Violence sexuelle: les infirmières au soutien des victimes en première ligne
Elles offrent du réconfort et une écoute bienveillante aux jeunes et aux adultes ayant subi des actes de violence à caractère sexuel. L’Acadie Nouvelle donne aujourd’hui la parole à ces intervenantes de première ligne au service des victimes.
C’est d’abord à l’hôpital que sont prises en charge les victimes d’agressions sexuelles, de violences conjugales et d’autres abus par les 80 infirmières du programme SANE (Sexual Assault Nurse Examiners).
Ces professionnelles de la santé se rendent disponibles sur appel et réalisent les prélèvements médico-légaux qui pourront être utilisés dans le cadre des procédures judiciaires.
Le service est accessible dans 12 hôpitaux, dans toutes les régions de la province.
«La porte d’entrée, c’est la salle d’urgence. La personne doit signaler à l’infirmière de triage qu’elle a été victime. Celle-ci ne posera pas de question sur l’événement pour éviter de la victimiser à nouveau en lui faisant répéter l’histoire trop souvent», explique Roxanne Paquette, qui est la coordonnatrice provinciale des infirmières examinatrices des cas d’agressions sexuelles.
La victime sera alors accompagnée dans un salon privé où une infirmière du programme viendra la rencontrer. La consultation commence par un entretien et une série de questions au sujet de l’agression.
La professionnelle de santé effectue ensuite, avec l’accord de la personne, un examen physique pour déceler toute blessure, et des tests de dépistage des infections transmissibles sexuellement et par le sang.
Elle passe alors aux prélèvements médico-légaux. Les échantillons d’ADN peuvent être récoltés dans la bouche, sur la peau, sous les ongles, dans les cheveux, au niveau des organes génitaux, etc. Si la personne y consent, le tout est remis à un agent de police qui l’acheminera vers un laboratoire judiciaire.
«Les personnes de 19 ans et plus ont le choix de contacter ou pas la police», souligne Roxanne Paquette. Les échantillons pourront être conservés pendant six mois si la victime ne souhaite pas signaler l’agression immédiatement
Si les appels peuvent survenir à n’importe quel moment, les infirmières sont davantage sollicitées les samedi, dimanche et lundi, mentionne celle qui supervise l’équipe.
«Dans les villes universitaires, on voit une augmentation en début et en fin d’année. Il y a aussi plus de cas pendant le temps des Fêtes, ou lors d’événements comme le Super Bowl ou la Coupe Stanley.»
UN SOUTIEN ÉMOTIONNEL ESSENTIEL
Le travail de la professionnelle de santé va bien au-delà d’un rôle légal. Il s’agit avant tout d’aider la personne à surmonter l’événement traumatique.
«Nous ne sommes pas des enquêteurs, nous ne sommes pas là pour porter des accusations. Notre rôle est d’écouter, de ne pas juger et de laisser nos préjugés de côté», rappelle la coordonnatrice.
Les infirmières du programme SANE peuvent prendre tout leur temps auprès de leur patient, un luxe dans la profession. C’est ce qui, aux yeux de Roxanne Paquette, rend leur mission si valorisante.
«Nous ne sommes pas pressées par le système! On retourne à l’essence des soins infirmiers. Quand elles arrivent à l’hôpital, les personnes sont tellement démolies, notre travail c’est aussi de leur redonner le contrôle et de les aider à entamer le processus de guérison. Tu fais une réelle différence dans leur vie.»
Les infirmières s’assurent de diriger la personne vers les services aux victimes disponibles dans leur communauté. Elles reprennent systématiquement contact avec les patient(e)s quelques jours après la consultation, note Mme Paquette.
«Même si la fenêtre de prélèvement est dépassée, il ne faut pas oublier qu’il y a un processus de guérison à entamer, insiste-telle. On doit faire comprendre aux partenaires, à la justice et aux corps policiers, que ce n’est pas parce qu’il n’y a pas de preuve qu’il ne faut pas rencontrer ces patients.»
Les membres de l’équipe interviennent aussi en milieu scolaire, pour parler du sexting, de l’hypersexualisation, du consentement et de l’importance des relations saines.
«On espère amener les jeunes à être plus à l’aise de refuser ce qu’ils ne veulent pas, à mieux identifier les violences sexuelles, poursuit la coordinatrice. On rencontre surtout des élèves à partir de la 4e année en montant. C’est dommage, il y aurait de l’enseignement à faire dès la maternelle. Le consentement c’est important aussi pour les tous petits.» ■