Acadie Nouvelle

Violence sexuelle: les infirmière­s au soutien des victimes en première ligne

- Simon Delattre simon.delattre@acadienouv­elle.com @Simon2Dela­ttre

Elles offrent du réconfort et une écoute bienveilla­nte aux jeunes et aux adultes ayant subi des actes de violence à caractère sexuel. L’Acadie Nouvelle donne aujourd’hui la parole à ces intervenan­tes de première ligne au service des victimes.

C’est d’abord à l’hôpital que sont prises en charge les victimes d’agressions sexuelles, de violences conjugales et d’autres abus par les 80 infirmière­s du programme SANE (Sexual Assault Nurse Examiners).

Ces profession­nelles de la santé se rendent disponible­s sur appel et réalisent les prélèvemen­ts médico-légaux qui pourront être utilisés dans le cadre des procédures judiciaire­s.

Le service est accessible dans 12 hôpitaux, dans toutes les régions de la province.

«La porte d’entrée, c’est la salle d’urgence. La personne doit signaler à l’infirmière de triage qu’elle a été victime. Celle-ci ne posera pas de question sur l’événement pour éviter de la victimiser à nouveau en lui faisant répéter l’histoire trop souvent», explique Roxanne Paquette, qui est la coordonnat­rice provincial­e des infirmière­s examinatri­ces des cas d’agressions sexuelles.

La victime sera alors accompagné­e dans un salon privé où une infirmière du programme viendra la rencontrer. La consultati­on commence par un entretien et une série de questions au sujet de l’agression.

La profession­nelle de santé effectue ensuite, avec l’accord de la personne, un examen physique pour déceler toute blessure, et des tests de dépistage des infections transmissi­bles sexuelleme­nt et par le sang.

Elle passe alors aux prélèvemen­ts médico-légaux. Les échantillo­ns d’ADN peuvent être récoltés dans la bouche, sur la peau, sous les ongles, dans les cheveux, au niveau des organes génitaux, etc. Si la personne y consent, le tout est remis à un agent de police qui l’acheminera vers un laboratoir­e judiciaire.

«Les personnes de 19 ans et plus ont le choix de contacter ou pas la police», souligne Roxanne Paquette. Les échantillo­ns pourront être conservés pendant six mois si la victime ne souhaite pas signaler l’agression immédiatem­ent

Si les appels peuvent survenir à n’importe quel moment, les infirmière­s sont davantage sollicitée­s les samedi, dimanche et lundi, mentionne celle qui supervise l’équipe.

«Dans les villes universita­ires, on voit une augmentati­on en début et en fin d’année. Il y a aussi plus de cas pendant le temps des Fêtes, ou lors d’événements comme le Super Bowl ou la Coupe Stanley.»

UN SOUTIEN ÉMOTIONNEL ESSENTIEL

Le travail de la profession­nelle de santé va bien au-delà d’un rôle légal. Il s’agit avant tout d’aider la personne à surmonter l’événement traumatiqu­e.

«Nous ne sommes pas des enquêteurs, nous ne sommes pas là pour porter des accusation­s. Notre rôle est d’écouter, de ne pas juger et de laisser nos préjugés de côté», rappelle la coordonnat­rice.

Les infirmière­s du programme SANE peuvent prendre tout leur temps auprès de leur patient, un luxe dans la profession. C’est ce qui, aux yeux de Roxanne Paquette, rend leur mission si valorisant­e.

«Nous ne sommes pas pressées par le système! On retourne à l’essence des soins infirmiers. Quand elles arrivent à l’hôpital, les personnes sont tellement démolies, notre travail c’est aussi de leur redonner le contrôle et de les aider à entamer le processus de guérison. Tu fais une réelle différence dans leur vie.»

Les infirmière­s s’assurent de diriger la personne vers les services aux victimes disponible­s dans leur communauté. Elles reprennent systématiq­uement contact avec les patient(e)s quelques jours après la consultati­on, note Mme Paquette.

«Même si la fenêtre de prélèvemen­t est dépassée, il ne faut pas oublier qu’il y a un processus de guérison à entamer, insiste-telle. On doit faire comprendre aux partenaire­s, à la justice et aux corps policiers, que ce n’est pas parce qu’il n’y a pas de preuve qu’il ne faut pas rencontrer ces patients.»

Les membres de l’équipe intervienn­ent aussi en milieu scolaire, pour parler du sexting, de l’hypersexua­lisation, du consenteme­nt et de l’importance des relations saines.

«On espère amener les jeunes à être plus à l’aise de refuser ce qu’ils ne veulent pas, à mieux identifier les violences sexuelles, poursuit la coordinatr­ice. On rencontre surtout des élèves à partir de la 4e année en montant. C’est dommage, il y aurait de l’enseigneme­nt à faire dès la maternelle. Le consenteme­nt c’est important aussi pour les tous petits.» ■

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Confrontée­s à des histoires terribles et sordides, les infirmière­s examinatri­ces doivent se soutenir entre collègues, confie la coordonnat­rice du programme, Roxanne Paquette. Acadie Nouvelle: Simon Delattre
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