Inspirer les provinces et territoires à en faire plus
Étant donné qu’un nombre restreint d’industries et de milieux de travail sont soumis à la règlementation fédérale, les provinces et territoires ont également leur rôle à jouer dans la mise en place de règlementation pour atteindre l’équité. Eve-Lyne Couturier, de l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques, espère que la Loi fédérale permettra de renforcer les lois sur l’équité salariale existantes dans les différentes régions du pays – «qui varient et qui invitent au perfectionnement avec le temps», précise la chercheuse. «La Loi fédérale ressemble beaucoup à celle du Québec, qui n’est pas la pire des lois sur l’équité salariale, même s’il y a beaucoup de travail à faire. Mais si toutes les provinces s’alignaient sur le fédéral, sur le Québec, ça serait déjà un pas dans la bonne direction. En même temps, c’est sûr qu’il y a des angles morts dans ce qu’on a vu au Québec qui seront répliqués au fédéral», souligne Eve-Lyne Couturier.
Parmi ces angles morts, la chercheuse nomme la comparaison des salaires au sein d’une même entreprise, et non pas au sein d’une industrie ou d’un domaine: «Donc une entreprise qui serait majoritairement féminine ou un domaine qui serait majoritairement féminin va avoir quand même des salaires moindres qu’un domaine connexe majoritairement masculin. Si ce n’est pas le même employeur, ces salaires-là ne seront pas comparés», illustre-t-elle.
Pour Soukaina Boutiyeb, «il y a aussi un leadership à avoir de la part du gouvernement fédéral pour travailler avec l’ensemble des provinces et territoires et s’assurer qu’elles aient toutes une loi sur l’équité salariale qui soit là pour tout le monde». La directrice de l’Alliance des femmes de la francophonie canadienne espère en outre que le gouvernement fédéral prendra en compte l’Analyse comparative entre les sexes plus (ACS+) dans l’implantation de sa Loi, pour s’assurer que les femmes minorisées - racisées, francophones, ayant un handicap ou autre - ne soient pas affectées de manière disproportionnée.
Eve-Lyne Couturier souligne en outre que l’écart salarial entre les hommes et les femmes «s’explique par un nombre de variables assez important: type d’études, d’emplois, prise de risque, heures travaillées… Mais même quand on compense toutes ces variables-là, il reste toujours un écart inexplicable. C’est cet écart-là qu’il faut changer».
«Il faut repenser aussi l’équilibre travail-famille et les valeurs qu’on encourage et qu’on valorise en tant que société. On ne peut pas juste avoir des gens qui prennent des risques et qui travaillent des heures de fous; ça prend des gens pour faire à manger, le lavage, s’occuper des enfants, du bien-être émotionnel… Ça prend du temps et de l’énergie.»
À l’avenir, la chercheuse aimerait que la notion d’équité salariale prenne en compte «l’équilibre général de la société, le travail invisible et domestique» pour que les gens ayant des charges mentales domestiques très importantes soient pleinement inclus. - Francopresse