DÉMYSTIFIER UN ÉTRANGE BUDGET
Le premier ministre Blaine Higgs, par l’intermédiaire de son ministre des Finances Ernie Steeves, vient de présenter son budget le plus dépensier depuis qu’il est en politique.
Au cours du prochain exercice financier, son gouvernement prévoit d’augmenter ses dépenses de 800 millions de dollars, soit environ 6,5%. Il s’agit de la plus forte augmentation depuis des décennies.
On parle ici des dépenses prévues au budget. En termes de dépenses réelles, l’année qui se termine sera encore plus coûteuse. Le gouvernement prévoit qu’au final, ses dépenses vont augmenter d’environ un milliard de dollars.
Que se passe-t-il? La réponse courte semble se trouver dans la démographie et l’inflation, plus précisément celle affichée au cours des dernières années. Commençons par l’inflation. Contrairement à ce qui prévaut à Ottawa, relativement peu de dépenses du gouvernement du NouveauBrunswick sont automatiquement ajustées à l’inflation. La part du lion de son budget est constituée de salaires et d’avantages sociaux, dont la quasi-totalité ne sont ajustés qu’au fil du temps par le biais de négociations collectives. L’exercice 2021-22 a été particulièrement chargé sur ce front. C’est à ce moment-là que le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) et le Syndicat des infirmières et infirmiers du Nouveau-Brunswick ont conclu des ententes impliquant environ 28 000 des quelques 46 000 employés du secteur public de la province.
On se souviendra que les dirigeants du SCFP étaient tout sourire à l’automne 2021, ayant réussi à plier le gouvernement à leur volonté en accordant des augmentations salariales annuelles de 3% sur quatre ans.
Tout cela s’est produit avant que l’inflation ne grimpe en flèche. En 2022 et 2023, les prix ont augmenté en moyenne de plus de 5% par année. En bout de ligne, les membres de SCFP n’avaient pas de quoi se réjouir. En somme, pendant un certain temps après la pandémie, le gouvernement a économisé des sommes considérables sur le dos des travailleurs du secteur public. Le boomerang revient maintenant dans le visage de Fredericton. Les employés du secteur public veulent naturellement récupérer le pouvoir d’achat qu’ils ont perdu et la facture grimpe en flèche. Nous sommes loin de l’époque où Higgs pouvait contempler de geler les salaires ou encore les limiter à une hausse annuelle de 1%, comme il voulait au début de son gouvernement majoritaire.
L’autre facteur derrière la hausse spectaculaire des dépenses est une population qui explose et voit ses rangs de personnes âgées gonfler. Avec une population scolaire en plein essor, le gouvernement prévoit que les dépenses du ministère de l’Éducation et du Développement de la petite enfance vont augmenter de plus de 10%. L’enveloppe destinée aux personnes âgées et aux soins de longue durée connaît également une très forte croissance. Paradoxalement, ce n’est pas le cas pour le ministère de la Santé. Si on le compare aux sommes qui seront dépensées cette année, le budget du ministère est effectivement gelé. Le gouvernement doit nous expliquer comment cela est réalisable dans un contexte de crise et d’explosion démographique.
Ceci nous amène à notre dernière observation par rapport au budget. Jusqu’à l’année en cours, les prévisions du gouvernement en matière de recettes ne valaient même pas le papier sur lequel elles étaient rédigées. Cette année, elles semblent plus réalistes.
Pour ce qui est du réalisme des dépenses, avec le gel au ministère de la Santé, on peut en douter fortement. Le gouvernement semble passer d’un problème à un autre dans la préparation de ses budgets.
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