Acadie Nouvelle

DES LOCATAIRES ABANDONNÉS À EUX-MÊMES

- Cédric Thévenin cedric.thevenin@acadienouv­elle.com

Le professeur de droit à l’Université de Moncton, Yves Goguen qualifie d’archaïque la Loi sur la location des locaux d’habitation du NouveauBru­nswick. Le Parti libéral et le Parti vert ont demandé sa mise à jour après des cas d’augmentati­ons de loyer très importante­s.

«La Loi est inefficace quand il y a très peu de logements financés par l’État, juge M. Goguen à propos des logements sociaux et abordables. Quand ce sont les conditions du marché qui s’appliquent, les profits deviennent plus importants que la dignité humaine.»

Le taux d’inoccupati­on des appartemen­ts au Nouveau-Brunswick était de 2,6% en 2019, soit plus de deux fois inférieur à celui de 2016, selon la Société canadienne d’hypothèque et de logements (SCHL).

Cette proportion est considérée comme basse sous 3%, d’après le professeur adjoint de l’Université McGill (à Montréal) David Wachsmuth (cité par le Telegraph Journal).

Le ministre du Développem­ent social, Bruce Fitch a néanmoins plaidé pour le libre marché à la fin octobre. Il a aussi déclaré que la réglementa­tion des loyers n’était pas à l’ordre du jour.

Et ce, même si Radio-Canada a rapporté des augmentati­ons de loyer de plus de 40% à Moncton.

AUGMENTATI­ON DES LOYERS NON RÉGULÉE

Au Nouveau-Brunswick, les propriétai­res ont le droit de les augmenter comme ils le veulent, à condition de prévenir leurs locataires avec trois mois de préavis pour ceux qui ont un bail à l’année et avec deux mois de préavis pour ceux qui ont un bail au mois ou à la semaine.

Seules les personnes qui louent le même logement depuis au moins cinq ans peuvent demander la révision de la modificati­on de leur bail au Tribunal sur la location de locaux d’habitation. Il jugera si elle est équitable et raisonnabl­e.

«Il n’y a pas de mécanisme d’appel à part une requête en révision judiciaire à la Cour du Banc de la Reine, avec tous les problèmes que ça peut poser: les très longs délais et la lourdeur du système judiciaire», regrette cependant M. Goguen.

Au contraire du Nouveau-Brunswick, le Québec, l’Île-du-Prince-Édouard, l’Ontario, le Manitoba et la ColombieBr­itannique encadrent les augmentati­ons de loyer.

Selon la SCHL, leur loyer moyen de 2019 était toutefois souvent plus élevé que celui du Nouveau-Brunswick (805$). Il était respective­ment de 800$, 882$, 1273$, 1048$ et 1320$.

ÉVICTIONS RAPIDES

Radio-Canada a par ailleurs raconté l’éviction avec un mois de préavis d’une famille nombreuse qui louait un logement depuis trois ans à Moncton. Elle avait signé un bail mensuel.

La législatio­n du Nouveau-Brunswick permet de résilier un bail à la semaine, au mois et à l’année en respectant un préavis, respective­ment, d’une semaine, d’un mois et de trois mois.

«La Loi sur la location de locaux d’habitation, de façon générale, ne date pas d’hier et son esprit non plus», juge M. Goguen.

«En anglais, on y trouve les termes landlord et tenant qui remontent au système féodal. Et jeter cette famille à la rue avec un mois de préavis en pleine pandémie, c’est la traiter comme jetable et indésirabl­e.»

«La Loi devrait trouver un meilleur équilibre social que celui des seigneurs et des paysans.» ■

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Le petit nombre de logements à louer a pour conséquenc­e que les propriétai­res ont le gros bout du bâton. - Archives
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