça nécessite de bons bras - il peut compter sur ceux de son frère John - et beaucoup de patience à tirer et à laisser aller, le temps que le thon, bien ferré à l’hameçon, s’épuise et soit ramené près du bateau.

Cette bataille peut prendre une heure, une heure trente, des fois plus. Son collègue Raymond Lanteigne, aussi de Miscou, a déjà travaillé pendant cinq heures et demie pour amener une prise près de la coque, raconte-til. Malheureus­ement, il l’a perdue au dernier instant.

Et ce n’est pas une histoire de pêche, assure-t-il. Elle a été corroborée par Robert Noël, sommelier et restaurate­ur qui aime bien faire des excursions en mer.

«Oui, pendant cinq heures et demi, confirme M. Lanteigne. On l’a amené jusqu’au bateau. On l’a vu, c’en était un gros, peut-être 800 à 900 livres. Quand on a voulu le gaffer (l’accrocher par la tête), il a cassé la ligne et on l’a vu partir tranquille­ment. On était bien déçu, mais après, on était content», relate celui qui a été initié par son oncle Odilon il y a plus de 40 ans et qui a repris cette tradition depuis quatre ans.

«C’est tout un feeling à attraper. C’est dur à décrire», poursuit James Stewart, qui en a capturé une dizaine cette saison.

Pendant longtemps, dans les années 1960 et 1970, des thons de plus de 1000 livres étaient sortis de la mer dans ce secteur. Un record Guinness d’un thon de 1351 livres a même été homologué à Miscou.

Il y avait aussi un festival en son honneur. C’était l’endroit par excellence pour celui qui voulait vivre toute une partie de pêche. Le père de James, Rhéal, a amené en mer de grandes célébrités, dont Maurice Rocket Richard.

En 1975, Gordie Howe, M. Hockey en personne et fabuleux ailier des Red Wings de Detroit, et Gary Unger, attaquant des Blues de St. Louis, sont aussi venus faire une excursion dans le coin avec le navire de Victor Lanteigne, de Caraquet. Ils en avaient attrapé un de près de 1000 livres.

Ensuite, la rareté de l’espèce dans les eaux de la baie des Chaleurs, menacée par la surpêche (les chercheurs estiment que 74% de la biomasse a disparu entre 1955 et 2007 en Atlantique Nord), et sa difficulté à en commercial­iser la viande ailleurs qu’en fine cuisine et au Japon (qui avale près de 98% du poisson capturé) a réduit considérab­lement l’intérêt à compter des années 1990.

Il y avait aussi la présence du mercure dans la viande qui pouvait faire peur. Deux thons sur trois présentaie­nt un taux supérieur à la norme permise. ■

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John Stewart remonte à bord un thon au large de l’île Miscou. - Gracieuset­é

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