Vingt ans déjà
Il y a vingt ans, 139 femmes du Nouveau-Brunswick sont montées à bord de trois autobus en partance pour New York pour la Marche mondiale des femmes afin d’exhorter les représentants des pays membres à s’attaquer à la pauvreté et à la violence contre les femmes.
Cet événement prit naissance à la Conférence mondiale des femmes à Beijing en 1995 et c’est la Fédération des femmes du Québec sous la présidence de Françoise David qui en assuma la responsabilité. En 2000, ce projet regroupait 6000 groupes représentant 161 pays. Le 17 octobre, plusieurs milliers de femmes se trouvaient devant les Nations Unies à New York pour y rencontrer le secrétaire général et lui présenter les 5 millions de signatures recueillies dans le monde entier dont 30 000 provenaient du Nouveau-Brunswick. En route vers New York, nous nous sommes arrêtés à Fredericton, Montréal et Ottawa pour porter le même message aux gouvernements fédéral et provinciaux. Outre l’élimination de la violence, notre pétition demandait l’adoption d’une législation visant à éliminer l’iniquité salariale – principale cause de la pauvreté des femmes.
Cet événement a été le catalyseur de la création du Groupe de travail de la ministre sur la violence faite aux femmes, inauguré par le premier ministre Bernard Lord. Son objectif était d’explorer les questions de violence conjugale sous la direction de la ministre responsable de la condition féminine, Margaret Ann Blaney. Cette initiative a donné lieu à de nombreuses recommandations importantes, dont la création de la Direction de l’égalité des femmes. Conformément aux recommandations du Groupe de travail, de nombreux objectifs importants ont été réalisés, mais il reste encore beaucoup à faire en matière de prévention de la violence conjugale. À l’heure actuelle, dans le contexte de la pandémie, les homicides domestiques ont augmenté dans l’ensemble du pays, y compris dans le Canada atlantique. Tous les six jours, une Canadienne est tuée par son partenaire intime. Pour sa part, le Nouveau-Brunswick affiche le taux le plus élevé de violence conjugale signalée par la police dans le Canada atlantique. Environ 70 % des décès surviennent dans les petites villes ou les régions rurales de la province. Nous attendons avec impatience le jour où nous vivrons dans une société exempte de violence fondée sur le sexe.
Quant à l’élimination de la pauvreté, l’Union des femmes pour l’équité salariale, fondée par la Fédération des dames d’Acadie, se consolide et devient la Coalition pour l’équité salariale du Nouveau-Brunswick. Cet organisme poursuit depuis 20 ans le même objectif, soit l’équité salariale pour l’ensemble des travailleuses des secteurs public et privé. Le secteur public a obtenu un résultat positif avec l’adoption de la Loi de 2009 sur l’équité salariale sous le gouvernement libéral de Shawn Graham. Toutefois, le Nouveau-Brunswick n’a toujours pas de loi sur l’équité salariale pour le secteur privé, où travaillent plus de 65 % des femmes sur le marché du travail.
Vingt ans plus tard, les femmes et les filles continuent de subir le sexisme, la violence, l’inégalité salariale et d’autres inégalités entre les sexes. Il est essentiel d’intensifier les efforts pour parvenir à l’équité entre les sexes. De nombreux rapports publiés depuis la pandémie ont souligné qu’une perspective féministe et une analyse comparative selon le genre doivent être réalisées pour toutes les politiques et tous les budgets futurs dans le contexte canadien.
En réfléchissant sur les 20 dernières années, cela permet de comprendre à quel point le chemin vers le changement est long et difficile. Cependant, nous sommes reconnaissantes envers ces femmes courageuses qui ont travaillé et continuent de travailler en faveur du changement et ne se contentent pas du statu quo. Ne renonçons jamais à l’équité entre les genres, car elle est indispensable non seulement pour les femmes et les filles, mais pour l’ensemble de la société. ■