Un blasphème politique
Une proposition de loi qui fait son chemin à la Chambre des communes est tellement sensée que je ne vois pas comment on pourrait s’y opposer. Et pourtant, nous allons entendre les cris de ceux qui ne seraient plus protégés contre les accusations de crimes haineux, si cette loi était adoptée.
Le projet de loi C-367, présenté par le Bloc québécois, supprimerait une exemption dans l’article du Code criminel relatif aux discours haineux, qui dit que nul ne peut être déclaré coupable d’inciter à la haine contre des personnes qui se différencient par la couleur, la race, la religion, l’origine, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’expression de genre ou un handicap, si leur opinion est fondée sur un texte religieux auquel il croit.
C’est une exemption étrange. Notre Constitution garantit la liberté de pensée, de conscience et d’opinion - religieuses ou laïques - mais les discours de haine ne sont pas autorisés simplement parce que quelqu’un croit fermement et sincèrement en sa haine. À moins que la base de l’opinion exprimée est un texte religieux.
C’est la vieille excuse de «mon voisin ou ma femme - n’est pas mon égal parce que je l’ai lu dans un livre».
Une excuse qui ne tient pas la route. Les religieux, comme tout le monde, ont le droit de penser et de croire ce qu’ils veulent chez eux et dans leurs églises. Mais leur liberté de haïr et de discriminer s’arrête aussitôt qu’elle a un impact sur les autres, en particulier sur les minorités qui font l’objet de discours haineux.
L’automne dernier, les signes et les chants épouvantables - «Arrêtez de dresser nos enfants», «Dieu te hait» – par des personnes religieuses de diverses allégeances manifestant contre la politique 713 - mais en réalité contre les citoyens trans et non hétérosexuels - ont montré que la désinformation bizarre si répandue aux ÉtatsUnis a atteint nos rivages. Ce jour-là, nous avons vu Blaine Higgs choisir son camp. Il a courtisé les fanatiques anti-LGBTQ à Fredericton, mais a ostentatoirement évité les manifestants soutenant l’égalité et les droits de la personne.
La religion et les dysfonctionnements sont également entrés dans la mêlée politique par d’autres moyens.
On a l’impression qu’à un moment donné, les Néo-Brunswickois et le Parti progressiste-conservateur ont été les enjeux d’une partie de poker et maintenant, chaque jour, nous nous demandons ce que fera le nouveau propriétaire. Les actions semblent de plus en plus déconnectées des priorités collectives. L’abolition des conseils de santé élus et d’autres décisions unilatérales ont donné à tous l’impression que la participation des citoyens n’était pas souhaitée. Diverses autres actions surprenantes ont provoqué une révolte, bien qu’impuissante, de la part de membres du cabinet et du parti qui n’étaient pas respectés.
M. Higgs, qui devait se trouver de nouveaux amis et semblait avoir pris un virage religieux, a recruté l’évangéliste Faytene Grasseschi, célèbre pour avoir prôné la prise de contrôle de la politique des nations afin de «restaurer» la moralité de Dieu.
Elle dit avoir «évolué» depuis. Je rassurée qu’elle croie en l’évolution.
La démocratie a évolué lorsque nous avons cessé d’accorder du crédit au droit
suis divin des rois et à l’idée que les lois divines l’emportent sur celles adoptées par les citoyens. Il arrive souvent que la politique doive protéger nos droits de la religion parce que les religions se sont souvent opposées aux personnes en quête d’égalité.
Les bigots utilisent la religion pour brandir leur haine sans culpabilité et, au Canada, sans répercussion.
Que cette loi soit adoptée rapidement. Que les haïsseurs subissent les foudres de la loi. Amen. ■